Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la restitution des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2011, 2012, 2013 et 2014.
Par un jugement n° 1700511 du 7 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 janvier 2019 et le 13 août 2019, M. et Mme C..., représentés par Me D..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 décembre 2018 ;
2°) de prononcer la restitution des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2011, 2012, 2013 et 2014, à hauteur de la somme totale de 18 482 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- M. C... doit être regardé comme relevant du régime de sécurité sociale suisse ; par suite, l'administration ne pouvait soumettre les revenus du patrimoine du foyer aux prélèvements sociaux sans méconnaître l'article 11 du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;
- en tout état de cause, c'est à tort que l'administration a maintenu à leur charge une fraction de la contribution sociale généralisée et du prélèvement social, et l'intégralité de la contribution additionnelle au prélèvement social, au motif que ces prélèvements étaient affectés au financement de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, dès lors que les prestations financées par cette caisse ne se rattachent pas au risque maladie mais aux risques invalidité et vieillesse ;
- en les soumettant à une double cotisation, l'administration méconnaît les principes d'égalité de traitement et de non-discrimination qui résultent des articles 45 et 157 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et l'article 4 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004 ;
- la contribution additionnelle au taux de 1,1 % et le prélèvement de solidarité au taux de 2 % entrent dans le champ du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004 alors même qu'ils sont affectés au financement de fonds nationaux qui distribuent des prestations sociales non contributives.
Par un mémoire enregistré le 19 juillet 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Le ministre de l'action et des comptes publics soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, fait à Luxembourg le 21 juin 1999, son annexe II, ensemble les décisions n° 2/2003 du 15 juillet 2003 et n° 1/2012 du 31 mars 2012 du comité mixte ;
- le règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code du travail ;
- l'arrêt n° C-372/18 du 14 mars 2019 de la Cour de justice de l'Union européenne ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B..., présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme G..., rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C... étaient fiscalement domiciliés en France au titre des années 2011 à 2014. M. C..., qui travaillait en Suisse, a fait usage de la faculté d'exemption ouverte par l'annexe II de l'accord du 21 juin 1999 entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes et a souscrit, ainsi que le permettait alors le II de l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale, un contrat auprès d'un assureur privé, la société MMA assurances, qui a couvert le risque maladie au titre de ces quatre années. M. et Mme C... ont été assujettis aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine qu'ils ont perçus au cours des années 2011 à 2014. Ils ont saisi l'administration fiscale d'une demande de décharge de ces impositions en se prévalant du principe de l'unicité de la législation applicable en matière sociale résultant de l'article 11 du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale. L'administration n'a fait que partiellement droit à cette demande, en maintenant à leur charge une fraction de la contribution sociale généralisée au titre des années 2011, 2012, 2013 et 2014, une fraction du prélèvement social au titre des années 2011, 2013 et 2014, l'intégralité de la contribution additionnelle au prélèvement social au titre des années 2011, 2012, 2013 et 2014, la contribution additionnelle au taux de 1,1 % au titre de l'année 2011 et le prélèvement de solidarité au taux de 2 % au titre des années 2012 et 2014, au motif que ces prélèvements ou fractions de prélèvements, soit étaient affectés au financement de l'assurance-maladie, soit étaient situés en dehors du champ d'application du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 7 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions maintenues à leur charge.
Sur les conclusions à fin de décharge des cotisations de contribution sociale généralisée, de prélèvement social et de contribution additionnelle au prélèvement social demeurant en litige :
2. Aux termes de l'article 1600-0 C du code général des impôts : " La contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine est établie, contrôlée et recouvrée conformément aux dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale. ". Aux termes de l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale, alors en vigueur : " Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à un prélèvement sur les revenus et les sommes mentionnés aux I et II de l'article L. 136-6. Sont également soumises à ce prélèvement, à raison des revenus mentionnés au I bis de l'article L. 136-6 du présent code, les personnes physiques qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts. Les dispositions du III de l'article L. 136-6 sont applicables à ce prélèvement. " Aux termes de l'article L. 1600-0 S du code général des impôts : " I. - Il est institué : 1° Un prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine mentionnés à l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale (...) II. - Le prélèvement de solidarité mentionné au 1° du I est assis, contrôlé et recouvré selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que la contribution mentionnée à l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale. ". Et aux termes de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige : " I. - Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, à l'exception de ceux ayant déjà supporté la contribution au titre des articles L. 136-3, L. 136-4 et L. 136-7 :a) Des revenus fonciers ;b) Des rentes viagères constituées à titre onéreux ;c) Des revenus de capitaux mobiliers ; (...) e) Des plus-values, gains en capital et profits réalisés sur les marchés à terme d'instruments financiers et de marchandises, ainsi que sur les marchés d'options négociables, soumis à l'impôt sur le revenu, de même que des distributions définies aux 7 et 8 du II de l'article 150-0 A du code général des impôts et du gain défini à l'article 150 duodecies du même code ;e bis) Des plus-values et des créances mentionnées au I et au II de l'article 167 bis du code général des impôts ;e ter) Les gains nets placés en report d'imposition en application des I et II de l'article 150-0 D bis du code général des impôts ;f) De tous revenus qui entrent dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices non commerciaux ou des bénéfices agricoles au sens du code général des impôts, à l'exception de ceux qui sont assujettis à la contribution sur les revenus d'activité et de remplacement définie aux articles L. 136-1 à L. 136 -5. ".
