Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme C... B... épouse A... F... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 18 mars 2019 par lesquelles le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 1903101 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 16 janvier 2020, Mme C... B... épouse A... F..., représentée par Me Clemang (SCP Clemang-Gourinat), avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 décembre 2019 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler les décisions du préfet de la Loire du 18 mars 2019 portant refus de délivrance d'une autorisation provisoire de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de la Loire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- cette décision méconnaît l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 mars 2020, le préfet de la Loire conclut au rejet de la demande.
Il expose s'en remettre au jugement attaqué.
Par une ordonnance du 23 juillet 2020, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 21 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme D... E..., première conseillère ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... épouse A... F..., ressortissante tunisienne née le 4 janvier 1982, déclare être entrée en France au cours du mois de juin 2017, accompagnée de son fils, G... A... F.... Le 27 juillet 2017, elle a sollicité la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, en raison de l'état de santé de son fils, sur le fondement de l'article L. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par des décisions du 18 mars 2019, le préfet de la Loire a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Mme A... F... relève appel du jugement du 17 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la légalité du refus d'autorisation provisoire de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, (...) sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11. (...) ". Selon l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
3. Pour rejeter la demande d'autorisation provisoire de séjour présentée par Mme A... F..., le préfet de la Loire s'est approprié le sens de l'avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 8 septembre 2018, selon lequel si l'état de santé de son fils nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier que Mohamed Aziz A... F... souffre depuis l'âge de 9 ans d'une pathologique neurologique avec atteinte des ceintures, entraînant notamment d'importantes difficultés à marcher. Si un rapport médical établi le 20 janvier 2016 par un médecin tunisien spécialiste en neurologie indiquait qu'un " diagnostic précis et éventuellement une prise en charge thérapeutique " ne pouvaient être réalisés en Tunisie, il ressort toutefois des autres pièces médicales du dossier, et notamment du certificat médical établi le 13 septembre 2019 par un chef de clinique du service de pédiatrie du centre hospitalier universitaire (CHU) de Saint-Etienne et destiné à la maison départementale des personnes handicapées (MDPH), du document de sortie d'hospitalisation au CHU de Saint-Etienne et de la prescription établie à cette occasion le 22 octobre 2019, que l'état de santé de l'intéressé ne nécessite aucun traitement particulier, à l'exception de séances d'ergothérapie, d'orthophonie et de kinésithérapie et d'un suivi médical spécialisé. Il ne ressort nullement des pièces du dossier que de tels suivis ne pourraient être assurés en Tunisie. Il en est de même des équipements, notamment du fauteuil roulant, dont il a besoin. Dès lors, le rapport médical établi le 4 janvier 2020 par un médecin généraliste tunisien, indiquant qu'un diagnostic étiologique par étude génétique et un traitement " fonctionnel et étiologique adapté " sont nécessaires et ne sont pas disponibles en Tunisie, sans autres précisions sur la nature de ce traitement, ne saurait suffire à établir que, contrairement à ce qu'a estimé le préfet de la Loire, l'état de santé de M. G... A... F... nécessite un traitement dont il ne pourrait effectivement bénéficier en Tunisie. Par suite, Mme A... F... n'est pas fondée à soutenir qu'en rejetant sa demande de délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, le préfet de la Loire a méconnu l'article L. 311-12 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
5. Ainsi qu'il a été dit au point 3 du présent arrêt, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de M. G... A... F... nécessite un traitement dont il ne pourrait effectivement bénéficier en Tunisie. Par ailleurs, l'attestation décrivant les conditions de scolarisation de cet enfant en classe de sixième en Tunisie, établie le 12 avril 2019, ne permet pas d'établir qu'il ne pourrait avoir accès dans ce pays à un établissement spécialisé ou à un matériel et à une assistance adaptés lui permettant de se rendre dans son établissement scolaire et d'y suivre sa scolarité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Comme indiqué ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme A... F... n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de ce refus de titre doit être écarté.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
8. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... B... épouse A... F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... épouse A... F... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 9 février 2021, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme D... E..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mars 2021.
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N° 20LY00203