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09/04/2020 | FRANCE | N°18LY04362

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 09 avril 2020, 18LY04362


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. G... H... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler la décision du 1er mars 2016 par laquelle le maire de Montbrison l'a mis à la retraite pour invalidité à compter du 1er janvier 2016 et radié des cadres à compter de cette même date ;

²

2°) d'enjoindre au maire de Montbrison de le réintégrer, en procédant à la reconstitution de sa carrière avec toutes les conséquences sur ses droits à la retraite et à rémunération, subsidiairement de réexaminer sa situ

ation, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 100 euros...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. G... H... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler la décision du 1er mars 2016 par laquelle le maire de Montbrison l'a mis à la retraite pour invalidité à compter du 1er janvier 2016 et radié des cadres à compter de cette même date ;

²

2°) d'enjoindre au maire de Montbrison de le réintégrer, en procédant à la reconstitution de sa carrière avec toutes les conséquences sur ses droits à la retraite et à rémunération, subsidiairement de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1604631 du 19 septembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 1er mars 2016 par laquelle le maire de Montbrison a radié des cadres M. H... en tant qu'elle s'applique du 1er janvier au 29 février 2016 et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 décembre 2018 et un mémoire non communiqué enregistré le 6 janvier 2020, M. H..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande d'annulation de la décision du 1er mars 2016 le radiant des cadres pour la période postérieure au 29 février 2016 ;

A titre principal :

2°) d'annuler intégralement la décision du 1er mars 2016 ;

3°) d'enjoindre au maire de Montbrison de le réintégrer à compter du 1er janvier 2016, en procédant à la reconstitution de sa carrière avec toutes les conséquences sur ses droits à la retraite et à rémunération, subsidiairement de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

A titre subsidiaire :

4°) d'annuler la décision du 1er mars 2016 en tant qu'elle prend effet antérieurement à sa notification ;

5°) d'enjoindre au maire de Montbrison de le réintégrer à compter du 1er janvier 2016 jusqu'à la date de la notification de la décision du 1er mars 2016 ainsi que de procéder, en conséquence, à la reconstitution de sa carrière avec toutes les conséquences sur ses droits à la retraite et à rémunération, subsidiairement de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Il demande que soit mise à la charge de la commune de Montbrison une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré de l'impossibilité de le mettre à la retraite d'office pour inaptitude sans que n'ait été constatée son inaptitude définitive à toute fonctions ;

- le tribunal administratif a dénaturé ses écritures en estimant qu'il n'invoquait pas une méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure devant la commission de réforme ;

- il incombe à la commune de Montbrison de démontrer qu'il a reçu les courriers de convocation à la séance de la commission de réforme ;

- la mise à la retraite d'office pour inaptitude ne pouvait être prononcée dès lors que son inaptitude définitive n'a pas été établie ;

- la commune a méconnu son obligation de reclassement ;

- le tribunal administratif a commis une erreur de droit en n'annulant la décision du 1er mars 2016 qu'en tant qu'elle s'applique du 1er janvier 2016 jusqu'à sa date d'adoption et non de notification.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2019, la commune de Montbrison, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête, à l'annulation de l'article 1er du jugement attaqué et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. H... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les moyens présentés par l'appelant ne sont pas fondés ;

- la rétroactivité de la décision portant placement à la retraite et radiation des cadres n'emportait pas son annulation.

M. H... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2003-1036 du 26 décembre 2003 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme J..., présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Thierry, rapporteur public,

- et les observations de Me F..., représentant M. H..., et celles de Me C..., représentant la commune de Montbrison ;

Considérant ce qui suit :

1. M. H... était adjoint technique territorial de première classe au sein des effectifs de la commune de Montbrison. Alors qu'il occupait des fonctions d'agent d'entretien, il a été victime d'un accident de service survenu le 7 mars 2011 lui ayant occasionné une fracture de la main droite laissant comme séquelles une algodystrophie et une raideur qui ont justifié une incapacité permanente partielle évaluée à 24 %. Par une décision du 1er mars 2016, le maire de Montbrison l'a mis à la retraite pour invalidité et l'a radié des effectifs de la commune à compter du 1er janvier 2016. Par un jugement n° 1604631 du 19 septembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision litigieuse, en tant qu'elle s'applique du 1er janvier au 29 février 2016 et rejeté le surplus des conclusions de la demande de l'intéressé. M. H... relève appel du jugement précité du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. La commune de Montbrison présente des conclusions incidentes tendant à l'annulation de l'article 1er de ce jugement.

Sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement :

Sur l'appel principal :

2. Lorsque le juge de l'excès de pouvoir annule une décision administrative alors que plusieurs moyens sont de nature à en justifier l'annulation, il lui revient, en principe, de choisir de fonder l'annulation sur le moyen qui lui paraît le mieux à même de régler le litige, au vu de l'ensemble des circonstances de l'affaire. Mais, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions à fin d'annulation, des conclusions à fin d'injonction tendant à ce que le juge enjoigne à l'autorité administrative de prendre une décision dans un sens déterminé, il incombe au juge de l'excès de pouvoir d'examiner prioritairement les moyens qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de l'injonction demandée.

3. L'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière dispose que : " Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux ".

4. La commune de Montbrison a produit un courrier du centre de gestion de la fonction publique territoriale daté du 19 janvier 2019 informant M. H... que son dossier sera examiné lors de la séance de la commission de réforme du 4 février 2016 et de l'ensemble de ses droits. Même si les dispositions précitées n'imposent pas que l'information soit faite par lettre recommandée avec accusé de réception, en se bornant à produire la simple copie du courrier, sans justifier de ce que ladite information a été notifiée à M. H..., qui conteste l'avoir reçue, la commune de Montbrison n'établit pas que ce dernier a été informé de ses droits et de la réunion de la commission de réforme. Il n'a d'ailleurs présenté aucune observation écrite avant la séance à laquelle il n'était ni présent ni représenté. Ainsi, et dès lors que l'absence d'une telle information doit être regardée comme l'ayant privé d'une garantie, M. H... est fondé à soutenir que la décision du 1er mars 2016 du maire de Montbrison, fondée notamment sur l'avis de la commission de réforme émis le 4 février 2016 a été prise au terme d'une procédure irrégulière.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. H... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon n'a annulé la décision litigieuse qu'en tant seulement qu'elle s'applique du 1er janvier au 29 février 2016.

Sur les conclusions incidentes de la commune :

6. Les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir. Par suite, en l'absence de disposition législative l'y autorisant, l'administration ne peut, même lorsqu'elle est saisie d'une demande de l'intéressé en ce sens, déroger à cette règle générale et conférer un effet rétroactif à une décision d'admission à la retraite, à moins qu'il ne soit nécessaire de prendre une mesure rétroactive pour tirer les conséquences de la survenance de la limite d'âge, pour placer l'agent dans une situation régulière ou pour remédier à une illégalité.

7. La commune de Montbrison fait valoir que dès lors que la CNRACL avait, dans son courrier du 18 février 2016, donné un avis favorable à la mise à la retraite de M. H... et à sa radiation des cadres à la date du paiement de sa retraite pour invalidité, elle était tenue de prononcer une mesure de radiation rétroactive. Cependant la commune n'était pas liée par la date indiquée par la CNRACL dans son avis, et l'application rétroactive de cet arrêté n'était pas nécessaire pour placer l'intéressé, qui était en congé de maladie pour accident de service durant la période en cause, dans une situation régulière. Par suite, les conclusions incidentes de la commune doivent être rejetées.

Sur les conclusions de la requête à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt implique seulement que la commune de Montbrison réexamine la situation de M. H.... Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. H..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de Montbrison à l'occasion du litige.

10. M. H... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me F..., avocat de M. H..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de la commune de Montbrison la somme de 1 200 euros qu'il demande au profit de cet avocat au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 19 septembre 2018 est annulé en tant qu'il n'a pas annulé dans son ensemble la décision du 1er mars 2016 du maire de la commune de Montbrison par laquelle M. H... a été mis à la retraite pour invalidité à compter du 1er janvier 2016 et radié des cadres à compter de cette même date.

Article 2 : La décision précitée du 1er mars 2016 du maire de la commune de Montbrison est annulée dans son ensemble.

Article 3 : Il est enjoint à la commune de Montbrison de réexaminer la situation de M. H... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Les conclusions incidentes de la commune sont rejetées.

Article 5 : La commune de Montbrison versera la somme de 1 200 euros à Me F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... H... et à la commune de Montbrison.

Délibéré après l'audience du 25 février 2020, à laquelle siégeaient :

Mme E... A..., présidente de chambre,

Mme K..., présidente-assesseure,

Mme D... I..., première conseillère.

Lu en audience publique le 9 avril 2020.

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N° 18LY04362


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY04362
Date de la décision : 09/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-03 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Mise à la retraite d'office.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. THIERRY
Avocat(s) : HAMMERER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-04-09;18ly04362 ?
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