Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 6 septembre 2016 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Roanne l'a licencié de ses fonctions de responsable transport logistique ; de condamner le centre hospitalier de Roanne à lui verser la somme de 56 956,06 euros en réparation des préjudices qu'il estimait avoir subis à raison de ce licenciement illégal ; de mettre à la charge du centre hospitalier de Roanne la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative .
Par un jugement n° 1607963 du 7 novembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a donné acte du désistement d'instance des conclusions à fin d'annulation de la requête de M. B... (article 1er), a décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'indemnisation à hauteur de 5 804 euros (article 2 ), a condamné le centre hospitalier de Roanne à verser à M. B... la somme de 3 000 euros (article 3) et a mis à la charge du centre hospitalier de Roanne la somme de 1 200 euros, à verser à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative .
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 7 janvier 2019, le centre hospitalier de Roanne, représenté par Me Chanlair (MPC Avocats), demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement, en ce qu'il l'a condamné à verser à M. B... la somme de 3 000 euros en réparation de ses préjudices et la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal aurait dû prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la décision ayant prononcé son licenciement ;
- le tribunal aurait dû prononcer un non-lieu total sur les conclusions indemnitaires du requérant ;
- l'illégalité ayant affecté la décision prononçant le licenciement de M. B... ne pouvait conduire le tribunal à lui accorder une indemnisation ; en effet, le licenciement de M. B... était fondé, eu égard à son insuffisance professionnelle, si bien qu'il n'a droit à aucune indemnisation ;
- le préjudice moral, pour lequel les premiers juges ont accordé une indemnité de 3 000 euros, n'est pas justifié ;
- la condamnation au versement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative n'était pas justifiée ; il a exposé des frais à l'occasion de la présente instance et sollicite à ce titre le versement par M. B... C... la somme de 4 000 euros.
Par ordonnance du 12 janvier 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 février 2021.
Vu le jugement attaqué et les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- le décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Tallec, président,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me Henriot, avocat, représentant le centre hospitalier de Roanne.
Considérant ce qui suit :
1. Alors étudiant en master 2 " transport, logistique et commerce international ", M. A... B... a effectué son stage d'application en entreprise au sein du centre hospitalier de Roanne du 9 mars 2015 au 4 septembre 2015. A l'issue de ce stage, il a été recruté par l'établissement en qualité de " responsable transport-logistique ", par contrat à durée indéterminée daté du 12 novembre 2015, à compter du 16 novembre 2015. Il a été licencié par décision du 6 septembre 2016, avec effet au 16 septembre 2016. Par une requête enregistrée le 4 novembre 2016, M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation de cette décision, sa réintégration au sein de l'établissement et la condamnation de ce dernier à lui verser la somme de 56 956,09 euros en réparation des divers préjudices qu'il estimait avoir subis du fait de l'illégalité affectant selon lui son licenciement. Par décision du 25 novembre 2016, le directeur du centre hospitalier de Roanne a prononcé le retrait de cette décision, la réintégration de l'intéressé au sein de l'établissement et la régularisation de sa situation à compter du 15 septembre 2016. Par jugement n° 1607963 du 7 novembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a donné acte à M. B... du désistement de ses conclusions à fin d'annulation, prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions indemnitaires à hauteur de 5 804 euros, condamné le centre hospitalier de Roanne à verser à M. B... la somme de 3 000 euros et mis à la charge de l'établissement la somme de 1 200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Le centre hospitalier de Roanne relève appel de ce jugement.
Sur le désistement des conclusions à fin d'annulation prononcé par les premiers juges :
2. Aux termes de l'article R.612-5 du code de justice administrative : " Lorsque l'état du dossier permet de s'interroger sur l'intérêt que la requête conserve pour son auteur, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, le président de la chambre chargée de l'instruction, peut inviter le requérant à confirmer expressément le maintien de ses conclusions. La demande qui lui est adressée mentionne que, à défaut de réception de cette confirmation à l'expiration du délai fixé, qui ne peut être inférieur à un mois, il sera réputé s'être désisté de l'ensemble de ses conclusions.
3. Par courrier du 28 avril 2017, le président de la formation de jugement du tribunal administratif a demandé au conseil de M. B... de produire, dans un délai de 30 jours, soit un mémoire, soit une lettre indiquant qu'il maintenait les conclusions de sa requête, soit une lettre de désistement pur et simple, en lui précisant qu'en application des dispositions citées au point précédent, il serait réputé s'être désisté de l'ensemble de ses conclusions, à défaut de la confirmation du maintien de celles-ci dans le délai ainsi imparti. Par mémoire complémentaire enregistré le 9 mai 2017, M. B... a précisé qu'il maintenait ses conclusions indemnitaires et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par suite, c'est à bon droit qu'en application des dispositions précitées de l'article R. 612-5-1 du même code, les premiers juges ont considéré que M. B... s'était désisté de ses seules conclusions à fin d'annulation, dirigées contre la décision du 6 septembre 2016 portant licenciement, retirée par celle du 25 novembre 2016, et en ont donné acte au requérant.
