Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SCEA Domaine Labet Dechelette a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er août 2012 au 31 juillet 2014.
Par un jugement n° 1903312 du 16 février 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 13 avril 2021, la SCEA Domaine Labet Dechelette, représenté par Me Chiron, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les écarts entre les stocks de fin d'exercice et les stocks de début d'exercice, après prise en compte des ventes enregistrées en comptabilité, ne constituent pas des ventes non comptabilisées mais correspondent à des échantillons, dons, cadeaux et consommations de dégustation dont elle justifie et qui sont induits par les usages de la vente de vin ;
- l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de la minoration de recettes qu'elle invoque, en se bornant à faire état de manquants ;
- à titre subsidiaire, la valorisation des manquants est erronée et doit se faire au prix de revient, en l'absence de démonstration, par l'administration, de la vente de ces manquants.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 1er septembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 22 septembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique,
- et les observations de Me Chiron, représentant la SCEA Domaine Labet Dechelette.
Considérant ce qui suit :
1. La SCEA Domaine Labet Dechelette, qui exploite un domaine viticole à Vougeot, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er août 2012 au 31 juillet 2014, à l'issue de laquelle l'administration a procédé, selon la procédure contradictoire, au rehaussement de son bénéfice agricole et lui a assigné des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, à raison, notamment, de recettes non comptabilisées. La SCEA relève appel du jugement du 16 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée restant à charge au titre de la période 1er août 2012 au 31 juillet 2014.
2. Aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. ". Aux termes de l'article 269 de ce code : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : / a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué ; / (...) 2. La taxe est exigible : / a) Pour les livraisons et les achats visés au a du 1 et pour les opérations mentionnées aux b et d du même 1, lors de la réalisation du fait générateur ; (...) ".
3. Au cours de la vérification de comptabilité de la SCEA Domaine Labet Dechelette, l'administration a constaté, en procédant à la comparaison entre la variation des stocks à la clôture de chacun des exercices clos en 2013 et en 2014 et les ventes comptabilisées, qu'il existait des écarts pour certains millésimes. Après avoir exclu les écarts non significatifs d'une ou deux bouteilles, l'administration n'a pas valorisé les manquants constatés sur le dernier millésime stocké en vrac, afin de prendre en compte les pertes résultant de l'évaporation, des sous-produits de l'élevage et de l'embouteillage. S'agissant des vins stockés en bouteilles, elle a déduit les volumes d'offerts et de dégustations mentionnés dans le registre de cave, pour aboutir à un écart injustifié de 330 bouteilles au titre de l'exercice clos en 2013 et de 533 bouteilles au titre de l'exercice clos en 2014, qu'elle a analysé comme des ventes non comptabilisées. Pour déterminer le chiffre d'affaires omis, elle a déterminé, au titre de chacun des exercices en litige, le prix de vente moyen par bouteille en rapportant le chiffre d'affaires au nombre de bouteilles vendues comptabilisées, après avoir écarté les ventes consenties pour des montants exceptionnellement élevés et les bouteilles offertes, et a multiplié le nombre de bouteilles omises par ce prix moyen.
4. La SCEA Domaine Labet Dechelette, qui ne conteste pas les écarts relevés, fait valoir que ceux-ci correspondent à des échantillons, dons, cadeaux et consommations de dégustation et produit, à l'appui de cette allégation, un tableau de synthèse, établi par ses soins pour chacun des deux exercices en litige, récapitulant, millésime par millésime, les écarts constatés, procédant à leur répartition selon leur utilisation (échantillons, cadeaux clients, dégustation et autoconsommation) et précisant, le cas échant, les bénéficiaires des offerts ou l'évènement au cours duquel les vins ont été proposés à la dégustation. Elle produit également des attestations de clients, établies a posteriori fin 2016, faisant état de bouteilles qui leur ont été offertes ou des dégustations auxquelles sils ont participé, et, enfin, le contrat de commercialisation et d'approvisionnement conclu avec la SAS Maison François Labet, à qui elle vend la totalité de sa production et qui prévoit que les frais d'échantillonnage sont à sa charge. Ces pièces sont toutefois insuffisantes pour justifier des écarts relevés en dernier lieu, alors que l'administration a déjà pris en compte, ainsi qu'il a été dit au point 3 ci-dessus, les offerts et échantillons de dégustation à hauteur des volumes mentionnés par la société elle-même dans les registres de cave, soit 1,02 hl pour l'exercice clos en 2013 et 2,5275 hl pour l'exercice clos en 2014, lesquels ne font pas mention d'un volume relevant de l'autoconsommation. Par ailleurs, la SCEA Domaine Labet Dechelette ne peut utilement se prévaloir de la faible importance des manquants au regard de son stock annuel. Dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de ce que les bouteilles manquantes correspondent à des ventes non comptabilisées.
5. Dès lors que les bouteilles manquantes ne figuraient pas en stock à la clôture des deux exercices sous revue et qu'elles ne peuvent, ainsi qu'il vient d'être dit, être prises en compte au titre des offerts, dégustation et de l'autoconsommation, l'administration a pu, à bon droit, considérer qu'elles correspondaient à des ventes non comptabilisées. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que ces bouteilles auraient dû être valorisées à leur prix de revient et non par l'application d'un prix de vente moyen doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 ci-dessus que c'est à bon droit que l'administration fiscale a procédé au rappel de la taxe sur la valeur ajoutée collectée afférente au chiffre d'affaires réalisé à l'occasion de la vente de ces bouteilles.
7. Il résulte de ce qui précède que la SCEA Domaine Labet Dechelette n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SCEA Domaine Labet Dechelette est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCEA Domaine Labet Dechelette et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 15 décembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Courbon, présidente-assesseure,
M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 janvier 2023.
La rapporteure,
A. Courbon
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY01169