Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Le préfet de Saône-et-Loire a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les délibérations nos 2019-002, 2019-003 et 2019-004 du 25 janvier 2019 du conseil d'administration de la régie Maison du Charolais.
Par un jugement n° 1901654 du 7 octobre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 13 novembre 2019, le préfet de Saône-et-Loire demande à la cour d'annuler le jugement susmentionné n° 1901654 du 7 octobre 2019 du tribunal administratif de Dijon.
Il soutient que :
- la Maison du Charolais n'est pas compétente pour déléguer la gestion du restaurant dès lors qu'elle s'est vue confier la responsabilité de la gestion de ce restaurant et non le choix du mode de gestion de celui-ci, dont le changement relève du conseil départemental ;
- la circonstance que la Maison du Charolais ait une seule ou plusieurs activités ne modifie pas les règles de gestion des services publics ;
- les dispositions de l'article L. 1210-1 du code de la commande publique ont uniquement pour conséquence de la soumettre à l'application du code de la commande publique mais ne lui permet pas pour autant de conclure une délégation de service public si elle ne respecte pas les conditions propres à une telle procédure, dont l'exercice de la responsabilité de la gestion directe d'un service public ;
- le code général des collectivités territoriales ne prévoit pas d'application aux régies dotées de la personnalité morale des dispositions relatives aux concessions ;
- la nature d'une régie fait dès lors obstacle à ce qu'elle décide d'avoir recours à une délégation de service public (qui serait en l'espèce une subdélégation) dans la mesure où elle n'est pas considérée comme responsable du service public en question.
Par un mémoire en défense enregistré le 3 avril 2020, la régie de La Maison du Charolais, représentée par Me Poujade, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par le préfet ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rivière ;
- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 21 juin 2012, le conseil général de Saône-et Loire a approuvé le principe de la gestion dans le cadre d'une délégation de service public du restaurant " La Table " ouvert au sein de La Maison du Charolais sise à Charolles et constituée sous forme de régie personnalisée. Par une nouvelle délibération du 20 décembre 2012, l'assemblée a confié cette délégation de service public par affermage à M. B... A..., auquel s'est substituée la SARL CharolNa. Avant l'issue au 31 décembre 2019 de la délégation de service public en cours confiée à la société CharolNa, le conseil d'administration de la régie personnalisée Maison du Charolais a, par trois délibérations du 25 janvier 2019, créé une commission de délégation de service public, une commission consultative des services publics locaux et, après avoir pris acte de la note de cadrage relative à la mise en place de la délégation de service public, a saisi pour avis la commission consultative des services publics locaux et le comité technique paritaire. Le préfet de Saône-et-Loire a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler ces trois dernières délibérations. Par un jugement n° 1901654 du 7 octobre 2019, dont ledit préfet relève appel, ce tribunal a rejeté sa demande.
2. Aux termes l'article L. 2221-1 du code général des collectivités territoriales : " Les communes et les syndicats de communes peuvent exploiter directement des services d'intérêt public à caractère industriel ou commercial. Sont considérées comme industrielles ou commerciales les exploitations susceptibles d'être gérées par des entreprises privées, soit par application de la loi des 2-17 mars 1791, soit, en ce qui concerne l'exploitation des services publics communaux, en vertu des contrats de concession ou d'affermage. ". Aux termes de l'article L. 2221-2 du même code : " Les communes et les syndicats de communes peuvent exploiter directement des services d'intérêt public à caractère administratif pour lesquels un statut d'établissement public spécifique n'est pas imposé. ". Aux termes de l'article L. 2221-10 du code général des collectivités territoriales, rendu applicable aux départements par les articles L. 1412-1 et L. 1412-2 du même code : " Les régies dotées de la personnalité morale et de l'autonomie financière, dénommées établissement public local, sont créées, et leur organisation administrative et financière déterminée, par délibération du conseil municipal. Elles sont administrées par un conseil d'administration et un directeur désignés dans les mêmes conditions sur proposition du maire. / Un décret en Conseil d'Etat détermine, en tant que de besoin, les modalités d'application du présent article ainsi que les modalités particulières applicables aux régies créées pour l'exploitation de services d'intérêt public à caractère administratif. ". Aux termes de l'article R. 2221-18 du même code : " Le conseil d'administration délibère sur toutes les questions intéressant le fonctionnement de la régie. ". Aux termes de l'article R. 2221-23 du même code : La passation des contrats donne lieu à un compte rendu spécial au conseil d'administration dès sa plus prochaine réunion, à l'exception de ceux dont le montant est inférieur à une somme fixée par le conseil. ". Aux termes de l'article