Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 1er mars 2021 par lequel le préfet de la Haute-Savoie lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et l'a interdite de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
Par jugement n° 2101839 du 28 avril 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal a annulé l'interdiction de retour sur le territoire français et a rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 28 mai 2021, le préfet de la Haute-Savoie demande à la cour d'annuler ce jugement en tant qu'il a annulé l'interdiction de retour sur le territoire français opposée à Mme A... et de rejeter la demande d'annulation de cette décision présentée au tribunal par Mme A....
Il soutient que c'est à tort que le tribunal a retenu la présence sur le territoire d'une des sœurs de Mme A... comme faisant obstacle au prononcé d'une interdiction de retour, les critères énumérés par le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'étant pas cumulatifs.
La requête a été communiquée à Mme A... qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Le rapport de Mme Burnichon, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante albanaise née en 1987, est entrée irrégulièrement le 13 février 2020 sur le territoire français pour y déposer une demande d'asile. Suite au rejet de sa demande par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 16 décembre 2020, le préfet de la Haute-Savoie a prononcé à son encontre, par arrêté du 1er mars 2021 et sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, une obligation de quitter le territoire sous trente jours assortie d'une interdiction de retour d'une durée d'un an. Le préfet de la Haute-Savoie relève appel du jugement du 28 avril 2021 de la magistrate désignée du tribunal administratif de Grenoble, en tant qu'il annule l'interdiction de retour.
2. Aux termes des dispositions alors codifiées au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
3. Mme A... ayant disposé d'un délai de départ volontaire, le préfet avait la simple faculté d'assortir l'éloignement du territoire d'une interdiction de retour. Si, en vertu des dispositions précitées, une telle mesure n'est pas soumise à la réunion cumulative des critères de l'absence d'ancienneté de la présence sur le territoire, de l'absence de liens personnels en France, de l'antériorité d'un éloignement du territoire et de risques d'atteinte à l'ordre public, le bilan de la situation personnelle de l'intéressée, au regard de ces critères combinés, doit néanmoins faire ressortir l'intérêt qui s'attache à ce que cette décision soit prononcée.
4. Or, il ressort des pièces du dossier que Mme A... n'a pas fait l'objet d'une mesure d'éloignement antérieure, qu'elle ne représente pas de menace d'atteinte à l'ordre public et que sa sœur séjourne régulièrement en France. A cet égard, les attaches familiales de l'intéressée en Albanie et en France ne doivent pas être envisagées de la même manière que pour le droit au séjour. Si la présence d'un membre de famille, quoique proche, en France ne saurait justifier son maintien sur le territoire, il n'en demeure pas moins qu'elle ne pourra lui rendre visite pendant la durée de l'interdiction de retour qui ne se justifie pas au regard des deux premiers critères.
5. Il suit de là que le préfet de la Haute-Savoie n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que la magistrate désignée a annulé l'interdiction de retour opposée à Mme A... au motif que la situation de celle-ci ne répondait à trois des quatre critères pas envisagés par les dispositions citées au point 2 et que la présente requête doit être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de la Haute-Savoie est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.
Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 août 2022.
La rapporteure,
C. BurnichonLe président,
Ph. Arbarétaz
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 21LY01689 2
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