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03/10/2024 | FRANCE | N°23LY01840

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 2ème chambre, 03 octobre 2024, 23LY01840


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2015, 2016 et 2017, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 2005461 du 30 mars 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour



Par une requête et un mémoire, enre

gistrés les 30 mai 2023 et 5 avril 2024, M. A... C..., représenté par la SELAS Abocap Conseil, demande à la cour :



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2015, 2016 et 2017, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2005461 du 30 mars 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 mai 2023 et 5 avril 2024, M. A... C..., représenté par la SELAS Abocap Conseil, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités ;

3°) de condamner l'Etat aux dépens et de mettre à sa charge une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen tiré d'une erreur d'absence de déclarations auprès des autorités françaises de la part de la société Paint Building European Ltd ;

- l'administration a méconnu l'article L. 47 du livre des procédures fiscales en l'absence d'envoi de l'avis de vérification de comptabilité au siège social à Londres de la société Paint Building European Ltd ;

- les paragraphes 20 et 30 de la documentation administrative référencée BOI-CF-PGR-20-10, et 50 de la documentation administrative référencée BOI-CF-PGR-20-20, sont opposables à l'administration ;

- l'existence d'un établissement stable de la société Paint Building European Ltd en France n'a pas fait l'objet d'un débat oral et contradictoire au cours de la vérification de comptabilité de ladite société ;

- l'administration a méconnu l'article L. 52 du livre des procédures fiscales en ne respectant pas le délai de trois mois pour procéder à la vérification de comptabilité de la société Paint Building European Ltd ;

- la procédure de taxation d'office de la société Paint Building European Ltd est irrégulière ; la mise en demeure de déposer des déclarations d'impôt sur les sociétés devait être précédée d'une notification informant cette société qu'elle devait être regardée comme disposant d'un établissement stable imposable en France ; la mise en demeure est dépourvue de fondement dès lors que le vérificateur a conclu à l'existence d'un établissement stable en France exerçant une activité occulte avant même le débat oral et contradictoire devant avoir lieu au cours de la vérification de comptabilité ;

- la proposition de rectification méconnaît les articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales ;

- la société Paint Building European Ltd ne dispose pas d'établissement stable en France ;

- elle n'a pas exercé d'activité occulte en France ;

- le paragraphe 20 de la documentation administrative référencée BOI-CF-PGR-10-70 est opposable à l'administration ;

- le droit de reprise de l'administration au titre de l'année 2015 était prescrit ;

- la société Paint Building European Ltd n'a pas réalisé de bénéfices en France ;

- les bénéfices ont été affectés au siège social à Londres et n'ont ainsi pas été désinvestis ;

- la majoration de 40 % n'est pas motivée et est infondée.

Par des mémoires, enregistrés les 15 décembre 2023 et 2 mai 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 6 mai 2024, la clôture d'instruction, initialement fixée au 13 mai 9 avril 2024, a été reportée au 3 juin 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur les gains en capital, signée à Londres le 19 juin 2008 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Porée, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Laval, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La société Paint Building European Ltd, société de droit anglais ayant son siège social à Londres, constituée le 8 mai 2014, qui avait pour dirigeant M. C... domicilié en France à Valence (Drôme) et pour objet social la réalisation de travaux de plâtrerie et de peinture, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2017 à l'issue de laquelle le vérificateur, ayant estimé qu'elle disposait d'un établissement stable en France à partir duquel était exercée une activité occulte, a reconstitué ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés des années 2015, 2016 et 2017 qu'il a taxés d'office. Dans le cadre d'un contrôle sur pièces, l'administration a réintégré dans les revenus imposables de M. C... les bénéfices distribués correspondants qu'elle a soumis à l'impôt sur le revenu entre ses mains sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. M. C... a, en conséquence, été assujetti à des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2015, 2016 et 2017, auxquelles ont été appliqués des intérêts de retard et la majoration de 40 % prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts. Le requérant relève appel du jugement du 30 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le tribunal administratif de Grenoble, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments présentés à l'appui de la demande, a répondu aux points 3 et 4 de son jugement, de manière suffisamment motivée, au moyen de M. C... tiré d'une erreur d'absence de déclarations auprès des autorités françaises de la part de la société Paint Building European Ltd. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité.

Sur l'activité occulte et la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition. Il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale.

4. Aux termes du I de l'article 209 du code général des impôts : " (...) les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés (...) en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France (...) ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions. ".