Sur l'étendue du non-lieu prononcé concernant les conclusions indemnitaires :
4. Le centre hospitalier de Roanne fait valoir que les premiers juges auraient dû prononcer un non-lieu total sur les conclusions indemnitaires de M. B..., en raison du retrait de la décision de licenciement, suivie de la réintégration effective de l'intéressé au sein de l'établissement et de la régularisation de sa situation à la date d'effet de la mesure attaquée. Toutefois, la nouvelle décision n'a pu avoir pour effet de faire disparaitre l'ensemble des conclusions indemnitaires du requérant, qui sollicitait le versement d'une indemnité de licenciement et la réparation du préjudice de carrière et du préjudice moral qu'il estimait avoir subis du fait de l'illégalité du licenciement dont il avait fait l'objet. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont prononcé un non-lieu à statuer à hauteur de la somme de 5 804 euros, correspondant au versement par l'administration, avec la paie de décembre 2016, de la rémunération dont M. B... avait été privé durant sa période d'éviction du service.
Sur la responsabilité du centre hospitalier de Roanne :
5. Il résulte de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas contesté par l'administration, que la décision portant licenciement de M. B... ne pouvait être regardée comme un licenciement intervenu pendant la période d'essai de l'intéressé. En application des dispositions de l'article 41-3 du décret du 6 février 1991 susvisé : " Sans préjudice des dispositions relatives au licenciement pour faute disciplinaire, pour insuffisance professionnelle ou pour inaptitude physique, le licenciement d'un agent contractuel recruté pour répondre à un besoin permanent doit être justifié par l'un des motifs suivants : 1° La suppression du besoin ou de l'emploi qui a justifié le recrutement de l'agent ; 2° La transformation du besoin ou de l'emploi qui a justifié le recrutement, lorsque l'adaptation de l'agent au nouveau besoin n'est pas possible ; 3° Le recrutement d'un fonctionnaire lorsqu'il s'agit de pourvoir un emploi [correspondant à un besoin permanent du service] (...) ; 4° Le refus par l'agent d'une modification d'un élément substantiel du contrat (...) ; 5° L'impossibilité de réemploi de l'agent (...) à l'issue d'un congé sans rémunération ".
6. Pour considérer que le centre hospitalier de Roanne avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de M. B..., les premiers juges ont relevé que la décision de licenciement dont il avait fait l'objet le 6 septembre 2016, qui était formellement dépourvue de tout motif, avait été prononcée pour un motif étranger à ceux prévus par les dispositions citées au point précédent.
7. Devant la cour, le centre hospitalier de Roanne soutient, pour la première fois, que le licenciement était justifié par l'insuffisance professionnelle de l'intéressé. Il fait en particulier valoir que M. B... aurait fait preuve d'une inefficacité totale dans l'élaboration et la mise en œuvre du projet logistique qui lui avait été confiées et qu'il aurait connu de graves problèmes dans le management de ses subordonnés. Toutefois, même si le supérieur hiérarchique de M. B... a pu, antérieurement à son licenciement, émettre des critiques sur la qualité du travail de l'intéressé, il n'est pas contesté que ce dernier a été le principal rédacteur du document finalisé, titré " Restructuration du Service Transport et Logistique au CHRO " présenté au CTE. En outre, aucune pièce ne permet d'établir l'existence de difficultés à l'intérieur du service imputable au comportement de M. B.... Enfin, l'administration ne saurait se borner à justifier la réintégration de M. B... au sein de l'établissement à compter du 16 décembre 2016 par sa bienveillance à l'égard de l'intéressé, et la volonté de lui donner " une nouvelle chance " et ne saurait se prévaloir des difficultés rencontrées par celui-ci dans l'exercice des fonctions de " responsable transport logistique et transport patients " qui lui ont été confiées à compter de mai 2017, soit postérieurement au licenciement litigieux. Dans ces conditions, les pièces produites par le centre hospitalier de Roanne ne peuvent suffire à caractériser l'insuffisance professionnelle alléguée. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que l'établissement avait, en prononçant illégalement le licenciement de M. B..., commis une faute de nature à engager sa responsabilité pour l'indemnisation des préjudices présentant un caractère direct et certain.
Sur l'indemnisation du préjudice subi par M. B... :
8. Le centre hospitalier de Roanne soutient que M. B... n'a subi aucun préjudice moral du fait de son licenciement, au motif que par sa décision du 25 novembre 2016, le directeur du centre hospitalier de Roanne a prononcé le retrait de la décision du 6 septembre 2016, la réintégration de l'intéressé au sein de l'établissement et la régularisation de sa situation à compter du 15 septembre 2016. Toutefois, il est constant que M. B... s'est trouvé dans une situation particulièrement délicate pendant plus de deux mois, en étant privé de tout revenu et en n'ayant reçu aucune information sur les griefs qui lui étaient reprochés, et qu'il a ainsi subi un préjudice direct et certain à raison du comportement de l'administration. Le montant de l'indemnité de 3 000 euros accordée à ce titre par les premiers juges n'apparait pas, dans les circonstances de l'espèce, excessif.
Sur les frais liés au litige :
9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
10. Les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par le centre hospitalier de Roanne à l'occasion de celle-ci.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du centre hospitalier de Roanne est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Roanne et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 11 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition du greffe le 26 janvier 2022.
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N° 19LY00037