Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2011 du préfet des Bouches-du-Rhône portant extension du périmètre de l'association syndicale autorisée (ASA) des arrosants du canal de Saint-Pons sur la commune de Gémenos.
Par un jugement n° 1107593 du 1er décembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 13 février 2015, sous le n° 15MA00640, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er décembre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2011 précité ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué devra être confirmé en ce qu'il a écarté l'exception de non-lieu opposée par le préfet des Bouches-du-Rhône ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tenant à l'insuffisance d'information résultant de l'ancienneté et du caractère obsolète des données communiquées aux futurs propriétaires ;
- tous les propriétaires n'ont pas pris part au vote du projet d'extension en méconnaissance de l'article 23 des statuts de l'association ;
- des votes ont été comptabilisés à tort en avis favorables ;
- la communauté urbaine Marseille Provence Métropole n'a pas pris part au vote du projet d'extension en violation des dispositions de l'article 68 du décret du 3 mai 2006 ;
- le tribunal a ajouté une condition à la qualité de membre d'une association syndicale qui n'est prévue ni par l'ordonnance du 1er juillet 2004 ni par le décret du 3 mai 2006 ;
- l'arrêté du 6 juillet 2011 prescrivant l'ouverture d'une enquête publique n'a pas été notifié aux futurs membres en méconnaissance de l'article 12 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 ;
- il n'est justifié ni du respect du délai de cinq jours ni de l'affichage dans toutes les communes tels que prévus par l'article 9 du décret du 3 mai 2006 ;
- il n'a pas été donné par l'association syndicale autorisée (ASA) une information complète, loyale et régulière sur le coût financier de la modification du projet ;
- aucun projet de statuts modificatifs n'a été établi par l'ASA ni annexé à la convocation de l'assemblée constitutive du 25 juin 2011, ni joint au dossier d'enquête publique ;
- une étude d'impact était nécessaire en raison de considérations environnementales inhérentes au projet ;
- le projet d'extension du périmètre de l'ASA méconnaît le principe d'égalité devant les charges publiques ;
- l'extension du périmètre de l'ASA aurait dû être autorisée par un acte déclarant d'utilité publique les travaux en vertu de l'article L. 215-13 du code de l'environnement ;
- le projet d'extension en ce qu'il implique la création d'un équipement public d'intérêt général n'entre pas dans l'objet de l'ASA.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 juin 2015, l'association syndicale autorisée (ASA) des arrosants du canal de Saint-Pons conclut au rejet de la requête de M. B... et demande à la Cour de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le moyen tiré de ce que tous les propriétaires n'ont pas pris part au vote est erroné ;
- les propriétaires n'ayant pas retourné de réponse écrite ou ayant retourné une formule de réponse n'indiquant pas le sens de leur vote ont pu être comptabilisés comme ayant donné leur accord au projet d'extension ;
- la communauté urbaine Marseille Provence Métropole (MPM) qui n'est pas membre de l'ASA et n'a pas le statut d'arrosant n'avait pas à être consultée dans le cadre de la procédure d'extension ni à participer à l'assemblée constitutive du 25 juin 2011 ;
- l'enquête publique a fait l'objet d'une publicité adéquate ;
- les nouveaux propriétaires de l'ASA ont été suffisamment informés sur les coûts de la modification envisagée ;
- le moyen relatif à l'absence de modification des statuts est inopérant en tant qu'il porte sur la publicité de l'arrêté en cause, qui est postérieure à son édiction et extérieure à sa légalité intrinsèque ;
- à titre subsidiaire, le requérant fait une interprétation particulièrement extensive de l'article 13 du décret du 3 mai 2006 ;
- aucune étude d'impact n'est nécessaire à l'extension en cause ;
- le moyen tiré de la rupture d'égalité est inopérant ;
- les travaux d'extension du périmètre de l'ASA n'ont pas à faire l'objet d'une déclaration d'utilité publique ;
- l'extension du périmètre querellée tendant à la mise sous pression d'un nouveau réseau de desserte en eau apparaît comme le complément naturel de l'objet de l'ASA.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 ;
- le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marchessaux,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,
- et les observations de Me A... représentant M. B... et de Me D... représentant l'ASA des arrosants du canal de Saint-Pons.