3. En vertu de l'article 11 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, les personnes auxquelles ce règlement est applicable ne sont soumises qu'à la législation sociale d'un seul Etat membre. Conformément à ce principe d'unicité de législation, ce règlement prévoit que l'exercice d'une activité salariée ou non salariée dans un Etat membre implique normalement l'application de la législation sociale de cet État.
4. Depuis le 1er avril 2012, en vertu de la décision n° 1/2012 du 31 mars 2012 du comité mixte qui a modifié l'annexe II de l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes du 21 juin 1999, l'annexe XI du règlement n° 883/2004 du 29 avril 2004 a été complétée par des dispositions prévoyant que les personnes exerçant une activité en Suisse sont soumises à la législation de cet Etat en matière d'assurance maladie alors même qu'elles n'y résideraient pas, mais que les résidents de certains Etats, dont la France depuis la décision n° 2/2003 du 15 juillet 2003 du comité mixte, peuvent demander à être exemptées de cette affiliation obligatoire sous réserve de prouver qu'elles bénéficient dans l'Etat de résidence d'une couverture en cas de maladie.
5. Aux termes de l'article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige, qui définit en droit interne les conditions de l'exemption présentée au point 4 ci-dessus : " I. - Les travailleurs frontaliers résidant en France et soumis obligatoirement à la législation suisse de sécurité sociale au titre des dispositions de l'accord du 21 juin 1999 entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, mais qui, sur leur demande, sont exemptés d'affiliation obligatoire au régime suisse d'assurance maladie en application des dispositions dérogatoires de cet accord, sont affiliés obligatoirement au régime général dans les conditions fixées par l'article L. 380-1. / II. - Toutefois, les travailleurs frontaliers occupés en Suisse et exemptés d'affiliation obligatoire au régime suisse d'assurance maladie peuvent demander à ce que les dispositions du I ne leur soient pas appliquées, ainsi qu'à leurs ayants droit, jusqu'à la fin des dispositions transitoires relatives à la libre circulation des personnes entre la Suisse et l'Union européenne, soit douze ans à partir de l'entrée en vigueur de l'accord du 21 juin 1999 précité, à condition d'être en mesure de produire un contrat d'assurance maladie les couvrant, ainsi que leurs ayants droit, pour l'ensemble des soins reçus sur le territoire français (...) ". Il résulte de ces dispositions que, par dérogation à la règle de rattachement définie par le règlement (CE) n° 883/2004 et rappelée au point 3 ci-dessus, les personnes résidant en France et exerçant une activité en Suisse, qui ont demandé à bénéficier de la clause d'exemption ouverte par l'annexe II de l'acc rd du 21 juin 1999, relèvent, pour la couverture maladie, de la seule législation française, qui prescrit leur affiliation au régime général et, pendant une période transitoire s'achevant le 31 mai 2014, les autorisait, sur demande, à souscrire un contrat d'assurance auprès d'un opérateur privé en lieu et place de leur affiliation au régime général.
6. En premier lieu, l'exercice par M. C... de la faculté d'exemption de l'assurance obligatoire suisse conduit seulement à rendre applicable la législation sociale française, quand bien même cette législation prévoyait, durant les années d'imposition en litige, l'exercice d'une option entre l'affiliation au régime général et la souscription d'un contrat d'assurance auprès d'un opérateur privé. La circonstance que M. C... a fait usage de cette faculté ne permet pas de le regarder comme relevant du régime de sécurité sociale suisse. Par suite, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que les impositions restant en litige ont été prélevées en méconnaissance du principe de l'unicité de législation sociale.
