Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 5 avril 2022 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2201089 du 29 septembre 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 20 octobre 2022, M. B..., représenté par Me Lukec, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 5 avril 2022 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée, dès lors, notamment, que l'avis du médecin inspecteur de la santé publique n'est pas joint et que le nom du médecin n'a pas été communiqué ;
- cette décision méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- il justifie de circonstances humanitaires exceptionnelles lui ouvrant droit à une mesure de régularisation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour qui la fonde ;
- cette décision a été signée par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2023, le préfet de la Côte-d'Or, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant géorgien né le 1er décembre 1971, est entré régulièrement en France le 28 juillet 2021. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 26 janvier 2022. Le 27 septembre 2021, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 5 avril 2022, le préfet de la Côte-d'Or a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. M. B... relève appel du jugement du 29 septembre 2022 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. La décision contestée, qui vise les textes applicables, notamment l'article L. 423-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, détaille la situation administrative de M. B... et expose les raisons pour lesquelles le préfet a estimé, au vu de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 22 février 2022, qu'il ne remplissait pas les conditions lui ouvrant droit à la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé, est ainsi suffisamment motivée au regard des exigences posées par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, qui n'imposent pas que l'avis du collège de médecins soit joint à la décision de refus de titre de séjour.
3. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
4. A supposer que le requérant ait entendu contester la régularité de l'avis du collège de médecins du 22 février 2022, celui-ci, produit par le préfet de la Côte-d'Or en première instance, comporte le nom des médecins qui le composent.
5. La partie qui justifie de l'avis d'un collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié et effectivement accessible dans le pays de renvoi.
6. Pour refuser d'admettre M. B... au séjour, le préfet de la Côte-d'Or s'est appuyé sur l'avis précité du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration indiquant que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel il peut voyager sans risque. Si M. B... souffre d'une thrombose porte et mésentérique et d'une cirrhose, ainsi que cela ressort des différents certificats médicaux, convocations à des examens et ordonnances qu'il produit, aucun des ces documents ne permet de contredire cet avis et de considérer qu'il ne pourrait être pris en charge en Géorgie, où ses pathologies ont d'ailleurs été diagnostiquées en 2021, avant son arrivée en France. Cette preuve n'est pas davantage rapportée par le rapport de l'Oxfam sur la réforme du système de santé en Géorgie établi en juin 2009 et les extraits d'une étude de l'Organisation suisse d'aides aux réfugiés de 2018 reproduits dans ses écritures. S'il fait valoir qu'il ne pourrait accéder effectivement à un traitement approprié, disponible dans des cliniques privées, pour des raisons financières, il n'apporte aucun justificatif à l'appui de cette allégation, et ce alors que la Géorgie dispose d'un système d'assurance maladie universel. Dans ces conditions, en refusant de l'admettre au séjour, le préfet de la Côte-d'Or n'a pas méconnu l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. B... peut bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en Géorgie, pays dans lequel réside l'ensemble de sa famille, notamment ses quatre enfants majeurs. Par suite, il n'est fondé à soutenir ni qu'il justifie de circonstances humanitaires exceptionnelles lui ouvrant droit à une régularisation, ni que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. Par un arrêté du 9 mars 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Côte-d'Or le 11 mars 2022, le préfet de la Côte-d'Or a donné délégation à M. Frédéric Carre, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer les actes au nombre desquels figure la décision contestée. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écartée.
9. La décision contestée comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
10. La décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, M. B... n'est pas fondé à exciper de son illégalité à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français.
11. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 du présent arrêt.
12. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
13. M. B... réside en France depuis moins d'une année à la date de la décision contestée. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, son état de santé ne justifie pas son maintien sur le territoire national, où il ne justifie d'aucune attache personnelle ou familiale. Ses quatre enfants majeurs, ses parents et ses frères et sœurs résident en Géorgie. Dans ces conditions, eu égard à la brièveté de son séjour en France, l'obligation de quitter le territoire n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme doit être écarté. Pour les mêmes motifs, M. B... n'est pas fondé à soutenir que cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
14. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent également être rejetées ses conclusions tendant à l'allocation de frais liés au litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 4 mai 2023, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Courbon, présidente-assesseure,
Mme Caraës, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 mai 2023.
La rapporteure,
A. Courbon
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY03119