Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 15 avril 2021 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2101253 du 21 octobre 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 18 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Lukec, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 21 octobre 2021 du tribunal administratif de Dijon ;
2°) d'annuler les décisions du préfet de la Côte-d'Or du 15 avril 2021 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son avocate de la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé, en ce qu'il écarte le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- cette décision méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- l'auteur de cette décision n'était pas compétent pour la signer ;
- cette décision n'est pas suffisamment motivée ;
- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 février 2022, le préfet de la Côte-d'Or, représenté par Me Cano (SELARL Centaure avocats), avocat, conclut au rejet de la requête.
Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
La demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B... a été rejetée par une décision du 19 janvier 2022.
Par une ordonnance du 23 août 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 octobre 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère,
- et les observations de Me Augoyard, avocat, pour le préfet de la Côte-d'Or ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... relève appel du jugement du 21 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Côte-d'Or du 15 avril 2021 rejetant sa demande de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Contrairement à ce que prétend M. B..., les premiers juges ont, au point 8 de leur jugement, répondu avec précision au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le jugement attaqué est, par suite, suffisamment motivé.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ". L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants marocains en vertu de l'article 9 de l'accord franco-marocain, dispose par ailleurs, dans sa rédaction alors applicable, que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
4. M. B..., ressortissant marocain né le 3 décembre 1984, a été autorisé à séjourner ponctuellement en France, à compter du 7 août 2014 en qualité de travailleur saisonnier. S'il s'y est établi durablement, en méconnaissance des restrictions inhérentes au titre de séjour dont il bénéficiait alors, à compter de 2018, il n'y résidait habituellement que depuis trois ans à la date de la décision litigieuse. Célébré le 26 janvier 2019, son mariage avec une compatriote, titulaire en France d'une carte de résident, de même que la naissance de leur premier enfant le 13 juillet 2019, étaient également récents, sans qu'il n'établisse l'existence d'un obstacle à ce que leur cellule familiale se reconstitue dans leur pays d'origine. Si certains membres de sa fratrie résident également en France, M. B... ne conteste pas ne pas être dépourvu d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-trois ans et où demeurent ses parents et le reste de sa fratrie. Enfin, il ne prétend nullement que son épouse, seule visée par l'unique certificat médical produit, ne pourrait recevoir un traitement adapté à son état de santé en cas de retour dans leur pays d'origine. Dans ces circonstances, M. B..., qui ne peut se prévaloir d'une réelle intégration par sa seule activité bénévole succincte, n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de la Côte-d'Or a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations et dispositions précitées.
5. Pour ces mêmes motifs, le préfet de la Côte-d'Or, qui n'était pas tenu d'indiquer, dans la décision litigieuse, les motifs pour lesquels il n'a pas entendu faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation et dont il n'est pas établi qu'il n'aurait pas examiné cette éventualité, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B....
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, l'obligation de quitter le territoire français litigieuse a été signée par le secrétaire général de la préfecture de la Côte-d'Or qui avait régulièrement reçu délégation à cette fin par arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 25 septembre 2020. Le moyen tiré de l'incompétence de son auteur, qui n'est assorti d'aucune autre précision, doit être écarté.
7. En deuxième lieu, en application du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable, l'obligation de quitter le territoire français dont est assorti un refus de titre de séjour n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celui-ci. M. B... ne contestant pas que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé est lui-même suffisamment motivé, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'obligation de quitter le territoire français litigieuse doit être écarté.
8. En troisième lieu, comme indiqué ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M. B... n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de ce refus de titre doit être écarté.
9. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux ci-dessus mentionnés, M. B..., qui n'a pas développé d'autres arguments, n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
11. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Sophie Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2023.
La rapporteure,
Sophie CorvellecLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY03742