Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... G... C... D... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2019 par lequel le préfet de la Côte d'Or l'a assigné à résidence pour une durée de six mois.
Par un jugement n° 1903328 du 28 novembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire enregistrés les 11 mars 2020 et 5 mars 2021, M. C... D..., représenté par Me A..., avocat, demande à la cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon du 28 novembre 2019 ;
3°) d'annuler l'arrêté susmentionné pour excès de pouvoir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 300 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, ou subsidiairement, de mettre cette somme à la charge de l'Etat à son profit, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, en cas de rejet de sa demande d'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le préfet devait procéder à l'examen de sa situation personnelle ;
- il devait motiver sa décision ;
- il devait justifier de la compétence de l'auteur de la décision ;
- il devait l'informer qu'il envisageait de prendre cette décision d'assignation à résidence ;
- cette décision est fondée sur une obligation de quitter le territoire français qui n'a pas été valablement notifiée et qui ne pouvait légalement intervenir alors que l'examen de la demande d'asile présentée par sa fille était en cours ;
- les obligations prescrites sont disproportionnées ;
- son éloignement ne constitue pas une perspective raisonnable.
Par des mémoires enregistrés les 13 janvier et 5 mars 2021, le préfet de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.
Après avoir informé la cour qu'il a délivré à l'intéressé une carte de séjour pluriannuelle valable du 21 décembre 2020 au 20 décembre 2024, il soutient que :
- la décision litigieuse a été prise par une autorité compétente ;
- elle est suffisamment motivée et il a été procédé à un examen de la situation particulière de l'intéressé ;
- cette décision est justifiée et proportionnée ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant.
M. C... D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 août 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
-Le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;
-Les observations de Maître A..., représentant M.C... D...
Considérant ce qui suit :
1. M. C... D..., ressortissant centrafricain, né le 28 août 1991, a déclaré être entré en France le 31 janvier 2015. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 9 mars 2017. Ce refus a été confirmé par la Cour nationale du droit d'asile, le 2 juillet 2019. Le 6 août 2019, le préfet de la Côte-d'Or a pris à son encontre des décisions portant refus de titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi que l'intéressé n'a pas contestées. A la suite de l'interpellation de M. C... D..., par les services de police de Dijon, suite à un contrôle routier, le 21 novembre 2019, le préfet de la Côte-d'Or l'a assigné à résidence pour une durée de six mois. M. C... D... relève appel du jugement du 28 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision du 21 novembre 2019.
2. Aux termes de l'article L. 5611 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, l'autorité administrative peut, jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, l'autoriser à se maintenir provisoirement sur le territoire français en l'assignant à résidence, dans les cas suivants : 1° Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai ou si le délai de départ volontaire qui lui a été accordé est expiré (...). La décision d'assignation à résidence est motivée. Elle peut être prise pour une durée maximale de six mois, renouvelable une fois dans la même limite de durée, par une décision également motivée. ".
3. Il ressort des pièces du dossier et, notamment, des termes mêmes de la décision litigieuse du 21 novembre 2019, que, pour prononcer à l'encontre de M. C... D..., sur le fondement de l'article L. 5611 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une assignation à résidence d'une durée de six mois, le préfet de la Côte-d'Or a relevé que la fille de l'intéressé, née le 12 mai 2019, de nationalité centrafricaine, a sollicité le statut de réfugié et qu'il est dans l'attente de la décision de l'office français de protection des réfugiés et des apatrides concernant cette demande d'asile. Il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment d'un courrier du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 7 janvier 2020, que la fille de M. C... D... a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire. Eu égard au caractère recognitif de cette décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, le préfet ne pouvait légalement estimer qu'à la date à laquelle il a pris la décision d'assigner à résidence l'intéressé pour une durée de six mois, il existait une perspective raisonnable d'exécution de la mesure d'éloignement qu'il lui avait opposée. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, M. C... D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
4. M. C... D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me A..., avocate de M. C... D..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au profit de cette avocate au titre des frais liés au litige.
DECIDE :
Article 1er : L'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 21 novembre 2019 et le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon du 28 novembre 2019 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Me A... au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 7611 du code de justice administrative, sous réserve que Me A... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C... D..., à Me A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Dijon en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2021 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme E..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er avril 2021.
2
N° 20LY01034
ar