Vu, sous le n° 12MA04329, la requête, enregistrée le 9 novembre 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant ...domiciliée..., par MeD... ;
Mme B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1100058 du 18 octobre 2012 du tribunal administratif de Toulon rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 27 décembre 2010 par laquelle le directeur de la caisse primaire d'assurance maladie du Var lui a infligé une pénalité financière de 5 000 euros en application de l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) de mettre à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie du Var la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du 1er septembre 2014 du président de la cour administrative d'appel de Marseille portant désignation, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, de M. Laurent Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Guerrive, président de la 6e chambre ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 février 2015 :
- le rapport de M. Thiele, rapporteur,
- les conclusions de Mme Felmy, rapporteur public,
- les observations de Me E...pour MmeB...,
- et les observations de Me C...pour la caisse primaire d'assurance maladie du Var ;
1. Considérant qu'à l'occasion d'un contrôle de l'activité de MmeB..., qui exerce en qualité d'infirmière à titre libéral, au titre de la période du 1er octobre 2009 au 31 mars 2010, les services de la caisse primaire d'assurance maladie du Var ont relevé que cette activité faisait apparaître un nombre d'actes de soins de toilette (cotés AIS 3) important ; que, par lettre du 30 septembre 2010, le directeur de la caisse primaire a indiqué à Mme B...que le préjudice financier découlant des irrégularités constatées était évalué à la somme de 14 946 euros et qu'en application de l'article R. 147-8-1 du code de la sécurité sociale, la pénalité encourue était susceptible d'être fixée à un montant maximum égal à 50 % de cette somme ; que, par décision du 27 décembre 2010, le directeur de la caisse primaire d'assurance maladie du Var a décidé d'infliger à MmeB..., sur le fondement de l'article L. 162-1-14 du code de la Sécurité sociale, une pénalité financière de 5 000 euros, au motif que " le nombre d'actes facturés AIS3 était incompatible avec la durée des séances inscrites au titre XVI de la Nomenclature générale des actes professionnels - article 11 " et eu égard au " montant conséquent de l'indu et aux observations apportées au cours [de la séance de la commission 'formation infirmiers' du 8 décembre 2010 " ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de Mme B...tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur l'appel principal de Mme B...:
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) - infligent une sanction (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;
3. Considérant que la décision du 27 décembre 2010, qui mentionne l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale et l'article 11 du titre XVI de la nomenclature générale des actes professionnels, comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit qui en constituent le fondement ; que cette décision précise par ailleurs que " le nombre d'actes facturés AIS3 était incompatible [avec cette nomenclature] " et qu'eu égard au " montant conséquent de l'indu et aux observations apportées au cours [de la séance de la commission 'formation infirmiers' du 8 décembre 2010 ", une pénalité de 5 000 euros était justifiée, comporte l'énoncé des considérations de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ; que la circonstance que les courriers précédents adressés à MmeB..., ou le listing des journées pour lesquelles des anomalies avaient été relevées, seraient insuffisamment assortis de justificatifs est sans influence sur le respect des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979, qui concernent la motivation de la décision elle-même ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner sa recevabilité, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée n'est pas fondé ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 147-2 du code de la sécurité sociale : " I. -Lorsqu'il a connaissance de faits susceptibles de faire l'objet de la pénalité financière mentionnée à l'article L. 162-1-14, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie adresse à la personne physique ou morale en cause la notification prévue à cet article par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Lorsque ces faits ont donné lieu à l'engagement de la procédure mentionnée à l'article L. 315-1, la notification ne peut intervenir qu'à l'issue de cette procédure. Cette notification précise les faits reprochés et le montant de la pénalité encourue et indique à la personne en cause qu'elle dispose d'un délai d'un mois à compter de sa réception pour demander à être entendue, si elle le souhaite, ou pour présenter des observations écrites. (...) " ;
