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15/06/2022 | FRANCE | N°21LY01522

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 15 juin 2022, 21LY01522


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 12 juin 2020 par lesquelles le préfet de l'Yonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2002070 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistr

ée le 11 mai 2021 et un mémoire enregistré le 14 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Four...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 12 juin 2020 par lesquelles le préfet de l'Yonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2002070 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 mai 2021 et un mémoire enregistré le 14 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Fourcaut, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 avril 2021 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Yonne du 12 juin 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale ", ou, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de délivrer un titre de séjour, au titre du regroupement familial, à son épouse et à ses deux enfants, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet de l'Yonne a commis une erreur de fait, en ne tenant pas compte du contrat de travail signé le 11 juin 2020 ;

- son arrêté porte atteinte à sa vie privée et familiale ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 novembre 2021, le préfet de l'Yonne, représenté par Me Cano (SELARL Centaure avocats), avocat, conclut au rejet de la requête.

Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 30 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère,

- et les observations de Me d'Ovidio, avocate, pour le préfet de l'Yonne ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... relève appel du jugement du 8 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Yonne du 12 juin 2020 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

2. En premier lieu, il est constant que M. B... a sollicité le renouvellement du titre de séjour dont il bénéficiait en se prévalant du contrat de travail signé avec la société E... le 1er octobre 2019, sans avoir nullement porté à la connaissance du préfet le nouveau contrat de travail signé la veille de l'adoption de l'arrêté litigieux avec la société D.... Par suite, il n'est pas fondé à reprocher au préfet de l'Yonne, qui a correctement examiné sa demande, d'avoir commis une erreur de fait en s'abstenant de mentionner ce dernier contrat.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".

4. S'il est constant que M. B..., ressortissant tunisien né le 16 août 1982, est entré, pour la première fois, sur le territoire français le 16 juillet 2000, il a toutefois fait l'objet d'une mesure d'éloignement forcé au mois de septembre 2009. En outre, à l'exception des formations suivies et d'une activité professionnelle à compter de 2016, il ne peut s'y prévaloir d'aucune intégration particulière. Par ailleurs, à l'exception de sa mère, dont il a longtemps vécu séparé, et de son frère, il n'y disposait, à la date de la décision en litige, d'aucune attache familiale, son père étant décédé et son épouse, également de nationalité tunisienne, ainsi que leurs deux enfants, ne l'y ayant pas encore rejoint. Si le regroupement familial avait alors été accordé à ces derniers, M. B... ne fait néanmoins valoir aucune circonstance qui ferait obstacle à ce que leur vie privée et familiale se poursuive dans leur pays d'origine. Dans ces circonstances, et à supposer même la continuité de son séjour en France établie, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de l'Yonne a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. A supposer qu'il ait entendu s'en prévaloir, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ".

6. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 précité n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien, au sens de l'article 11 de cet accord.

7. Toutefois, si l'accord franco-tunisien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

8. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a bénéficié, du 10 août 2018 au 9 août 2019, d'une carte de séjour temporaire en qualité de salarié, au titre de l'admission exceptionnelle au séjour. Comme indiqué au point 2 du présent arrêt, il en a sollicité le renouvellement en se prévalant du contrat de travail signé avec la société " C... " le 1er octobre 2019. Toutefois, et ainsi qu'il ressort du refus d'autorisation de travail en date du 13 mars 2020, le poste de calorifugeur pour lequel il a ainsi été recruté ne présente aucune spécificité et ne connaît pas de difficultés particulières de recrutement. S'il a, la veille de l'arrêté litigieux, signé un contrat de travail similaire à celui qui avait précédemment justifié qu'un titre de séjour lui soit délivré, cette circonstance ne saurait suffire à établir que le préfet de l'Yonne a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, en refusant de lui renouveler son titre de séjour portant la mention " salarié " et, compte tenu de ce qui a été indiqué au point 4, en s'abstenant de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

10. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2022.

La rapporteure,

Sophie CorvellecLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY01522


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01522
Date de la décision : 15/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : FOURCAUT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-06-15;21ly01522 ?
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