Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 2 juin 2015 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ; et d'enjoindre au même préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 300 euros par jour de retard, à compter de la notification de la décision à intervenir.
Par un jugement n° 1501972 du 17 septembre 2015, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. A....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 29 septembre 2015 et le 8 avril 2016, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 17 septembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Vaucluse du 2 juin 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 300 euros par jour de retard, à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision faisant à l'exposant obligation de quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale qu'il tient des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnait celles de l'article 3 de la même convention ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnait les dispositions de l'article L. 511-4, 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnait celles du 6° et du 7° de l'article L. 313-11 du même code ;
- l'arrêté attaqué est entaché d'incompétence ;
- il est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle et familiale de l'exposant, ainsi que de ses conséquences sur cette dernière ;
- il porte atteinte aux droits fondamentaux de son enfant et méconnait les stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Une mise en demeure a été adressée au préfet de Vaucluse le 17 novembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 modifié en matière de séjour et d'emploi ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné M. Laurent Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Moussaron, président de la 6e chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Gautron,
- et les observations de Me C..., représentant M. A....
1. Considérant que M. A..., né le 1er janvier 1979 à Old Arif (Maroc) et de nationalité marocaine, déclare être arrivé en France au cours de l'année 2010, dans des conditions non précisées ; que le 20 octobre suivant, sa fille Inès est née de son union avec Mme D..., elle-même de nationalité française ; qu'il a déposé, le 29 avril 2014, une demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", en sa qualité d'un enfant français ; qu'il relève appel du jugement du 17 septembre 2015, par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation de l'arrêté du préfet de Vaucluse du 2 juin 2015, par lequel ce dernier lui a refusé la délivrance de ce titre de séjour et a ordonné son éloignement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 612-6 du code de justice administrative : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant. " ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. (...) " ;
4. Considérant que M. A..., qui a reconnu sa fille Inès par anticipation dès le 17 avril 2012, soutient contribuer effectivement à l'éducation et à l'entretien de cette dernière depuis sa naissance ; que ses affirmations sur ce point ne sont pas contredites par les pièces du dossier, notamment les justificatifs de paiements de la halte-garderie qui a accueilli l'enfant au cours des années 2014 et 2015, ainsi que plusieurs attestations de tiers suffisamment convergentes, précises et circonstanciées ; que dans ces conditions, M. A... a, en sa qualité de père de cet enfant, dont la nationalité française est également établie, droit à la délivrance d'un titre de séjour au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de leur méconnaissance par l'arrêté attaqué, en tant que celui-ci lui a refusé la délivrance d'un tel titre, doit être accueilli ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par leur jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation de cet arrêté ; qu'il est également fondé, par suite, à demander l'annulation desdits jugement et arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " ;
7. Considérant qu'aux regard des motifs exposés au point 3 du présent arrêt et en l'absence de changement dans les circonstances de fait, l'annulation prononcée par celui-ci implique nécessairement que le préfet de Vaucluse délivre un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à M. A..., dans un délai d'un mois à compter de sa notification ; qu'il y a lieu de le lui enjoindre ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, au profit de M. A..., une somme de 1 500 euros sur le fondement de ces dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 17 septembre 2015 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet de Vaucluse du 2 juin 2015 est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de Vaucluse de délivre à M. A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. A..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Carpentras.
Délibéré après l'audience du 19 mai 2016 où siégeaient :
- M. Marcovici, président,
- M. Ouillon, premier-conseiller,
- M. Gautron, conseiller,
Lu en audience publique, le 9 juin 2016.
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N° 15MA03986