5. Aux termes du 1 de l'article 7 de la convention du 19 juin 2008 conclue entre la France et le Royaume-Uni : " Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices de l'entreprise sont imposables dans l'autre Etat mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables à cet établissement stable. ". Aux termes de l'article 5 de la même convention : " 1. Au sens de la présente Convention, l'expression " établissement stable " désigne une installation fixe d'affaires par l'intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité. 2. L'expression " établissement stable " comprend notamment : a) un siège de direction ; b) une succursale ; c) un bureau ; (...) 5. Nonobstant les dispositions des paragraphes 1 et 2, lorsqu'une personne - autre qu'un agent jouissant d'un statut indépendant auquel s'applique le paragraphe 6 - agit pour le compte d'une entreprise et dispose dans un Etat contractant de pouvoirs qu'elle y exerce habituellement lui permettant de conclure des contrats au nom de l'entreprise, cette entreprise est considérée comme ayant un établissement stable dans cet Etat pour toutes les activités que cette personne exerce pour l'entreprise, à moins que les activités de cette personne ne soient limitées à celles qui sont mentionnées au paragraphe 4 et qui, si elles étaient exercées par l'intermédiaire d'une installation fixe d'affaires, ne permettraient pas de considérer cette installation comme un établissement stable selon les dispositions de ce paragraphe. (...) ".

6. D'une part, il résulte du registre des " compagnies house " tenu au Royaume-Uni que la société Paint Building European Ltd faisait partie des " dormant accounts " correspondant à des entreprises qui ne font pas de transaction significative dans ce pays. Il résulte également de ce registre que la société Paint Building European Ltd a déclaré auprès des autorités britanniques, aux dates des 7 mai 2014, 3 juin 2015 et 14 juin 2016, une " adresse de service " en France à Valence (Drôme) au domicile de M. C.... Celui-ci ne conteste d'ailleurs pas qu'il a déclaré au vérificateur n'être allé qu'une seule fois à Londres en 2014 ou 2015 et il est constant qu'il ne connaissait pas l'adresse de la banque auprès de laquelle aurait été ouvert le compte bancaire de la société, ni le numéro de ce compte, n'a produit ni carte bancaire, ni relevé de compte au nom de la société au cours du contrôle. Il résulte de l'instruction que la société Paint Building European Ltd n'a eu, au cours de la période vérifiée, qu'un seul client, l'entreprise Sanjuan, dont le siège social était situé à Valence, avec laquelle elle était liée par un contrat de sous-traitance rédigé en langue française et que les chantiers réalisés pour cette entreprise étaient tous situés sur le territoire français, principalement dans le département de la Drôme. Il résulte de la proposition de rectification que M. C... mettait à la disposition gratuite de la société pour son activité de dirigeant une pièce de son habitation principale située à Valence, que le matériel professionnel nécessaire à l'activité de la société requérante se trouvait sur ces chantiers et qu'il a déclaré que les matériaux étaient fournis par le donneur d'ordre se trouvant en France, que les fournisseurs étaient situés en France, qu'il s'occupait des relations avec les fournisseurs et le client, notamment de la facturation, ainsi que du suivi des travaux sur place. Si M. C... soutient que la société Paint Building European Ltd a eu une activité commerciale au Royaume-Uni, il n'en justifie pas en se bornant à faire état d'une seule déclaration fiscale portant sur la période du 1er juin 2017 au 31 mai 2018 établie par un cabinet comptable de Londres le 16 septembre 2019, soit après la vérification de comptabilité, de bons de commande de l'entreprise Sanjuan mentionnant l'adresse de la société au Royaume-Uni et de factures portant un numéro de téléphone britannique alors qu'il est constant que la société ne disposait pas d'une ligne active à Londres. Par suite, la société Paint Building European Ltd doit être regardée comme ayant exploité une entreprise en France au sens des dispositions précitées du I de l'article 209 du code général des impôts. Il en résulte que les bénéfices tirés de cette activité sont imposables à l'impôt sur les sociétés en application de la loi fiscale française.

7. D'autre part, les éléments relevés au point précédent permettent de regarder la société Paint Building European Ltd comme ayant disposé, au cours des années d'imposition en litige et pour l'exercice de son activité, d'une installation fixe d'affaires caractérisant un établissement stable en France au sens et pour l'application des stipulations précitées de la convention fiscale conclue entre la France et le Royaume-Uni.

