Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 18 mai 2021 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer une autorisation de regroupement familial au bénéfice de son épouse Mme E... B....
Par un jugement n° 2106116 du 19 octobre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 6 mai 2024, M. D... A..., représenté par Me Robin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de lui accorder le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse, et de donner toutes instructions au ministre de l'intérieur pour qu'un visa long séjour soit délivré à son épouse, le tout dans le délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision attaquée est entachée d'erreur d'appréciation ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La préfète du Rhône, qui a reçu communication de la requête, n'a pas présenté d'observations.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 février 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Porée, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant de la République Démocratique du Congo, né le 18 septembre 1957, qui déclare séjourner régulièrement sur le territoire français depuis 2008, s'est marié le 17 décembre 2009 avec Mme E... B.... Il a demandé, le 17 août 2017, le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse. Par une décision du 18 mai 2021, le préfet du Rhône a refusé de faire droit à sa demande. Le requérant relève appel du jugement du 19 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande en annulation de cette décision.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 434-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui en fait la demande est autorisé à être rejoint au titre du regroupement familial s'il remplit les conditions suivantes : 1° Il justifie de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille ; 2° Il dispose ou disposera à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique ; 3° Il se conforme aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil. ". Aux termes de l'article L. 434-8 de ce code : " Pour l'appréciation des ressources mentionnées au 1° de l'article L. 434-7 toutes les ressources du demandeur et de son conjoint sont prises en compte, indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail. Ces ressources doivent atteindre un montant, fixé par décret en Conseil d'Etat, qui tient compte de la taille de la famille du demandeur et doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. / (...). ". Aux termes de l'article R. 434-4 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 434-7, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : (...) 1° Cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes (...) ".
3. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que le caractère suffisant du niveau de ressources du demandeur est apprécié sur la période de douze mois précédant le dépôt de la demande de regroupement familial, par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum interprofessionnel de croissance au cours de cette même période, même si, lorsque ce seuil n'est pas atteint au cours de la période considérée, il est toujours possible, pour le préfet, de prendre une décision favorable en tenant compte de l'évolution des ressources du demandeur, y compris après le dépôt de la demande.
4. M. A... ne conteste pas que la moyenne mensuelle de ses ressources, d'un montant de 1 381,57 euros bruts, était inférieure au salaire minimum de croissance mensuel brut de 1 474,58 euros, pour la période de douze mois précédant sa demande de regroupement familial. Si l'intéressé se prévaut d'une évolution favorable de ses ressources à compter du 4 mai 2021, cette évolution est très récente à la date de la décision attaquée, et, au demeurant, il ressort des pièces du dossier que ses ressources supplémentaires procurées par un emploi en intérim se sont révélées instables après cette décision. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par le préfet doit être écarté.
5. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
6. M. A... s'est marié en 2009 et il n'a demandé qu'en 2017 le bénéfice du regroupement familial pour son épouse. Si l'intéressé se prévaut de l'envoi d'argent régulier à sa conjointe afin d'établir le maintien de liens avec celle-ci, il ressort des pièces du dossier que les seules sommes d'argent adressées à son épouse l'ont été par d'autres personnes. Au demeurant, si M. A... soutient également que la présence de son épouse est indispensable en raison de son état de santé, il n'en justifie pas en se bornant à produire un certificat médical mentionnant seulement que " l'état de santé (...) justifie que M. bénéficie de la présence d'une tierce personne à domicile, en l'occurrence son épouse si nécessaire. ". Dans ces conditions, le préfet n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale du requérant une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise. Dès lors, la décision attaquée n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
M. Haïli, président-assesseur,
M. Porée, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2024.
Le rapporteur,
A. Porée
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 24LY01309