Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sur les hauts revenus et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015 ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 2009517 du 31 mai 2022 le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 22 juillet 2022, M. B..., représenté par Me Da Silva, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 31 mai 2022 ;
2°) de le décharger des impositions et pénalités susmentionnées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme totale de 15 000 euros au titre des frais d'instance engagés en première instance et en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré du non-respect des garanties offertes par l'article L. 54 C du livre des procédures fiscales ;
- les dispositions de l'article L. 54 C du livre des procédures fiscales ont été méconnues à défaut d'indication du nom du supérieur hiérarchique du contrôle sur pièces ;
- les informations obligatoires résultant de l'article L. 49 du livre des procédures fiscales n'ont jamais été transmises par le service vérificateur et il a été induit en erreur sur la possibilité d'exercer un recours hiérarchique ;
- en changeant le motif retenu dans la proposition de rectification, l'administration a clos le débat et l'a ainsi privé d'un nouveau délai de trente jours pour répondre ;
- la condition relative au délai de détention pendant une durée de cinq années est satisfaite.
Par un mémoire enregistré le 2 mai 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, présidente,
- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., qui a exercé, à compter du 20 juillet 2004, une activité agricole dans le cadre du groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) de la Vallée dont il était associé et co-gérant avec son père et son frère, s'est retiré de ce groupement, le 28 février 2007. Le 16 février 2012, à la suite du rachat des parts détenues par son père dans l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) de La Vallée (anciennement GAEC de la Vallée), il a repris une activité agricole et le 31 août 2015, il a cédé les 3 820 parts qu'il détenait dans l'EARL de la Vallée, au prix de 712 584 euros. A la suite d'un contrôle sur pièce dont l'EARL de la Vallée a fait l'objet, par une proposition de rectification en date du 19 décembre 2018, l'administration a notifié à M. B..., des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sur les hauts revenus et de contributions sociales au titre de l'année 2015, assorties d'intérêts de retard et de la majoration de 10 %, à raison de la remise en cause de l'exonération de plus-value afférente à la cession des parts détenues dans l'EARL, sous laquelle avait entendu se placer l'intéressé sur le fondement de l'article 151 septies du code général des impôts. M. B... relève appel du jugement du 31 mai 2022, par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités dont elles ont été assorties.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort du jugement attaqué et notamment de ses points 3, 4 et 5 que le tribunal n'a pas omis de répondre aux moyens qu'il avait soulevés en première instance tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 54 C du livre des procédures fiscales ainsi que du bénéfice du paragraphe n° 480 de la documentation référencée BOI-CF-PGR-30-10. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 54 C du livre des procédures fiscales : " Hormis lorsqu'elle est adressée dans le cadre des procédures mentionnées aux articles L. 12, L. 13 et L. 13 G et aux I et II de la section V du présent chapitre, la proposition de rectification peut faire l'objet, dans le délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux, d'un recours hiérarchique qui suspend le cours de ce délai. ".
4. Alors qu'en l'espèce, il ressort de la proposition de rectification adressée à M. B... le 19 décembre 2018 qu'elle mentionne la faculté, ouverte par l'article L. 54 C du livre des procédures fiscales, de présenter, dans le délai de recours contentieux, un recours hiérarchique, il ne résulte pas de ces dispositions qu'elles aient pour objet ou pour effet d'imposer à l'administration de faire mention dans la proposition de rectification du nom du supérieur hiérarchique de son auteur. Par ailleurs, M. B... n'est pas fondé à se prévaloir du paragraphe 480 de la doctrine référencée BOI-CF-PGR-30-10, relative à la procédure d'imposition.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 49 du livre des procédures fiscales : " Quand elle a procédé à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu, à une vérification de comptabilité ou à un examen de comptabilité, l'administration des impôts doit en porter les résultats à la connaissance du contribuable, même en l'absence de rectification. / Les points contrôlés mentionnés au second alinéa de l'article L. 80 A et au 10° de l'article L. 80 B sont indiqués au contribuable sur la proposition de rectification ou sur l'avis d'absence de rectification, y compris s'ils ne comportent ni insuffisance, ni inexactitude, ni omission, ni dissimulation au sens de l'article L. 55. "
6. Il résulte de l'instruction que les rectifications en litige s'inscrivent dans le cadre du contrôle sur pièces dont l'EARL de la Vallée a fait l'objet concernant le bénéfice agricole réalisé par l'intéressé et procèdent des seuls éléments portés sur les annexes de la liasse fiscale n°2139 SD déposée par l'EARL, sur lesquelles a été déclarée la plus-value réalisée lors de la cession des parts détenues par M. B... dans l'EARL. Dès lors, cette situation ne saurait être regardée comme ayant été révélée par l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, dont l'intéressé a par ailleurs fait l'objet, alors même que le 12 septembre 2019, il a adressé au service vérificateur un courriel concernant l'origine d'un crédit bancaire d'un montant de 679 841 euros, correspondant à la plus-value en litige. Par suite, les redressements contestés n'étant pas fondés sur des documents obtenus dans le cadre de la mise en œuvre de la procédure d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, l'intéressé ne peut utilement soutenir qu'il n'a pu bénéficier des garanties attachées à l'envoi des informations prévues par les dispositions précitées de l'article L.49 du livre des procédures fiscales. Pour les mêmes motifs, et eu égard au fait qu'ainsi qu'il a été dit au point 4 du présent arrêt, la proposition de rectification du 19 décembre 2018 informait expressément l'intéressé de sa faculté d'exercer un recours hiérarchique, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été induit en erreur sur la possibilité d'exercer un tel recours, ni, en tout état de cause, que l'administration aurait tacitement pris une position formelle sur l'exonération de plus-value issue de la rédaction de l'article 151 septies du code général des impôts.