8. En deuxième lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite. (...) ".

9. D'une part, il résulte des dispositions précitées que dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, son activité est réputée occulte s'il n'est pas en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ses obligations déclaratives. S'agissant d'un contribuable qui fait valoir qu'il a satisfait à l'ensemble de ses obligations fiscales dans un Etat autre que la France, la justification de l'erreur commise doit être appréciée en tenant compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment du niveau d'imposition dans cet autre État et des modalités d'échange d'informations entre les administrations fiscales des deux Etats.

10. La société Paint Building European Ltd n'a déposé au titre des années litigieuses aucune des déclarations qu'elle était tenue de souscrire en matière d'impôt sur les sociétés du fait de son activité imposable en France et n'a pas davantage fait connaître cette activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce. Ainsi qu'il a été dit, il ne résulte pas de l'instruction que la société Paint Building European LTD aurait déclaré aux autorités britanniques, pour l'impôt sur les sociétés, les revenus tirés de l'activité de son établissement en France, au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 mai 2017. Si M. C... produit une déclaration pour l'impôt sur les sociétés établie au titre de la période du 1er juin 2017 au 31 mai 2018 par un cabinet comptable de Londres, il ne démontre pas, en tout état de cause, que la société l'a effectivement envoyée aux autorités du Royaume-Uni. Par suite, la société Paint Building European Ltd doit être regardée comme ayant entendu dissimuler l'activité qu'elle exerçait en France par l'intermédiaire de son établissement stable, et le requérant n'établit pas que la société a commis une erreur justifiant qu'elle ne se soit pas acquittée de son obligation de déclarer en France l'impôt sur les sociétés afférent aux prestations correspondantes.

11. D'autre part, M. C... ne peut se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 20 de la documentation administrative référencée BOI-CF-PGR-10-70, qui ne vise que les centres des formalités des entreprises en France, et non un registre étranger du commerce et des sociétés.

12. En troisième lieu, en vertu du principe d'indépendance des procédures, les moyens relatifs à la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre d'une société soumise au régime d'imposition des sociétés de capitaux sont sans influence sur les impositions personnelles des bénéficiaires des revenus de capitaux mobiliers distribués par cette société. Par suite, M. C... ne peut utilement faire valoir, pour contester les impositions mises à sa charge au titre des années 2015, 2016 et 2017, que la procédure d'imposition suivie avec la société Paint Building European LTD est entachée d'irrégularités.

13. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. (...) ".

14. Il résulte des articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. Hormis le cas où elle se réfère à un document qu'elle joint à la proposition de rectification ou à la réponse aux observations du contribuable, l'administration peut satisfaire cette obligation en se bornant à se référer aux motifs retenus dans une proposition de rectification, ou une réponse à ses observations, consécutive à un autre contrôle et qui lui a été régulièrement notifiée, à la condition qu'elle identifie précisément la proposition ou la réponse en cause et que celle-ci soit elle-même suffisamment motivée.

15. La proposition de rectification relative aux revenus distribués de M. C... vise les articles L. 169 du livre des procédures fiscales, les articles 109 1. 1°, 110 et 158 7. 2° du code général des impôts et mentionne les montants des rehaussements au titre des années 2015, 2016 et 2017, ainsi que la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Cette proposition de rectification ne comporte toutefois pas l'exposé des motifs ayant conduit le vérificateur à estimer que la société Paint Building European Ltd disposait d'un établissement stable en France à partir duquel était exercée l'activité occulte et les modalités retenues pour reconstituer ses chiffres d'affaires et les charges déductibles. Si la proposition de rectification destinée à M. C... se réfère à une annexe jointe, ce document, qui consiste en la reproduction des pages 14 et 15 de la proposition de rectification adressée à la société Paint Building European Ltd, ne fait pas davantage état de ces motifs et indique seulement que M. C... a été considéré comme le bénéficiaire des sommes distribuées en sa qualité de seul maître de l'affaire. Toutefois, ainsi qu'il a été dit, la proposition de rectification relative aux revenus distribués se réfère aux motifs retenus dans la proposition de rectification adressée à la société Paint Building European Ltd qu'elle identifie précisément. M. C... ne conteste pas que les plis recommandés contenant l'un la proposition de rectification du 9 août 2019 qui lui était destinée personnellement et l'autre la proposition de rectification datée du même jour destinée à la société ont, tous deux, été présentés à son domicile personnel à Valence le 13 août suivant et qu'ils ont été retournés à l'administration quinze jours plus tard avec la mention " pli avisé non réclamé ". Enfin, la proposition de rectification de la société Paint Building European Ltd est suffisamment motivée en ce qui concerne l'imposition en France et les modalités de détermination des résultats à l'origine des distributions. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

16. En premier lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable exerce une activité occulte. (...) ".

17. Il résulte des points 10 et 11 du présent arrêt qu'en raison d'une activité occulte en France, le moyen tiré de la prescription du droit de reprise de l'administration au titre de l'année 2015 doit être écarté.