1. Considérant que M. B... relève appel du jugement en date du 1er décembre 2014 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 septembre 2011 du préfet des Bouches-du-Rhône portant extension du périmètre de l'ASA des arrosants du canal de Saint-Pons sur la commune de Gémenos ;
Sur l'exception de non-lieu opposée par le préfet des Bouches-du-Rhône en première instance :
2. Considérant qu'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif ; que si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du pourvoi dont il était saisi ; qu'il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution ; que, dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le pourvoi formé à son encontre, à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive ;
3. Considérant que si devant les premiers juges, le préfet des Bouches-du-Rhône a fait valoir que par un arrêté en date du 18 mars 2014, il a abrogé l'arrêté contesté, le tribunal a estimé à juste titre que cet arrêté avait reçu application par l'édiction d'une délibération, en date du 8 août 2012, modifiant les bases de répartition des dépenses et intégrant les nouveaux propriétaires et l'émission de titres exécutoires à leur encontre pour paiement des redevances syndicales ; que, par suite, l'exception de non-lieu opposée par le préfet des Bouches-du-Rhône doit être écartée ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 37 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 susvisée : " I. - Une proposition de modification statutaire portant extension du périmètre d'une association syndicale autorisée ou changement de son objet peut être présentée à l'initiative du syndicat, d'un quart des propriétaires associés, d'une collectivité territoriale ou d'un groupement de collectivités territoriales sur le territoire desquels s'étend ce périmètre ou de l'autorité administrative compétente dans le département où l'association a son siège. L'extension de périmètre peut également être engagée à la demande de propriétaires dont les immeubles ne sont pas inclus dans le périmètre. / La proposition de modification est soumise à l'assemblée des propriétaires. Lorsque la majorité, telle qu'elle est définie à l'article 14, des membres de l'assemblée se prononce en faveur de la modification envisagée, l'autorité administrative ordonne une enquête publique conformément aux dispositions de l'article 12. / Lorsqu'il s'agit d'étendre le périmètre, l'autorité administrative consulte les propriétaires des immeubles susceptibles d'être inclus dans le périmètre dans les conditions prévues aux articles 13 et 14. / II. (...) / III. - L'autorisation de modification des statuts peut être prononcée par acte de l'autorité administrative publié et notifié dans les conditions prévues à l'article 15. " ; qu'aux termes de l'article 67 du décret du 3 mai 2006 susvisé : " L'assemblée mentionnée aux articles 37 et 38 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 susvisée réunit l'ensemble des propriétaires membres de l'association, y compris ceux qui ne siègent pas à l'organe de l'association dénommé "assemblée des propriétaires" par l'article 18 de la même ordonnance. " ; que l'article 68 du même décret dispose que : " Lorsqu'une extension du périmètre de l'association syndicale est proposée dans les conditions prévues à l'article 37 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 susvisée, le préfet organise en premier lieu la consultation, prévue au troisième alinéa du même article, des seuls propriétaires des immeubles susceptibles d'être inclus dans le périmètre. (...) / Les propriétaires des immeubles susceptibles d'être inclus dans le nouveau périmètre participent à l'assemblée qui se prononce sur le projet d'extension de périmètre. " ; qu'aux termes de l'article 23 des statuts de l'association syndicale autorisée des arrosants du canal de Saint-Pons : " (...) L'assemblée des propriétaires qui se prononce sur les propositions de modification de l'objet ou du périmètre de l'association est composée par l'ensemble des propriétaires membres de l'association, y compris ceux ne siégeant pas à " l'assemblée des propriétaires ", organe de l'association au sens de l'article 18 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 " ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, plus particulièrement, des courriers de la consultation écrite des propriétaires concernés par l'extension du périmètre de l'ASA des arrosants du canal de Saint-Pons et de la convocation à l'assemblée constitutive, que la participation des nouveaux adhérents devait prendre la forme d'une redevance de 120 euros par an sur quatre ans ; que ces courriers faisaient, également, état d'une estimation financière des investissements en vue de la réalisation des travaux de mise sous pression du réseau de l'ASA dont un apport de l'association de 500 000 euros sous forme d'un prêt, ainsi que d'un budget prévisionnel nécessaire à la réalisation des trois premières phases du projet pour un coût total de 2,5 millions euros ; que, toutefois, il ressort de deux études réalisées, en 2006 et 2008 par la société des Eaux de Marseille (SEM) à la demande de l'ASA des arrosants du canal de Saint-Pons que le coût des trois phases du projet est de 5,4 millions d'euros dans le cas de l'hypothèse la plus basse et que le prix de la 1ère phase est évalué à 2,4 millions d'euros au lieu des 840 000 euros annoncés par l'ASA ; qu'ainsi, ces différences révèlent une sous-estimation manifeste des dépenses telles qu'elles pouvaient être raisonnablement appréciées à l'époque de la consultation de l'assemblée constitutive de l'ASA ; que cette sous-estimation de près de 116 % pour le coût total des travaux et de 65 % pour l'estimation de la phase 1 n'a pas permis une information sincère de l'ensemble des propriétaires consultés sur le projet d'extension du périmètre et a été de nature à les priver d'une garantie ; que dans ces conditions, ce vice de procédure entache d'illégalité la délibération de l'assemblée constitutive de l'ASA réunie le 25 juin 2011 et, par voie de conséquence, l'arrêté contesté du 26 septembre 2011 ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral en date du 26 septembre 2011 ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que M. B..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à l'association syndicale autorisée des arrosants du canal de Saint-Pons quelque somme que ce soit au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association syndicale autorisée des arrosants du canal de Saint-Pons la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 1er décembre 2014 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 26 septembre 2011 sont annulés.
Article 2 : L'association syndicale autorisée des arrosants du canal de Saint-Pons versera à M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de l'association syndicale autorisée des arrosants du canal de Saint-Pons tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B..., à l'association syndicale autorisée des arrosants du canal de Saint-Pons et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2016, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Pocheron, président-assesseur,
- Mme Marchessaux, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 juin 2016.
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N° 15MA00640