7. En dernier lieu, le requérant soutient que la procédure d'imposition est irrégulière au motif que l'administration aurait changé, dans la réponse aux observations du contribuable du 18 mars 2019, les motifs du redressement à la suite de la proposition de rectification du 19 décembre 2018. Toutefois, il ressort de la réponse aux observations du contribuable, que l'administration en se fondant sur la remise en cause de l'exonération prévue par l'article 151 septies du code général des impôts compte tenu de l'absence de satisfaction de la condition d'exercice de l'activité de façon personnelle, directe et continue pendant les cinq années précédant la cession du 31 août 2015, n'a pas modifié le fondement légal du redressement retenu dans la proposition de rectification qu'elle a d'ailleurs maintenu. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait dû être destinataire d'une nouvelle proposition de rectification et d'un nouveau délai de réponse de trente jours.
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :
8. En premier lieu, aux termes de l'article 39 duodecies du code général des impôts : " 1. Par dérogation aux dispositions de l'article 38, les plus-values provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé sont soumises à des régimes distincts suivant qu'elles sont réalisées à court ou à long terme (...) ". Aux termes de l'article 151 septies de ce code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I.- Les dispositions du présent article s'appliquent aux activités commerciales, industrielles, artisanales, libérales ou agricoles, exercées à titre professionnel. / II.-Les plus-values de cession soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies, (...) et réalisées dans le cadre d'une des activités mentionnées au I sont, à condition que l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans, exonérées pour (...) ". Enfin, aux termes du IV de l'article 155 du même code, dans sa rédaction issue de l'article 13 de la loi de finances rectificative n°2010-1658 du 29 décembre 2010 qui reprend les dispositions du second alinéa du I de l'article 151 septies de ce code que ce même article 13 supprime : " 1. (...) l'exercice à titre professionnel implique la participation personnelle, directe et continue à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité. (...) ".
9. Pour bénéficier de l'exonération prévue par les dispositions précitées, le contribuable doit justifier que le bien dont la cession a dégagé une plus-value a été affecté à l'une des activités professionnelles visées à cet article, que celle-ci a été exercée pendant cinq ans avant la cession et que sa participation à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité a été personnelle, directe et continue.
10. Il résulte de l'instruction que M. B... a exercé à compter du 20 juillet 2004 une activité agricole dans le cadre du GAEC de la Vallée dont il était associé et co-gérant avec son père et son frère, que le 28 février 2007, il a démissionné de ses fonctions de co-gérant, que les parts qu'il détenait ont été annulées en échange de l'effacement du solde débiteur de son compte courant d'associé et que la convention de mise à disposition du groupement de ses terres a été résiliée. Enfin, le requérant a repris son activité agricole le 16 février 2012, à la suite du rachat des parts détenues par son père dans l'EARL de la Vallée.
11. Le requérant n'apporte pas plus en appel qu'en première instance d'élément permettant d'établir qu'il aurait personnellement et directement participé à l'exploitation des actifs en cause entre le 28 février 2007 et le 16 février 2012. Dès lors, la condition d'utilisation des biens cédés dans le cadre d'une activité exercée au titre professionnel durant cinq années prévue par les dispositions précitées ne peut donc être regardée comme satisfaite.
12. En second lieu, comme en première instance, le requérant se prévaut en appel du bénéfice du paragraphe n° 40 de la documentation référencée BOI-BIC-PVMV-40-10-10-20, dans sa version applicable au litige selon lequel : " Le délai s'apprécie activité par activité. Seule est prise en compte la période au cours de laquelle l'activité est exercée à titre professionnel. / Exemple : Le 30 juin N+9, un entrepreneur individuel cède l'exploitation qu'il a créée le 1er janvier N. Il a mis son fonds en location gérance du 1er janvier N+2 au 31 décembre N+5, avant de l'exploiter à nouveau en direct. / Le délai de cinq ans s'apprécie en cumulant les périodes d'exercice à titre professionnel, soit du 1er janvier N au 31 décembre N+1 et du 1er janvier N+6 au 30 juin N+9. La condition de délai est donc satisfaite au cas particulier. ".
13. Toutefois, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, cette doctrine, qui est d'interprétation stricte n'est pas applicable à la situation dont il se prévaut d'exploitant agricole qui exploiterait ses propres terres tantôt directement et ce de manière professionnelle, tantôt par le biais d'une mise en location.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Dèche, présidente,
Mme Mauclair, première conseillère,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 avril 2024.
La rapporteure,
P. DècheL'assesseure la plus ancienne,
A.- G. Mauclair
La greffière,
C. Driguzzi
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY02269