7. En deuxième lieu, M. et Mme C... soutiennent que c'est à tort que l'administration a maintenu à leur charge une fraction des prélèvements sociaux en litige, en tant qu'elle est affectée au financement de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, dès lors que les prestations dont cette caisse assure le versement, l'allocation personnalisée d'autonomie et la prestation compensatoire du handicap, ne peuvent être regardées comme afférentes au risque maladie, seul risque pour lequel M. C... relève de la législation sociale française.
8. Par un arrêt n° C-372/18 du 14 mars 2019, la Cour de justice de l'Union européenne, saisie par la cour administrative d'appel de Nancy d'une question préjudicielle relative au prélèvement social et à la contribution additionnelle à ce prélèvement affectés au financement de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, a dit pour droit que l'article 3 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004 doit être interprété en ce sens que des prestations, telles que l'allocation personnalisée d'autonomie et la prestation compensatoire du handicap, doivent, aux fins de leur qualification de " prestations de sécurité sociale " au sens de cette disposition, être considérées comme étant octroyées en dehors de toute appréciation individuelle des besoins personnels du bénéficiaire, dès lors que les ressources de ce dernier sont prises en compte aux seules fins du calcul du montant effectif de ces prestations sur la base de critères objectifs et légalement définis. Par ailleurs, l'allocation personnalisée d'autonomie et la prestation compensatoire du handicap, qui sont des prestations portant sur le risque de dépendance et qui visent à améliorer l'état de santé et la vie des personnes dépendantes, tout en présentant des caractéristiques qui leur sont propres, doivent être assimilées à des " prestations de maladie ", au sens du a) de l'article 3, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004. Il en résulte que le prélèvement social et la contribution additionnelle à ce prélèvement affectés au financement de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie doivent, pour l'application de l'article 3 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, être regardés comme affectés à la couverture du risque maladie. Par suite, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que les prélèvements sociaux affectés au financement de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie ne pouvaient être maintenus à leur charge.
9. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que M. C..., qui relève de la législation française en matière d'assurance maladie, a uniquement été assujetti, de même que son épouse, aux prélèvements sociaux dont le produit est affecté au financement des fonds assurant la couverture du risque maladie. Par suite, M. et Mme C... ne peuvent utilement soutenir que l'administration, en les soumettant à une " double cotisation ", a méconnu les principes d'égalité de traitement et de non-discrimination résultant des articles 157, 45-1 et 45-2 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de l'article 4 du règlement (CE) n°883/2004 du 29 avril 2004.
Sur les conclusions à fin de décharge des cotisations de contribution additionnelle au taux de 1,1 % et du prélèvement de solidarité demeurant en litige :
10. En premier lieu, aux termes de l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles : " I.- Le revenu de solidarité active est financé par le fonds national des solidarités actives mentionné au II et les départements. (...) Le fonds national des solidarités actives finance la différence entre le total des sommes versées au titre de l'allocation de revenu de solidarité active par les organismes chargés de son service et la somme des contributions de chacun des départements. Il prend également en charge ses frais de fonctionnement ainsi qu'une partie des frais de gestion exposés par les organismes mentionnés à l'article L. 262-16. (...)/ III. Les recettes du fonds national des solidarités actives sont, notamment, constituées par une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale et une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l'article L. 245-15 du même code. Ces contributions additionnelles sont assises, contrôlées, recouvrées et exigibles dans les mêmes conditions et sont passibles des mêmes sanctions que celles applicables à ces prélèvements sociaux. Leur taux est fixé à 1,1 % et ne peut l'excéder (...) ". Il résulte de ces dispositions que la contribution qu'elles prévoient est spécifiquement affectée au financement du revenu de solidarité active.
11. Il résulte clairement des dispositions des articles 3 et 70 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, qui renvoient à l'annexe X de ce règlement, qu'une prestation non contributive relevant de l'assistance sociale n'entre dans le champ d'application de ce règlement que lorsqu'elle possède également les caractéristiques de la législation en matière de sécurité sociale visée au paragraphe 1 de son article 3 et à la condition, notamment, qu'elle soit mentionnée à l'annexe X à laquelle cet article renvoie.
