Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme H... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon :
1°) d'annuler la décision du 20 janvier 2016 par laquelle le président de la métropole de Lyon a unilatéralement modifié les clauses de son contrat de travail relatives à sa rémunération ;
2°) d'annuler la décision du 11 avril 2016 par laquelle le président de la métropole de Lyon l'a licenciée ;
3°) de condamner la métropole de Lyon à lui verser une somme de 30 000 euros en réparation des préjudices financier, professionnel et moral causés par l'illégalité de la décision du 20 janvier 2016.
Par un jugement n°s 1602193 - 1604996 du 20 juillet 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 20 janvier 2016 du président de la métropole de Lyon procédant à la modification unilatérale du contrat de Mme D... et a rejeté le surplus des conclusions de cette dernière.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 septembre 2018 et 14 juin 2019, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 20 juillet 2018 en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires et sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 avril 2016 ;
2°) d'annuler la décision du 11 avril 2016 de la métropole de Lyon ;
3°) de condamner la métropole de Lyon au versement d'une somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
4°) de mettre à la charge de la métropole de Lyon une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa demande indemnitaire est recevable ;
- la décision de licenciement est entachée d'un détournement de pouvoir ;
- l'appréciation portée sur le reclassement n'est pas justifiée.
Par des mémoires en défense, enregistré le 7 mars et le 14 novembre 2019, la métropole de Lyon, représentée par Me G..., conclut au rejet de la requête en ce qui concerne l'annulation de la décision du 11 avril 2016 de son président et de la demande indemnitaire présentée par Mme D..., et par la voie de l'appel incident à l'annulation du jugement en tant qu'il a annulé la décision du 20 janvier 2016 de son président.
Elle fait valoir que :
- à la suite des observations du préfet du Rhône sur l'avenant du 1er janvier 2015 et du refus de Mme D... de signer l'avenant du 4 septembre 2015, elle était tenue de modifier unilatéralement la clause illégale de son contrat ;
- les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme J..., présidente-assesseure,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me B... représentant Mme D... et celles de Me F... représentant la métropole de Lyon ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., engagée depuis le 1er mai 2003 par la métropole de Lyon, bénéficiait depuis le 16 mai 2014, d'un contrat conclu pour une durée indéterminée, sur la base d'une rémunération fixée à l'indice majoré 871, pour des fonctions de collaborateur de groupe d'élus. Par un avenant en date du 1er janvier 2015, la rémunération de Mme D... a été portée à l'indice majoré 1 000. Par une décision du 20 janvier 2016, le président de la métropole de Lyon a décidé de modifier unilatéralement le contrat à défaut d'accord entre les parties et de fixer la rémunération de Mme D... à l'indice majoré 813. Par une décision du 11 avril 2016, le président de la métropole de Lyon a procédé au licenciement pour perte de confiance de Mme D.... Cette dernière relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 avril 2016 du président de la métropole de Lyon, et à l'indemnisation du préjudice résultant de l'illégalité de la décision du 20 janvier 2016. La métropole de Lyon conclut au rejet de la requête et demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation de l'article 1er du jugement qui annule la décision du 20 janvier 2016 de son président procédant à la modification unilatérale du contrat de Mme D....
Sur l'appel principal :
En ce qui concerne la recevabilité des conclusions indemnitaires de Mme D... présentées devant le tribunal administratif :
2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dans sa rédaction applicable aux requêtes enregistrées avant le 1er janvier 2017 : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision ". Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence d'une décision de l'administration rejetant une demande formée devant elle par le requérant ou pour son compte, une requête tendant au versement d'une somme d'argent est irrecevable et peut être rejetée pour ce motif.
3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle les premiers juges ont statué, la métropole de Lyon n'avait pas conclu au fond sur les conclusions indemnitaires de Mme D... et que la collectivité n'avait ni expressément ni implicitement rejeté la demande indemnitaire présentée le 18 mai 2018 et réceptionnée le 22 mai 2018.
4. Par suite, Mme D... n'est pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges ont rejeté ses conclusions indemnitaires.
