Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2021 par lequel le préfet de la Haute-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt-quatre mois et d'ordonner qu'il lui soit délivré un titre de séjour l'autorisant à travailler.
Par un jugement n° 2102565 du 20 janvier 2022, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 7 février 2022, présentée pour M. A..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 2102565 du 20 janvier 2022 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand et l'arrêté du 5 novembre 2021 du préfet de la Haute-Loire ;
2°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Loire de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour méconnaît les articles L. 435-1, L. 435-3 et R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
-la décision de rejet en litige lui a causé un préjudice moral et matériel important et, en conséquence, la décision d'obligation de quitter le territoire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 21 mars 2022, le préfet de la Haute-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 juin 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Lyon (section administrative d'appel).
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Seillet, président assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., qui déclare être de nationalité burkinabé et être né le 28 janvier 2003 à Saaba (Burkina Faso), a été placé auprès d'un tiers digne de confiance par un jugement en assistance éducative du juge des enfants du tribunal judiciaire du Puy-en-Velay du 18 août 2020, faisant toutefois état de doutes quant à l'âge réel de l'intéressé et qui a fait l'objet d'un jugement rectificatif du 16 novembre 2020. Le 19 mars 2021, M. A... a sollicité un titre de séjour auprès du préfet de la Haute-Loire sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Loire du 5 novembre 2021 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire sans délai, fixation du pays de renvoi et interdisant son retour sur le territoire français pendant vingt-quatre mois.
2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ".
3. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans et qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle. Ce n'est que si ces conditions préalables sont remplies que le préfet, sous le contrôle juridictionnel de l'erreur manifeste, doit prendre en compte la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française.
4. D'autre part, aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : / 1° Les documents justifiants de son état civil ; / 2° Les documents justifiants de sa nationalité ". Aux termes de l'article L. 811-2 de ce code, la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. Aux termes de ce dernier article : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". En vertu de l'article 1er du décret du 24 décembre 2015 susvisé relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger : " Lorsque, en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger, l'autorité administrative saisie d'une demande d'établissement ou de délivrance d'un acte ou de titre procède ou fait procéder, en application de l'article 47 du code civil, aux vérifications utiles auprès de l'autorité étrangère compétente, le silence gardé pendant huit mois vaut décision de rejet (...) ".
5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger et pour écarter la présomption d'authenticité dont bénéficie un tel acte, l'autorité administrative procède aux vérifications utiles ou y fait procéder auprès de l'autorité étrangère compétente. L'article 47 du code civil précité pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays. Il incombe donc à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.
6. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer à M. A... le titre de séjour sollicité, le préfet de la Haute-Loire a estimé que l'intéressé avait commis une fraude en produisant de faux documents à l'appui de sa demande de titre de séjour et qu'il ne démontrait pas, par conséquent, être dans sa dix-huitième année à la date du dépôt de sa demande. Pour remettre en cause la force probante de ces documents, le préfet de la Haute-Loire s'est fondé sur un rapport d'analyse documentaire des services de la police aux frontières, en date du 2 février 2021 dont il résulte que l'extrait d'acte de naissance produit, comportant de nombreuses anomalies au regard de la législation locale, touchant au non-respect du délai de déclaration de naissance, à l'absence de mention d'un jugement supplétif, au non-respect du formalisme de la date de délivrance de l'acte et à l'établissement de l'acte en-dehors du ressort de l'état-civil du lieu de naissance, est une contrefaçon. M. A... ne conteste pas que la naissance mentionnée sur l'extrait d'acte de naissance produit l'aurait été au-delà des délais imposés par la législation du Burkina Faso sans qu'un jugement supplétif n'ait été mentionné dans cet acte alors que ladite législation impose, dans ce cas, un tel jugement, et il ne conteste pas davantage que la date n'a pas été inscrite en toutes lettres comme l'exige la législation de ce pays. Il ne justifie pas non plus que l'acte de naissance aurait dû être établi dans le village de Saaba, centre secondaire d'état-civil et non au niveau de la commune de Boussouma Si M. A... a produit une carte consulaire, laquelle au demeurant est dépourvue de toute force probante pour l'application de l'article 47 du code civil dès lors qu'elle ne constitue pas un acte d'état civil, elle a été délivrée, ainsi qu'elle le mentionne, au vu de l'extrait d'acte de naissance frauduleux mentionné ci-dessus et ne peut donc être tenue pour probante. Dans ces conditions et alors que l'identité des parents de l'intéressé mentionnée dans l'extrait d'acte de naissance ne correspond ni aux mentions portées sur le jugement d'assistance éducative initiale du 18 août 2020 ni à ses propres déclarations lors de son audition par les services de police, le préfet a pu en déduire que les documents d'état civil produits à l'appui de la demande de titre de séjour étaient entachés de fraude et ne pouvaient par suite être regardés comme faisant foi. Dès lors, le préfet de la Haute-Loire pouvait, nonobstant le sérieux de la formation suivie par le requérant, légalement se fonder sur ce seul motif pour rejeter la demande de l'intéressé, dont il n'est dans ces conditions pas davantage établi qu'elle avait été présentée dans l'année ayant suivi son dix-huitième anniversaire.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à la mise à la charge de l'État d'une somme au titre des frais liés au litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Loire.
Délibéré après l'audience du 6 juillet 2023 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juillet 2023.
Le rapporteur,
Ph. SeilletLe président,
V.-M. Picard
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY00418
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