Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...-E... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision en date du 8 février 2013 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, l'a inscrit au répertoire des détenus particulièrement signalés et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1302537 du 29 septembre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 27 novembre 2015, M.B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 29 septembre 2015 ;
2°) d'annuler la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, en date du 8 février 2013 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision litigieuse est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le critère de personnalité violente ne relève pas de l'instruction ministérielle du 15 octobre 2012 ;
- le risque allégué d'évasion et ses prétendues relations avec la criminalité organisée ne sont aucunement établis ;
- la médiatisation des faits n'est pas au nombre des critères de la circulaire ministérielle du 18 décembre 2007.
Un courrier du 16 février 2016 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- la circulaire du 15 octobre 2012 relative à l'instruction ministérielle concernant les détenus particulièrement signalés ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience par un avis d'audience adressé le 9 mai 2016 portant clôture d'instruction immédiate en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.
Un mémoire présenté pour le garde des sceaux, ministre de la justice, a été enregistré le 13 mai 2016, postérieurement à la clôture d'instruction.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pocheron,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., substituant Me D..., représentant M. B....
1. Considérant que M. B...était incarcéré depuis le 19 avril 2012 au centre pénitentaire des Baumettes à Marseille en exécution d'un mandat de dépôt intervenu dans le cadre des poursuites dont il faisait l'objet devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence lorsque, le 8 février 2013, après avis favorable du 16 octobre 2012 de la commission nationale à fin d'inscription au répertoire des détenus particulièrement signalés (DPS), le garde des sceaux l'a inscrit à ce répertoire ; que M. B...a introduit un recours devant le tribunal administratif de Marseille en annulation de cette décision ; que, par le jugement attaqué, en date du 29 septembre 2015, dont l'intéressé relève appel par la présente requête, le tribunal a rejeté la demande ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article D. 276-1 du code de procédure pénale dans ses dispositions en vigueur à la date de la décision litigieuse : " En vue de la mise en oeuvre des mesures de sécurité adaptées, le ministre de la justice décide de l'inscription et de la radiation des détenus au répertoire des détenus particulièrement signalés dans des conditions déterminées par instruction ministérielle. " ; qu'aux termes du paragraphe 1.1.1 de la circulaire susvisée de la garde des sceaux du 15 octobre 2012 : " Les critères d'inscription au répertoire des détenus particulièrement signalés sont liés au risque d'évasion et à l'intensité de l'atteinte à l'ordre public que celle-ci pourrait engendrer ainsi qu'au comportement particulièrement violent en détention de certains détenus. Les personnes détenues susceptibles d'être inscrites au répertoire des DPS sont celles : 1° appartenant à la criminalité organisée locale, régionale, nationale ou internationale ou aux mouvances terroristes, appartenance établie par la situation pénale ou par un signalement des magistrats, de la police ou de la gendarmerie ; (...) /4° dont l'évasion pourrait avoir un impact important sur l'ordre public en raison de leur personnalité et / ou des faits pour lesquels elles sont écrouées ; / 5° susceptibles d'actes de grandes violences, ou ayant commis des atteintes graves à la vie d'autrui, des viols ou actes de torture et de barbarie ou des prises d'otage en établissement pénitentiaire. (...) " ;
3. Considérant que la décision contestée a été prise en raison de la personnalité violente de M. B...au regard des faits pour lesquels il faisait l'objet de poursuites judiciaires, des relations entretenues par l'intéressé avec la criminalité organisée itinérante du Sud de la France et des soutiens extérieurs dont il pourrait bénéficier à ce titre dans la perspective d'une tentative d'évasion, de la nécessité de sécuriser les extractions judiciaires à venir dans le cadre de l'instruction, et du grave trouble à l'ordre public qui résulterait de son évasion du fait de la médiatisation des faits pour lesquels il était mis en cause, notamment le meurtre d'un fonctionnaire de police de la brigade anti-criminalité (BAC) d'Aix-en-Provence ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...était, à la date de la décision en litige, poursuivi pour des faits intervenus les 27 et 28 novembre 2011 de vols avec violence commis en bande organisée, de détention et port d'arme sans autorisation, de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime, de meurtre, de meurtre d'une personne dépositaire de l'autorité publique et de tentatives de meurtres de personnes dépositaires de l'autorité publique, en l'espèce des agents de la BAC d'Aix-en-Provence ; qu'eu égard à la grande violence des faits qui étaient ainsi reprochés à l'intéressé, la garde des sceaux a pu à bon droit retenir la " personnalité violente " de M. B...au regard des premières dispositions précitées du 5° de l'article 1.1.1 de la circulaire du 15 octobre 2012, qui ne sont pas relatives au comportement du détenu en détention ; qu'il ressort des avis émis dans le cadre de la procédure devant la commission nationale des détenus particulièrement signalés que l'appartenance du requérant à la criminalité organisée du Sud de la France était établie par deux signalements de la direction générale de la police nationale et du procureur de la République conformément aux dispositions sus-rappelées du 1° de l'article 1.1.1 de la même circulaire ; que, sans qu'il soit besoin de démontrer l'existence d'un risque d'évasion, la ministre de la justice a pu légalement déduire de ses liens caractérisés avec la criminalité organisée que l'intéressé pourrait bénéficier de soutiens dans la perspective d'une tentative d'évasion ; que, compte tenu notamment de la mise en cause du requérant dans le meurtre d'un agent de la BAC d'Aix-en-Provence, une éventuelle évasion de M. B..., inévitablement médiatisée, pouvait avoir un impact important sur l'ordre public ainsi qu'il est prévu par les dispositions du 4° de l'article 1.1.1 de ladite circulaire, seules applicables à la date de l'acte querellé ; que, par suite, la garde des sceaux n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en décidant le 8 février 2013, d'inscrire M. B...au répertoire DPS ; que les circonstances qu'à la date de cette décision il n'avait jamais fait l'objet de condamnation pénale et qu'il devait être considéré comme présumé innocent sont sans incidence sur sa légalité ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. B...la somme que celui-ci réclame au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2016, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Pocheron, président-assesseur,
- Mme Hameline, premier conseiller.
Lu en audience publique le 27 juin 2016.
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N° 15MA04485