5. Considérant que, contrairement à ce que soutient MmeB..., l'article R. 147-2 du code de la sécurité sociale ne prévoit aucune " mise en garde préalable ", distincte de la notification prévue par le I de cet article, dont il est constant qu'elle a été effectuée par courrier du 30 septembre 2010 ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner sa recevabilité, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 147-2 du code de la sécurité sociale n'est pas fondé ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale que " I. - Peuvent faire l'objet d'une pénalité prononcée par le directeur de l'organisme local d'assurance maladie : (...) 3° Les professionnels (...) de santé (...) " et que " (...) II. - La pénalité mentionnée au I est due pour : / 1° Toute inobservation des règles du présent code (...) ayant abouti à une demande, une prise en charge ou un versement indu d'une prestation en nature ou en espèces par l'organisme local d'assurance maladie. (...) " ; qu'ainsi, l'article R. 147-8 du même code, pris pour l'application de ces dispositions, pouvait légalement prévoir que " Peuvent faire l'objet d'une pénalité les professionnels de santé libéraux (...) : / (...) / 2° N'ayant pas respecté les conditions de prise en charge des actes produits ou prestations soumis au remboursement dans les cas suivants : / a) Non-respect des conditions de prise en charge ou prescription prévues lors de l'inscription au remboursement par l'assurance maladie des actes, produits ou prestations mentionnés aux articles L. 162-1-7, L. 162-17 et L. 165-1 (...). " ; que l'article L. 162-1-7 du même code auquel cette disposition renvoie prévoit que " La prise en charge ou le remboursement par l'assurance maladie de tout acte ou prestation réalisé par un professionnel de santé (...) est subordonné à leur inscription sur une liste établie dans les conditions fixées au présent article. (...) " et que " Les conditions d'inscription d'un acte ou d'une prestation, leur inscription et leur radiation sont décidées par l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (...) " ; qu'il en résulte que la pénalité prévue par l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale peut être infligée aux professionnels de santé à raison des remboursements d'actes inscrits sur la nomenclature générale des actes professionnels arrêtée par l'Union nationale des caisses d'assurance maladie mais effectués en méconnaissance des conditions fixées par cette nomenclature ; que l'article 11 du titre XVI (" Soins infirmiers ") de la nomenclature générale des actes professionnels définit, pour chacun des soins infirmiers effectués à domicile pour un patient en situation de dépendance temporaire ou permanente, s'agissant des actes infirmiers de soins (correspondant à la clé " AIS ") donnant lieu à l'application d'un coefficient de 3 sont les suivants : " II - Séance de soins infirmiers, par séance d'une demi-heure, à raison de 4 au maximum par 24 heures / La séance de soins infirmiers comprend l'ensemble des actions de soins liées aux fonctions d'entretien et de continuité de la vie, visant à protéger, maintenir, restaurer ou compenser les capacités d'autonomie de la personne. / La cotation forfaitaire par séance inclut l'ensemble des actes relevant de la compétence de l'infirmier réalisés au cours de la séance, la tenue du dossier de soins et de la fiche de liaison éventuelle. / (...) " ; qu'il résulte de cette nomenclature que la cotation AIS 3 correspond normalement à une séance de soins infirmiers d'une demi-heure ;
