Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision n° DEC172856DRH du 19 octobre 2017 par laquelle le président du centre national de la recherche scientifique (CNRS) l'a révoqué pour motif disciplinaire.
Par jugement n° 1706072 lu le 21 mai 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 16 juillet 2019, M. B..., représenté par Me de la Porte des Vaux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 mai 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 19 octobre 2017 par laquelle le président du centre national de la recherche scientifique l'a révoqué ;
3°) d'enjoindre au président du CNRS de le réintégrer dans ses fonctions sous astreinte de 100 euros par jours de retard ;
4°) de mettre à la charge du président du CNRS le versement d'une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les faits reprochés ne sont pas établis et que la sanction disciplinaire en litige est disproportionnée.
Par mémoire enregistré le 17 décembre 2019, le CNRS, représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. B... une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les faits reprochés sont établis.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 68-978 du 12 novembre 1968 modifiée d'orientation de l'enseignement supérieur ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction, publique de l'État ;
- la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur ;
- le décret n° 83-1260 du 30 décembre 1983 fixant les dispositions statutaires communes aux corps de fonctionnaires des établissements publics scientifiques et technologiques ;
- le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants chercheurs ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Burnichon, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
- et les observations de Me A... substituant Me de la Porte des Vaux, pour M. B..., ainsi que celles de Me D... pour le CNRS ;
Vu les notes en délibéré, enregistrées les 23 octobre 2020 et 26 octobre 2020, présentées pour M. B... et pour le CNRS ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... relève appel du jugement lu le 21 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 octobre 2017 par laquelle le président du CNRS a prononcé la sanction disciplinaire de révocation.
2. En premier lieu, d'une part, aux termes du 1er alinéa de l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 : " Le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité ". Aux termes de l'article 28 de la même loi : " Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées (...) ", et aux termes de l'article 3 du décret du 30 décembre 1983 susvisé : " Les fonctionnaires des établissements publics à caractère scientifique et technologique concourent à l'accomplissement des missions de la recherche définie par la loi du 15 juillet 1982 susvisée. / Ils participent à la formation initiale et à la formation continue principalement dans les organismes de recherche et dans les établissements d'enseignement supérieur ".
3. D'autre part, aux termes de l'article 29 de ce même texte : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ".
4. Il ressort des pièces du dossier que la sévérité dont a fait preuve M. B..., chargé de recherche affecté au laboratoire des technologies de la microélectronique (LTM), envers plusieurs étudiants, n'a pas dépassé les limites de ce qui peut être exigé, compte tenu du domaine d'activité et de la rigueur nécessaire au succès des travaux de recherche entrepris sous sa responsabilité. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les faits de dénigrement qui lui étaient imputés n'étaient pas matériellement établis. Par ailleurs, aucun des témoignages produits ne permet d'établir la consommation de substances illicites dans l'enceinte du service. Dès lors, ce grief n'est pas établi.
5. En revanche, il ressort de plusieurs témoignages que, réserves faites de relations consenties avec deux étudiantes, M. B... a adopté à l'égard de certains personnels féminins, placés sous sa direction, pendant le service, à l'occasion de déplacements professionnels ou de soirées entre collègues, des propos déplacés et humiliants à connotations sexuelles. De tels faits, relatés par des témoignages ou retracés par la messagerie professionnelle, sont établis et constituent des manquements aux devoirs, institués par les dispositions citées au point 2, de dignité du fonctionnaire et de bonne exécution des tâches, au nombre desquelles figure celle d'encadrer les étudiants accueillis par l'établissement et placés sous sa direction.
6. En second lieu, aux termes de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. Premier groupe : - l'avertissement ; - le blâme ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours. Deuxième groupe : - la radiation du tableau d'avancement ; - l'abaissement d'échelon à l'échelon immédiatement inférieur à celui détenu par l'agent ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours ; - le déplacement d'office. Troisième groupe : - la rétrogradation (...) ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans. Quatrième groupe : - la mise à la retraite d'office ; - la révocation (...) ".
7. La gravité des faits et leur réitération qui révèle un comportement d'habitude sont incompatibles avec l'exercice de missions de tutorat de longue durée dévolues aux chargés de recherche, lesquelles supposent l'instauration d'un lien de confiance avec les étudiants et le respect d'un cadre strictement professionnel. Par suite, en prononçant la sanction la plus sévère à l'encontre de l'intéressé et en dépit des états de service de M. B..., le président du CNRS n'a pas entaché la décision en litige d'erreur d'appréciation.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes du CNRS sur ce dernier fondement.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du centre national de la recherche scientifique tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au centre national de la recherche scientifique.
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Burnichon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 novembre 2020.
N° 19LY02771 2