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13/10/2022 | FRANCE | N°22LY00091

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 13 octobre 2022, 22LY00091


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société civile immobilière (SCI) Les Brosses a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge ou subsidiairement la réduction de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive auxquelles elle a été assujettie.

Par un jugement n° 1806277 du 29 avril 2021, le tribunal administratif de Grenoble a réduit la base de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive mise à la charge de la SCI Les Brosses du montant correspondant aux 29 p

laces de stationnement extérieures (article 1er), a déchargé cette société des montan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société civile immobilière (SCI) Les Brosses a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge ou subsidiairement la réduction de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive auxquelles elle a été assujettie.

Par un jugement n° 1806277 du 29 avril 2021, le tribunal administratif de Grenoble a réduit la base de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive mise à la charge de la SCI Les Brosses du montant correspondant aux 29 places de stationnement extérieures (article 1er), a déchargé cette société des montants de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 1er(article 2), a condamné l'Etat à verser à cette société une somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 3) et a rejeté le surplus de la demande (article 4).

Par une ordonnance n° 21LY02137 du 22 juillet 2021, le président de la cour a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré au greffe de cette cour le 29 juin 2021, formé par la SCI Les Brosses contre ce jugement.

Par décision n° 454876 du 10 janvier 2022, le Conseil d'État statuant au contentieux a attribué à la cour le jugement des conclusions présentées par la SCI Les Brosses tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 avril 2021 en tant qu'il se prononce sur la redevance d'archéologie préventive (article 1er) et a refusé l'admission du surplus des conclusions du pourvoi de la société (article 2).

L'affaire dont le jugement a ainsi été attribué à la cour a été enregistrée sous le n° 22LY00091.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 29 juin 2021, la SCI Les Brosses, représentée par Me Blanc, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 avril 2021, en tant qu'il ne pas entièrement droit à sa demande ;

2°) de prononcer la décharge de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive à hauteur de la fraction calculée sur les 2 101 m² de construction qui n'ont pas été réalisés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi qu'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne mentionne pas les bases forfaitaires des impositions ni les conséquences financières de la rectification opérée ;

- la mise en recouvrement des impositions litigieuses porte atteinte au droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et à l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que ces impositions portent sur des constructions qui n'ont pas été réalisées.

Par un mémoire enregistré le 2 septembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il s'en rapporte aux écritures produites par le préfet en première instance.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code du patrimoine ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Le 5 avril 2012, la SCI Les Brosses a obtenu un permis de construire pour une extension d'un atelier de taille de pierres comprenant 3 082,47 m² de locaux industriels et la réalisation de places de stationnement. Par un courrier du 19 juin 2015, le pôle fiscalité de la direction départementale des territoires a informé la SCI Les Brosses que sa déclaration des éléments nécessaires au calcul des impositions jointe à la demande de permis de construire relative aux taxes d'urbanisme était incomplète et lui a demandé de la compléter en y mentionnant les 29 places de stationnement extérieures figurant sur la demande de permis de construire. La SCI a répondu par un courrier daté du 27 juin 2015 que le projet avait été suspendu en raison de la mise en redressement judiciaire de la société locataire le 4 juillet 2013 puis de sa liquidation prononcée le 4 novembre 2013. Par une proposition de rectification du 23 juillet 2015, le pôle fiscalité de la direction départementale des territoires a informé la SCI que la lettre du 19 juin 2015 étant restée sans réponse, l'imposition serait établie sur la base de 3 082 m² de locaux industriels et de 29 places de stationnement extérieures. La SCI n'a pas présenté d'observations en réponse à cette proposition de rectification. Elle a été informée du montant des taxes d'urbanisme, soit 81 629 euros de taxe d'aménagement et 4 504 euros de redevance d'archéologie préventive, par un courrier du 16 septembre 2015. Deux titres de perception d'un montant de 40 814 euros ont été émis les 13 et 21 octobre 2015 pour le recouvrement des deux échéances de la taxe d'aménagement et un titre de perception de 4 504 euros a été émis le 21 octobre 2015 pour le recouvrement de la redevance d'archéologie préventive. Par un jugement du 29 avril 2021, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification en ce qui concerne la seule part des taxes d'urbanisme afférentes aux places de stationnement. En conséquence, par ce jugement, le tribunal a réduit la base de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive mise à la charge de la SCI Les Brosses du montant correspondant aux 29 places de stationnement extérieures (article 1er), a déchargé cette société des montants de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 1er (article 2), a condamné l'Etat à verser à cette société une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 3) et a rejeté le surplus de la demande (article 4). Par décision n° 454876 du 10 janvier 2022, le Conseil d'État statuant au contentieux a attribué à la cour le jugement des conclusions présentées par la SCI Les Brosses tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 avril 2021 en tant qu'il se prononce sur la redevance d'archéologie préventive (article 1er) et a refusé l'admission du surplus des conclusions du pourvoi de la société (article 2).

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 524-8 du code du patrimoine relatif à la redevance d'archéologie préventive : " I. Lorsqu'elle est perçue sur les travaux mentionnés au a de l'article L. 524-2, la redevance est établie dans les conditions prévues aux articles L. 331-19 et L. 331-20 du code de l'urbanisme. Les règles de contrôle et les sanctions sont celles prévues aux articles L. 331-21 à L. 331-23 du même code. (...) ". Aux termes de l'article L. 331-22 du code de l'urbanisme relatif à la taxe d'aménagement : " Lorsqu'une demande d'autorisation de construire a été déposée, la procédure de rectification contradictoire prévue par l'article L. 55 du livre des procédures fiscales peut être mise en œuvre. / Si aucune déclaration n'a été déposée, les bases ou les éléments servant au calcul de la taxe et des sanctions applicables sont portés à la connaissance du redevable trente jours au moins avant la mise en recouvrement ". Aux termes de l'article 55 du livre des procédures fiscales : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 56, lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts ou de l'article L. 2333-55-2 du code général des collectivités territoriales, les rectifications correspondantes sont effectuées suivant la procédure de rectification contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 A. ". Aux termes de l'article L. 57 du même livre : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ".

