Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SARL DMV a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 décembre 2012 et le 31 décembre 2013 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er juin 2011 au 30 juin 2014.
Par un jugement n° 1807877 du 29 mai 2020, le tribunal administratif de Lyon a déchargé la SARL DMV de la totalité des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 décembre 2012 et le 31 décembre 2013 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er juin 2011 au 30 juin 2014 à hauteur de 68 378 euros, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 6 août 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :
1°) d'annuler les articles 1 et 2 de ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 mai 2020 ;
2°) de remettre à la charge de la SARL DMV les sommes déchargées en première instance au titre de l'impôt sur les sociétés, portant sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, soit, 82 885 euros pour les droits et 73 351 euros pour les pénalités ;
3°) de remettre à la charge de la société les sommes déchargées en première instance au titre de la taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 1er juin 2011 au 30 juin 2014 soit 68 378 euros pour les droits, 7 053 euros pour les intérêts de retard et 53 925 euros pour les majorations pour manœuvres frauduleuses.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a considéré que l'administration s'était soustraite à l'obligation de communication prévue à l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;
- la commission départementale des impôts directs et taxes sur le chiffre d'affaires a été régulièrement constituée et a émis un avis définitif et suffisamment motivé, en conséquence de quoi la procédure d'imposition est régulière ;
- une éventuelle irrégularité ou vice dans la décision de rejet de l'administration demeure sans incidence sur la régularité de la procédure de contrôle et sur le bien-fondé des impositions contestées ;
- les rehaussements d'impositions à la taxe sur la valeur ajoutée et à l'impôt sur les sociétés ont été régulièrement établis et le contribuable, sur lequel pesait la charge de la preuve, n'a pas apporté la preuve de l'exagération de ces impositions.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 octobre 2020, la SARL DMV, représentée par Me Feschet, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de ses frais d'instance non compris dans les dépens.
Elle soutient que :
- l'administration n'a pas communiqué les documents obtenus de tiers alors que le contribuable en a fait la demande et qu'elle ne démontre pas que le volume empêcherait d'en transmettre copie ;
- subsidiairement, l'avis de la commission départementale des impôts directs émis le 30 mai 2017 et notifié le 23 juin 2017 est un avis non définitif dont les termes renvoyaient à un second avis ;
- ainsi, l'administration ne pouvait mettre en recouvrement les impositions litigieuses ;
- la charge de la preuve incombe à l'administration qui n'établit pas le bien-fondé des impositions en litige.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure,
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. La SARL DMV, qui exerce une activité de travaux de revêtement des sols et des murs, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er juin 2011 au 30 juin 2014, à l'issue de laquelle, par une proposition de rectification du 16 octobre 2015, l'administration lui a notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos le 31 décembre 2012 et le 31 décembre 2013, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er juin 2011 au 30 juin 2014, ainsi que des pénalités correspondant à ces impositions. Par un jugement du 29 mai 2020, le tribunal administratif de Lyon a déchargé la SARL DMV de la totalité de ces impositions et pénalités. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".
3. L'administration ne peut en principe fonder le redressement des bases d'imposition d'un contribuable sur des renseignements ou documents qu'elle a obtenus de tiers sans l'avoir informé, avant la mise en recouvrement, de l'origine et de la teneur de ces renseignements. Cette obligation d'information ne se limite pas aux renseignements et documents obtenus de tiers par l'exercice du droit de communication. Lorsque le contribuable le demande, la copie de ces documents doit lui être transmise, sauf si leur nature ou leur volume impose une communication sous forme de consultation dans les locaux du service. Il en va ainsi, sauf dans le cas d'informations librement accessibles au public, alors même que le contribuable a pu avoir connaissance de ces documents ou de certains d'entre eux, afin notamment de lui permettre d'en vérifier, et le cas échéant d'en discuter, l'authenticité, la teneur et la portée.
4. Il résulte de l'instruction que la SARL DMV a demandé le 3 juillet 2017, la communication de toutes les pièces obtenues par l'administration dans le cadre de l'exercice de son droit de communication sur lesquels elle s'était fondée pour procéder aux rehaussements litigieux. L'administration lui a répondu, par lettre du 21 septembre 2017, qu'eu égard au caractère particulièrement volumineux des documents en cause, il lui était proposé de venir les consulter et de prendre les copies utiles dans ses locaux à Bourg-en-Bresse. La SARL DMV fait valoir sans être utilement contredite que, contrairement à ce que prétend l'administration, les pièces qui devaient lui être communiquées ne représentaient pas un volume de 741 pages, comme elle le prétend, mais de 381 pages utiles, en enlevant de ce décompte toutes les demandes et courriers établis par le service et qu'il n'est ainsi établi aucune impossibilité de lui adresser l'ensemble de ces documents que ce soit sous format papier ou sous format dématérialisé. Ainsi, il résulte de l'instruction que la nature et le volume des pièces concernées justifiaient qu'elles puissent faire l'objet d'une communication et l'administration ne pouvait, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L 76 B du livre des procédures fiscales se borner à proposer à la requérante une simple consultation de ces documents dans ses locaux, même en indiquant qu'elle avait la possibilité de les copier. Par suite, le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que pour prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige, le tribunal administratif de Lyon a estimé qu'en refusant d'adresser à la SARL DMV la copie des documents qu'elle avait demandée, l'administration a entaché d'irrégularité la procédure d'imposition.
5. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a déchargé la SARL DMV de la totalité des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 décembre 2012 et le 31 décembre 2013 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er juin 2011 au 30 juin 2014 à hauteur de 68 378 euros et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, une somme de 2 000 euros à verser à la SARL DMV au titre des frais exposés en appel par cette dernière et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à la SARL DMV sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL DMV et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 10 mars 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Dèche, présidente,
Mme Le Frapper, première conseillère,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mars 2022.
La rapporteure,
P. DècheL'assesseure la plus ancienne,
M. Le Frapper
La greffière,
C. Langlet
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY02209
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