12. D'une part, le revenu de solidarité active constitue une prestation non contributive relevant de l'assistance sociale. D'autre part, alors même qu'il posséderait également les caractéristiques d'une législation en matière de sécurité sociale visée à l'article 3, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, le revenu de solidarité active n'est, en tout état de cause, pas mentionné à l'annexe X de ce règlement qui liste les branches de sécurité sociale auxquelles il s'applique.
13. Il résulte de ce qui précède que la contribution en litige, dès lors qu'elle est spécifiquement affectée au financement d'une prestation qui ne relève pas de l'article 3 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, n'entre pas elle-même dans le champ d'application de ce règlement. Le moyen tiré de ce que cette contribution méconnaît l'article 11 de ce règlement est, dès lors, inopérant.
14. En second lieu, aux termes de l'article 1600-0 S du code général des impôts : " I. - Il est institué : / 1° Un prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine mentionnés à l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale ; / 2° Un prélèvement de solidarité sur les produits de placement mentionnés à l'article L. 136-7 du même code. / (...) / III. - Le taux des prélèvements de solidarité mentionnés au I est fixé à 2 % (...) ". Dans sa rédaction antérieure à celle applicable à compter du 1er janvier 2015 résultant de la loi du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, le IV du même article prévoyait que le produit de ces prélèvements de solidarité était affecté, pour partie, " au fonds mentionné à l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles ", pour partie " au fonds mentionné à l'article L. 351-6 du code de la construction et de l'habitation " et enfin, pour partie, " au fonds mentionné à l'article L. 5423-24 du code du travail ".
15. Le fonds national d'aide au logement finance l'aide personnalisée au logement, la prime de déménagement prévue à l'article L. 351-5 du code de la construction et de l'habitation et les dépenses de gestion qui s'y rapportent, les dépenses du conseil national de l'habitat ainsi que l'allocation de logement relevant du titre III du livre VIII du code de la sécurité sociale et les dépenses de gestion qui s'y rapportent. Ces prestations ne relèvent d'aucune des branches de sécurité sociale au sens de l'article 3, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004. En particulier, elles ne relèvent pas de la branche qui concerne les " prestations familiales " au sens du z) de l'article 1er du règlement, dès lors qu'elles ne sont pas " destinées à compenser les charges de famille ".
16. En vertu de l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction applicable avant le 1er janvier 2015, le fonds national des solidarités actives finance une part du revenu de solidarité active. Pour les motifs exposés aux points 11 à 13, cette prestation ne relève pas de l'article 3 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004.
17. Enfin, en vertu de l'article L. 5423-24 du code du travail, le fonds de solidarité gère les moyens de financement de l'allocation de solidarité spécifique prévue à l'article L. 5423-1, de l'allocation équivalent retraite prévue à l'article L. 5423-18, de la prime forfaitaire prévue à l'article L. 5425-3 et de l'aide prévue au II de l'article 136 de la loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996 de finances pour 1997. D'une part l'allocation de solidarité spécifique n'est pas une " prestation de chômage " au sens de l'article 3, paragraphe 1, sous h) du règlement (CE) n° 83/2004 du 29 avril 2004. Il en va de même pour l'allocation équivalent retraite qui, en vertu de l'article L. 5423-19 du code du travail, ainsi que des deux autres prestations financées par le fonds de solidarité. D'autre part, à supposer que ces prestations spéciales à caractère non contributif financées par le fonds de solidarité entrent dans le champ défini au paragraphe 1 de l'article 70 du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, elles ne sont en tout état de cause pas énumérées à l'annexe X de ce règlement.
18. Aucune des prestations financées par les trois fonds mentionnés à l'article 1600-0 S du code général des impôts auxquels est spécifiquement affecté le prélèvement de solidarité prévu à l'article 1600-0 S du code général des impôts dans sa rédaction applicable avant le 1er janvier 2015 n'entre dans le champ d'application du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004. Dès lors que le prélèvement de solidarité est spécifiquement affecté au financement de prestations qui ne relèvent pas du règlement (CE) n° 883/2004 du 29 avril 2004, il n'entre pas lui-même dans le champ d'application de ce règlement. Le moyen tiré de ce que ce prélèvement méconnaît son article 11 est, dès lors, inopérant.
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2: Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme E... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme B..., présidente-assesseure,
Mme H..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 12 novembre 2020.
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N° 19LY00370