3. Il résulte de l'instruction que par un courrier du 19 juin 2015, l'administration a, sur le fondement de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, demandé à la SCI Les Brosses, de compléter les éléments de déclaration nécessaires au calcul des impositions litigieuses, joints à la demande de permis de construire qu'elle avait déposée le 26 mars 2012 qui ne mentionnaient qu'une extension de 3 082,47 m² de locaux industriels et de leurs annexes, la ligne " nombre de places de stationnement situées à l'extérieur de la construction " du paragraphe 1.3 de cette déclaration intitulé " autres éléments soumis à la taxe d'aménagement ", n'étant pas renseignée. N'ayant pas obtenu de réponse à ce courrier, l'administration a estimé que la SCI Les Brosses avait omis de déclarer la surface correspondant à 29 places de stationnement et lui a notifié une proposition de rectification mentionnant, au titre des bases d'imposition retenues, d'une part, une surface de 3 082 m² " en locaux industriels et leurs annexes " telle que figurant sur la déclaration effectuée par le pétitionnaire et, d'autre part, une surface correspondant à " 29 places de stationnement situées à l'extérieur de la construction " que le pétitionnaire avait omis de déclarer. En conséquence, la proposition de rectification adressée à la SCI Les Brosses ne portait que sur le chef de redressement relatif aux places de stationnement. Ainsi qu'il a été dit au point 1 du présent arrêt, le tribunal administratif a fait droit au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification sur ce chef de redressement. Par suite, la requérante ne peut utilement se prévaloir, dans la présente instance de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, les autres éléments constitutifs de la base d'imposition n'ayant fait l'objet d'aucune rectification.

4. En second lieu, l'article L. 524-4 du code du patrimoine dispose que : " Le fait générateur de la redevance est : / a) Pour les travaux soumis à autorisation en application du code de l'urbanisme, la délivrance de l'autorisation, la délivrance du permis modificatif (ou) la naissance d'une autorisation tacite (...) " et l'article L. 524-12 du même code énonce que : " Les dégrèvements sont prononcés lorsque les travaux (...) ne sont pas réalisés par le redevable et que l'opération de diagnostic n'a pas été engagée. ". L'article L. 524-15 précise que : " Les réclamations concernant la redevance d'archéologie préventive sont présentées, instruites et jugées dans les conditions prévues aux articles L. 331-30 à L. 331-32 du code de l'urbanisme. ".

5. Aux termes de l'article L. 331-30 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Le redevable de la taxe peut en obtenir la décharge, la réduction ou la restitution totale ou partielle : 1° S'il justifie qu'il n'a pas donné suite à l'autorisation de construire ou d'aménager ; 2° Si, en cas de modification de l'autorisation de construire ou d'aménager, il est redevable d'un montant inférieur au montant initial ; (...) ".

6. En cas d'exécution partielle des travaux projetés, il incombe aux redevables, pour pouvoir, le cas échéant, bénéficier d'une restitution, également partielle, de l'impôt acquitté, d'obtenir une modification de l'autorisation de construire initiale.

7. Il est constant que le permis de construire délivré à la SCI Les Brosses a reçu un commencement d'exécution. Si la requérante soutient que les travaux autorisés portaient sur une surface de construction de 3 082 m² alors que 981 m² de surface ont été réalisés, cette circonstance est sans incidence sur le bien-fondé des impositions litigieuses, dès lors, d'une part, que le fait générateur de la taxe d'aménagement comme de la redevance d'archéologie préventive est constitué par la délivrance de l'autorisation d'urbanisme, et d'autre part, que la requérante n'établit pas avoir obtenu une modification du permis de construire qui lui avait été délivré. Dans ces conditions, la requérante ne peut prétendre à la réduction des sommes restant réclamées par l'administration au titre de la redevance d'archéologie préventive.

8. En dernier lieu, d'une part, la requérante fait valoir qu'en refusant, en application des dispositions précitées, de réduire le montant des taxes litigieuses à hauteur des surfaces effectivement réalisées, l'administration a porté atteinte au droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Toutefois, un tel moyen ne peut être utilement soulevé qu'à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité présentée dans les formes prescrites par l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 et l'article

R. 771-13 du code de justice administrative. Faute d'être soulevé à l'appui d'une telle question présentée par mémoire distinct, ce moyen est irrecevable. D'autre part, la requérante qui garde la possibilité d'obtenir un permis de construire modificatif et de bénéficier en conséquence de la restitution partielle de l'impôt acquitté, n'est pas fondée à se prévaloir de la méconnaissance des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

9. Il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge de la redevance d'archéologie préventive. Par voie de conséquence doivent être rejetées ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Les Brosses est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Les Brosses, à la ministre de la culture et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Copie en sera adressée au directeur départemental des finances publiques de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022.

La rapporteure,

P. Dèche

Le président,

F. Bourrachot,

La greffière,

S. Lassalle

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à la ministre de la culture et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui les concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY00091

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY00091
Date de la décision : 13/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-024 Urbanisme et aménagement du territoire. - Contributions des constructeurs aux dépenses d'équipement public.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : DEBORD

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-10-13;22ly00091 ?
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