7. Considérant que si la nomenclature précitée ne prévoit pas que le nombre d'actes cotés AIS 3 effectués dans une journée soit égal ou inférieur à 34, elle impose néanmoins que la durée de cet acte soit de l'ordre d'une demi-heure ; qu'eu égard à la nature de ces actes, telle que rappelée au point précédent, et au temps de travail journalier d'une infirmière libérale, la caisse a donc pu considérer qu'au-delà de 34 actes cotés AIS 3 effectués dans une seule journée - ce qui supposait 17 heures de travail, déplacements non compris - les actes déclarés ne pouvaient être regardés comme réellement effectués dans des conditions respectant la nomenclature ; que MmeB..., qui se borne, sans plus de précision, à soutenir que " les relevés informatiques de la caisse primaire d'assurance maladie ne sont pas fiables " et " qu'elle ne peut donc pas s'en servir comme moyen de preuve ", ne conteste pas sérieusement le fait que la pénalité infligée a été calculée sur le montant des actes remboursés à compter du 34ème acte quotidien ; que les relevés dont elle fait état ont d'ailleurs été établis sur la base des informations télétransmises par MmeB... ; que si Mme B...indique que, pour la journée du 1er octobre 2009, la caisse soutiendrait à tort qu'elle aurait facturé 33 heures de soins alors qu'elle avait réalisé moins de 18 heures de soins, elle n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de ces allégations ; qu'au surplus, Mme B...a indiqué à la caisse primaire, par lettre du 29 octobre 2010, qu'elle ne contestait pas l'indu ; que la caisse primaire pouvait donc se fonder sur le caractère excessif du nombre d'actes pour infliger à Mme B...une pénalité assise sur le montant des sommes qui lui avaient été indument versées ; que, ce faisant, la caisse primaire n'a pas méconnu le principe selon lequel seul un texte peut fonder une sanction ;
8. Considérant, en quatrième lieu, que la procédure de sanction prévue par l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale est distincte et indépendante de la procédure de recouvrement de l'indu prévue par l'article L. 133-4 du même code ; que la sanction pouvait être prononcée, dès lors, en l'absence de délivrance par le directeur de la caisse primaire de la contrainte prévue par l'avant-dernier alinéa de ce dernier article et en l'absence de jugement du tribunal des affaires de la sécurité sociale ;
9. Considérant, en cinquième lieu, qu'en refusant de rembourser à un infirmier libéral les actes que ce dernier n'avait pu matériellement réaliser dans des conditions conformes à la nomenclature précitée, la caisse primaire d'assurance maladie se borne à exercer le pouvoir de contrôle et de sanction qu'elle retire de ces textes, et qui ne peut être assimilé à un lien de subordination impliquant " que soit requalifiés les rapports entre les infirmiers et la CPAM en contrat à durée indéterminée " ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision lui infligeant une sanction financière de 5 000 euros ;
Sur l'appel incident de la caisse primaire d'assurance maladie :
11. Considérant que la caisse primaire demande à la cour " d'infirmer partiellement le jugement attaqué en ce qu'il a statué sur les moyens de légalité externe, qui étaient irrecevables pour ne pas avoir été présentés avant l'expiration du délai de recours contentieux " puis " en les évoquant, de juger que l'ensemble de ces moyens sont irrecevables " ; que, toutefois, la caisse primaire n'a pas intérêt à faire appel du jugement attaqué, qui lui a donné satisfaction ; qu'au demeurant, le tribunal administratif pouvait, sans entacher son jugement d'irrégularité, rejeter comme infondés ces moyens alors même que ceux-ci étaient irrecevables ;
Sur l'application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative :
12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-2 du code de justice administrative : " Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux. / Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts. / Pourront toutefois les faits diffamatoires étrangers à la cause donner ouverture, soit à l'action publique, soit à l'action civile des parties, lorsque ces actions leur auront été réservées par les tribunaux et, dans tous les cas, à l'action civile des tiers. " ;
13. Considérant que l'utilisation des termes " malveillance " et " malveillant " pour désigner le comportement de la caisse primaire d'assurance maladie présente un caractère diffamatoire ; qu'il y a lieu de prononcer la suppression de ce terme ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie du Var, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme B...une somme de 1 500 euros à verser à la caisse primaire en remboursement des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1 : Les termes " malveillance " et " malveillant " employés par Mme B...dans sa requête d'appel sont supprimés.
Article 2 : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 3 : Mme B...versera à la caisse primaire d'assurance maladie une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et à la caisse primaire d'assurance maladie du Var.
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N° 12MA04329 2
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