En ce qui concerne la légalité de la décision de licenciement de Mme D... en date du 11 avril 2016 :
5. Aux termes de l'article 110-1 de la même loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale: " Les agents contractuels recrutés sur le fondement du code général des collectivités territoriales pour exercer les fonctions de collaborateur de groupe d'élus sont engagés par contrat à durée déterminée pour une durée maximale de trois ans, renouvelable, dans la limite du terme du mandat électoral de l'assemblée délibérante concernée. / Si, à l'issue d'une période de six ans, ces contrats sont renouvelés, ils ne peuvent l'être que par décision expresse de l'autorité territoriale et pour une durée indéterminée. / La qualité de collaborateur de groupe d'élus est incompatible avec l'affectation à un emploi permanent d'une collectivité territoriale et ne donne aucun droit à titularisation dans un grade de la fonction publique territoriale. ".
6. En premier lieu, il ressort des termes de la décision prononçant le licenciement contesté que celui-ci est motivé par la dégradation des relations de travail entre le président du groupe Synergies-Avenir et Mme D... qui s'est traduite, notamment, par le non-respect de certaines consignes, plusieurs remises en cause en public des positions du président de groupe d'élus et l'envoi d'un mail par Mme D..., le 4 février 2016, à l'ensemble des groupes politiques et du cabinet du président de la métropole de Lyon relatif au différend qui l'opposait à son employeur sur sa rémunération. Il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment du compte rendu d'entretien, que la décision litigieuse reposerait sur le motif matériellement inexact de la perte de confiance ou que le président de la métropole de Lyon aurait entaché sa décision d'un détournement de pouvoir.
7. En second lieu, il résulte des termes mêmes de l'article 110-1 de la loi du 26 janvier 1984 précité que la qualité de collaborateur de groupe d'élus est incompatible avec l'affectation à un emploi permanent d'une collectivité territoriale. Mme D..., dont le contrat relève des dispositions de l'article 110-1 de la loi du 26 janvier 1984, ne peut, dans ces conditions, utilement se prévaloir des dispositions de l'article 39-5 du décret du 15 février 1988, qui ne sont applicables qu'aux agents contractuels recrutés sur un emploi permanent conformément à l'article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984. Par suite, Mme D... ne peut utilement soutenir que la métropole de Lyon n'aurait pas satisfait à son obligation de reclassement.
8. Il résulte ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 avril 2016.
En ce qui concerne la légalité de la décision de modification unilatérale du contrat de Mme D... en date du 20 avril 2016 :
9. Sauf s'il présente un caractère fictif ou frauduleux, le contrat de recrutement d'un agent contractuel de droit public crée des droits au profit de celui-ci. Lorsque le contrat est entaché d'une irrégularité, l'administration est tenue de proposer à celui-ci une régularisation de son contrat afin que son exécution puisse se poursuivre régulièrement. Hors les cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire ou que le retrait de la décision illégale intervient dans le délai de quatre mois suivant la date à laquelle elle a été prise, l'administration ne peut donc procéder à la modification d'un de ces éléments substantiels sans recueillir préalablement l'accord de l'agent. Les clauses portant sur la rémunération constituent un élément substantiel de ce contrat. Lorsque l'agent refuse une telle modification de son contrat, l'administration ne peut procéder à la modification unilatérale du contrat, mais en cas de désaccord persistant peut licencier l'agent.
10. Par un avenant, en date du 1er janvier 2015, au contrat à durée indéterminée de Mme D... signé avec la métropole de Lyon, il a été décidé de rémunérer Mme D... sur la base de l'indice majoré 1000. Par un recours gracieux du 2 février 2015, le préfet du Rhône a demandé à la métropole de Lyon le retrait de cet avenant. Mme D... a refusé de signer le nouvel avenant proposé par la métropole de Lyon le 4 septembre 2015 qui fixait l'indice majoré appliqué à 813. La métropole de Lyon ne pouvait cependant, par la décision du 20 janvier 2016, modifier unilatéralement l'avenant du 1er janvier 2015 qui était créateur de droits au profit de l'intéressée, au motif qu'elle était tenue de le faire en raison de son illégalité et du refus de Mme D... d'accepter la signature d'un nouvel avenant. Ainsi, la décision du 20 janvier 2016 du président de la métropole de Lyon est illégale.
11. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des conclusions incidentes de la métropole de Lyon, celle-ci n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a par le jugement attaqué annulé la décision du 20 janvier 2016.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la métropole de Lyon, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit de Mme D..., au titre des frais exposés à l'occasion du litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident de la métropole de Lyon sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... D... et à la métropole de Lyon.
Délibéré après l'audience du 4 février 2020, à laquelle siégeaient :
Mme E... A..., présidente de chambre,
Mme K..., présidente-assesseure,
Mme C... I..., première conseillère.
Lu en audience publique le 12 mars 2020.
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N° 18LY03545