Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon :
1°) d'annuler l'arrêté du 6 mai 2019 par lequel le maire de la commune de D... a prononcé à son encontre la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quarante-cinq jours, dont quinze avec sursis ;
2°) de mettre à la charge de la commune de D... la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1905231 du 14 octobre 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du maire de D... du 6 mai 2019 et a mis à la charge de la commune de D... une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 14 décembre 2020, la commune de D..., représentée par Me Alberto (AARPI Alternatives avocats), avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 14 octobre 2020 ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Lyon ;
3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les faits fautifs reprochés à l'intéressé sont établis.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 septembre 2021, M. B..., représenté par Me Matricon, avocate, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la commune de D... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il expose que le moyen soulevé n'est pas fondé.
Par ordonnance du 3 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 avril 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ;
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;
- et les observations de Me Alberto, avocat, représentant la commune de D..., et de Me Matricon, avocate, représentant M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. La commune de D... relève appel du jugement du 14 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de son maire du 6 mai 2019 sanctionnant, par une exclusion temporaire de fonctions d'une durée de quarante-cinq jours, dont quinze avec sursis, M. B..., adjoint technique territorial principal de seconde classe.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale (...) ". Selon l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...) Troisième groupe : (...) l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans (...) ".
3. En l'absence de disposition législative contraire, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, à laquelle il incombe d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction à un agent public, peut apporter la preuve de ces faits devant le juge administratif par tout moyen. Il appartient au juge administratif, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
4. Pour prononcer la sanction en litige, le maire de la D... a reproché à M. B... d'avoir " menti quant à l'utilisation d'un véhicule de service, falsifié un carnet de bord et fait preuve d'intimidation auprès d'un collègue en vue de produire une fausse attestation ".
5. Le 3 juillet 2018, à 9 h 34, le véhicule de service immatriculé ... appartenant à la commune de D... et affecté à l'atelier transport du service " festivités " a été verbalisé pour " usage d'un téléphone en main par le conducteur d'un véhicule en circulation ". Après examen des " bons de travail " et des carnets de bord des véhicules du service, M. B... a été identifié comme le conducteur du véhicule verbalisé, à l'occasion d'une livraison effectuée auprès d'une médiathèque municipale, en dépit d'une mention relative à cette mission portée par celui-ci sur le carnet de bord d'un autre véhicule, immatriculé .... Toutefois, il ressort des pièces du dossier, en particulier du rapport du directeur de la proximité du 11 septembre 2018, qu'à défaut de toute mention utile dans le carnet de bord du véhicule en cause, cette identification se fonde d'abord sur la circonstance que la mention portée par M. B... sur le carnet de bord du véhicule immatriculé ... était raturée, notamment quant à la date de la mission. Cette circonstance ne remettait néanmoins en cause ni la lisibilité, ni la cohérence et la crédibilité de cette mention. Le rapport relève ensuite que la mission alors confiée à M. B... le " localisait (...) à proximité du lieu de l'infraction ". Cependant, la commune de D... ne conteste pas que d'autres missions, confiées à d'autres agents ce même jour, étaient également compatibles géographiquement avec la commission de cette infraction, sans que les véhicules alors utilisés ne soient précisément identifiés. Le responsable du service a ainsi indiqué que six agents " pouvaient se trouver dans le secteur " au moment des faits, dans un courrier électronique non contredit du 30 juillet 2018. Enfin, si M. A..., agent accompagnant M. B... lors de cette mission, a, dans une attestation du 5 septembre 2018, finalement certifié que celle-ci avait été effectuée grâce au véhicule verbalisé alors conduit par l'intéressé, il est constant qu'il est ainsi revenu sur les propos contraires qu'il avait initialement tenus au mois de juillet 2018, ainsi que sur une première attestation établie peu de temps après les faits. Contrairement à ce que prétend la commune de D..., la circonstance que cette première attestation ait été rédigée à la demande de M. B..., afin de se défendre des accusations dont il venait d'être informé, n'est pas de nature à en remettre cause la sincérité, à défaut de tout commencement de preuve d'une pression alors exercée sur son auteur, dont les déclarations à cet égard, telles qu'elles apparaissent dans son attestation du 5 septembre 2018, dans sa déclaration de main courante du 12 septembre 2018, dans sa demande de protection fonctionnelle du 17 septembre 2018 et dans le rapport du 11 septembre 2018, sont peu précises et présentent des incohérences. Ainsi, les attestations contradictoires établies par M. A... ne sauraient permettre de démontrer la réalité des faits reprochés à M. B.... Par suite, les éléments apportés par la commune de D... ne permettent pas d'identifier de manière certaine M. B... comme étant le conducteur du véhicule de service verbalisé le 3 juillet 2018, ni, dès lors, davantage, de tenir pour établis les griefs qui lui sont reprochés, ainsi que l'ont retenu les premiers juges.
6. Il résulte de ce qui précède que la commune de D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de son maire du 6 mai 2019 sanctionnant M. B....
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de D.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement d'une somme de 2 000 euros à M. B..., en application de ces mêmes dispositions
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de D... est rejetée.
Article 2 : La commune de D... versera à M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de D... et à M. C... B....
Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Sophie Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2022.
La rapporteure,
Sophie CorvellecLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne au préfet du Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 20LY03664