18. En second lieu, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ".

19. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...) ".

20. M. C... ne conteste pas que le pli contenant la proposition de rectification du 9 août 2019 a été présenté à son domicile le 13 août suivant, et qu'il a été retourné à l'administration quinze jours plus tard avec la mention " pli avisé non réclamé ". En conséquence, il appartient à M. C..., réputé avoir tacitement accepté les rehaussements dont il a fait l'objet, d'apporter la preuve des erreurs qu'il impute à l'administration.

21. D'une part, il résulte de l'instruction que le vérificateur a reconstitué les chiffres d'affaires de la société Paint Building European Ltd en se basant sur les factures de vente de cette société transmises à l'administration par l'entreprise Sanjuan dans le cadre de l'exercice du droit de communication, à concurrence de respectivement 15 774,50 euros HT, 47 102,50 euros HT, 76 824,60 euros HT, au titre des années 2015, 2016 et 2017, qu'il a retenu un forfait de charges de 30 % à la suite des déclarations de M. C... durant la vérification de comptabilité de la société indiquant " 20 à 30 % de charges ", ainsi que des bénéfices de 11 042 euros, de 32 972 euros et de 53 777 euros au titre de chacune des années en litige. M. C... ne prouve pas que ces données sont erronées en se bornant à produire une déclaration d'impôt sur les sociétés portant uniquement sur la période du 1er juin 2017 au 31 mai 2018, datée du 16 septembre 2019, soit postérieurement à la vérification de comptabilité de la société, dont il n'est pas démontré qu'elle a été envoyée aux autorités fiscales du Royaume-Uni.

22. D'autre part, lorsque le redressement procède de l'imputation à un établissement stable situé en France, par l'intermédiaire duquel elle est regardée comme y exerçant son activité, de bénéfices réalisés par une société étrangère, il ne saurait par lui-même révéler l'existence d'une distribution de revenus par cette société, au sens de l'article 109 du code général des impôts.

23. M. C... n'établit ni que les bénéfices de la société Paint Building European Ltd réalisés en France ont été inscrits dans sa comptabilité, ni qu'ils ont été déclarés et soumis à l'impôt au Royaume-Uni pour la période du 1er janvier 2015 au 31 mai 2017 en se bornant à produire une déclaration d'impôt sur les sociétés de la société au titre de la période du 1er juin 2017 au 31 mai 2018 dont il n'est pas démontré, en tout état de cause, qu'elle a été effectivement envoyée aux autorités fiscales britanniques. Par suite, dès lors que les bénéfices imposés en France n'ont pas été mis en réserve ou incorporés au capital de la société Paint Building European Ltd, les dispositions du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts étaient applicables.

Sur les majorations :

24. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

25. En premier lieu, aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens des articles L. 211-2 à L. 211-7 du code des relations entre le public et l'administration (...) ".

26. La proposition de rectification a suffisamment motivé en droit et en fait la majoration de 40 %. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.

27. En second lieu, pour établir le caractère délibéré des manquements constatés, l'administration a relevé que M. C..., en sa qualité de dirigeant de la société Paint Building European Ltd, ne pouvait ignorer que cette société exerçait une activité en France, par le biais d'un établissement stable situé à son domicile personnel, ni qu'elle n'avait au Royaume-Uni qu'un siège social, qu'il avait en pleine connaissance de cause, en tant que seul maître de l'affaire, procédé aux désinvestissements dans l'établissement stable à son profit, et que les revenus non déclarés de l'intéressé s'élevaient en base à 13 803 euros, 41 215 euros, 67 221 euros, correspondant à 50,39 %, 75,29 % et à 100 % des revenus qui auraient dû être déclarés respectivement au titre des années 2015, 2016 et 2017. Dans ces conditions, l'administration établit l'intention délibérée de M. C... d'éluder les impositions dont il était redevable justifiant l'application des majorations pour manquement délibéré.

28. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et celles en tout état de cause relatives aux dépens, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

M. Haïli, président-assesseur,

M. Porée, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 octobre 2024.

Le rapporteur,

A. Porée

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 23LY01840


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