R. 2221-24 du même code : " Les marchés de travaux, transports et fournitures sont soumis aux règles applicables aux marchés de la commune. ". Aux termes de l'article L. 1411-1 du même code : " Les collectivités territoriales, leurs groupements ou leurs établissements publics peuvent confier la gestion d'un service public dont elles ont la responsabilité à un ou plusieurs opérateurs économiques par une convention de délégation de service public définie à l'article L. 1121-3 du code de la commande publique préparée, passée et exécutée conformément à la troisième partie de ce code ". Aux termes de l'article L. 1411-10 du même code : " Les dispositions des articles L. 1411-1 à L. 1411-9 et L. 1411-11 s'appliquent aux groupements des collectivités territoriales et aux autres établissements publics de ces collectivités. " et aux termes de l'article L. 1411-1 de ce code : " Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service. ". Aux termes de l'article L. 1412-1 du même code : " Les collectivités territoriales, leurs établissements publics, les établissements publics de coopération intercommunale ou les syndicats mixtes, pour l'exploitation directe d'un service public industriel et commercial relevant de leur compétence, constituent une régie soumise aux dispositions du chapitre Ier du titre II du livre II de la deuxième partie, le cas échéant, après avoir recueilli l'avis de la commission consultative des services publics locaux prévue à l'article L. 1413-1. ". Aux termes de l'article L. 1412-2 du même code : " Les collectivités territoriales, leurs établissements publics, les établissements publics de coopération intercommunale ou les syndicats mixtes peuvent individualiser la gestion d'un service public administratif relevant de leur compétence par la création d'une régie soumise aux dispositions du chapitre Ier du titre II du livre II de la deuxième partie, le cas échéant, après avoir recueilli l'avis de la commission consultative des services publics locaux prévue à l'article L. 1413-1. Sont toutefois exclus les services qui, par leur nature ou par la loi, ne peuvent être assurés que par la collectivité locale elle-même. ".
3. Il résulte des dispositions précitées que lorsqu'elles sont responsables d'un service public, les collectivités publiques peuvent décider d'en assurer directement la gestion. Elles peuvent, à cette fin, le gérer en simple régie, ou encore, s'il s'agit de collectivités territoriales, dans le cadre d'une régie à laquelle elles ont conféré une autonomie financière et, le cas échéant, une personnalité juridique propre. Lorsqu'elle est dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière, la régie a le statut juridique d'un établissement public local et peut, dans le cadre de la compétence que lui a attribuée sa collectivité de rattachement, conclure des contrats publics et notamment des délégations de service public.
4. En l'espèce, il est constant qu'ainsi que le prévoient les articles 1er et 2 de ses statuts, la Maison du Charolais est constituée sous forme de régie dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière, qui a pour objet la gestion, l'exploitation et la promotion de la Maison du Charolais, qui est un équipement, propriété du département de Saône-et-Loire mis à disposition de cette régie, au service de la promotion et de la valorisation de l'élevage et de la viande charolaise produite sur son territoire d'origine. Une délibération du 21 décembre 2018 du conseil départemental de Saône-et-Loire a attribué à cette régie au nombre de ses compétences l'activité de restauration afin qu'elle puisse piloter directement l'exploitation du restaurant " La Table " mentionné au point 1. Il résulte des articles 16 et 24 de ses statuts que pour le choix du délégataire du restaurant, la régie de la Maison du Charolais constitue une commission de délégation de service public dans les conditions de l'article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales et qu'elle peut passer des contrats conformément aux règles applicables aux contrats publics. Ainsi, et alors que l'activité de restauration ne constitue pas son objet statutaire exclusif, eu égard à ses compétences générales de promotion d'une activité et d'un produit, la régie de La Maison du Charolais pouvait légalement, par les délibérations contestées, décider d'engager une procédure de délégation de service public pour l'exploitation du restaurant précité compte tenu de l'arrivée à échéance au 31 décembre 2019 de la précédente délégation initialement conclue entre le département de Saône-et-Loire et la société CharolNa.
5. Il résulte de ce qui précède que le préfet de Saône-et-Loire n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par La régie de la Maison du Charolais.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de Saône-et-Loire est rejetée.
Article 2 : Les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par La régie de la Maison du Charolais sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à La régie de la Maison du Charolais.
Copie sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 18 novembre 2021, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, présidente-assesseure,
M. Rivière, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 décembre 2021.
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N° 19LY04109