Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 6 janvier 2014 par laquelle le conseil municipal de la commune de Tressan a décidé de préempter les parcelles cadastrées section A n° 616 et 618, situées au lieu-dit Les Badiaux, ainsi que la décision du 7 mai 2014 portant rejet de son recours gracieux.
Par un jugement n° 1403199 du 24 mars 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 20 mai 2016, sous le n° 16MA01953, Mme A... représentée par Me B... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 24 mars 2016 ;
2°) d'annuler la délibération du 6 janvier 2014 et la décision du 7 mai 2014 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Tressan la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les convocations des conseillers municipaux sont irrégulières ;
- les conseillers municipaux ont reçu une information insuffisante en violation de l'article L. 2131-13 du code général des collectivités territoriales ;
- la délibération contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et aussi d'un détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 août 2016, la commune de Tressan conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marchessaux,
- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public.
1. Mme A... demande à la Cour d'annuler le jugement du 24 mars 2016 du tribunal administratif de Montpellier, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 6 janvier 2014 par laquelle le conseil municipal de la commune de Tressan a décidé de préempter les parcelles cadastrées section A n° 616 et 618, situées au lieu-dit Les Badiaux, ainsi que la décision du 7 mai 2014 portant rejet de son recours gracieux.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, sous quelque forme que ce soit, au domicile des conseillers municipaux, sauf s'ils font le choix d'une autre adresse. ". Aux termes de l'article L. 2121-11 du même code : " Dans les communes de moins de 3 500 habitants, la convocation est adressée trois jours francs au moins avant celui de la réunion. (...) ".
3. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il ressort des mentions de la délibération contestée que le conseil municipal a été régulièrement convoqué le 31 décembre 2013, soit dans le respect du délai de trois jours francs prévu par l'article L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales. Ces mentions sont confortées par une attestation établie par le premier adjoint au maire qui certifie avoir distribué, le mardi 31 décembre 2013, les convocations pour la séance du conseil municipal du 6 janvier 2014, ainsi que par trois autres attestations de conseillers municipaux attestant avoir trouvé dans leur boîte aux lettres, dans le délai réglementaire, cette convocation, accompagnée d'un document préparatoire. Si Mme A... critique leur caractère probant en raison des liens unissant les témoins à la municipalité, ces attestations font foi jusqu'à preuve contraire, qui en l'espèce n'est pas rapportée. Du reste et contrairement aux allégations de la requérante, les attestations produites en appel font apparaître des calligraphies différentes et sont toutes assorties des pièces d'identité correspondantes. En outre, la commune de Tressan produit une lettre du département de l'Hérault, du 11 août 2016, relevant que son service instructeur l'a informé de la vente des parcelles en litige le 27 décembre 2013. Ainsi, la circonstance que la déclaration d'intention d'aliéner établie le 4 décembre 2013 ait été notifiée le 2 janvier 2014 à la commune de Tressan, soit postérieurement à l'envoi des convocations est sans incidence sur la légalité de la délibération contestée. Dès lors, et en l'absence de tout élément contredisant ces pièces, le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 2121-10 et L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales doit être écarté.
4. En vertu des dispositions de l'article L. 2112-13 du code général des collectivités territoriales, tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération.
5. Il ressort des attestations mentionnées au point 3 que la convocation à la séance du conseil municipal du 6 janvier 2014 était assortie d'un document préparatoire informant les conseillers municipaux de ce que la commune de Tressan a été destinataire d'une déclaration d'intention d'aliéner concernant les parcelles A 616 et A 618 que son maire proposait de préempter au prix de 2 509,20 euros. Elle précisait, également, que ce dernier souhaitait créer un espace mettant en valeur les paysages avec l'implantation d'une table d'orientation. Ainsi, les conseillers municipaux ont bénéficié d'une information suffisante sur le projet de préemption des parcelles A 616 et A 618, conformément aux dispositions de l'article L. 2112-13 du code général des collectivités territoriales.
6. Aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires ". Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération.
7. Il est constant qu'un conseiller municipal ayant été présent à la séance du 6 janvier 2014 et son épouse se sont portés acquéreurs des deux parcelles en litige lesquelles jouxtent leur propriété. Cependant, le notaire a retenu l'offre de Mme A... qu'il a estimé la mieux disante. Ainsi, comme le fait valoir la commune de Tressan, ce conseiller municipal ne pouvait plus acquérir ces deux parcelles. Si la requérante se prévaut des pressions exercées par ce conseiller municipal sur le notaire, il résulte d'un courriel du 17 février 2016 versé au débat que le notaire aurait estimé que ces propos n'engageaient qu'elle. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé aurait exercé une influence sur le conseil municipal pour des motifs d'intérêt personnel. Par suite le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales doit être écarté.
8. Il ressort des pièces du dossier que la préemption contestée est justifiée par la protection et la mise en valeur des coteaux des Badiaux. Si Mme A... soutient que ces objectifs résultent déjà du classement des terrains en zone N et en espace boisé classé, il n'est pas établi que cette circonstance permettrait de réaliser l'opération d'aménagement des parcelles A 616 et A 618 dans des conditions équivalentes. Enfin, l'appelante n'établit pas que les paysages environnants seraient cachés une bonne partie de l'année par le feuillage des platanes ni que ces parcelles étant relativement distantes du centre du village, peu de personnes s'y déplaceront. Il s'en suit que le conseil municipal de Tressan n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en approuvant la délibération du 6 janvier 2014.
9. Il ressort du rapport annexé à la délibération contestée que l'opération de préemption en litige s'inscrit dans le cadre de la protection et la mise en valeur des coteaux des Badiaux. Dans ce but, les parcelles A 616 et A 618 présentent un intérêt particulier du point de vue de leur situation sur les hauteurs du versant Ouest de ces coteaux, sur le chemin des Fontanilles, qui offre un panorama sur les plaines viticoles, le fleuve Hérault, les collines du Clermontois, du Lodévois et du Biterrois. En outre, la préemption en litige a pour objet de permettre l'aménagement de ces deux parcelles par l'implantation d'une table d'orientation, l'élaboration de panneaux de sensibilisation et d'information sur les paysages et la mise à disposition des visiteurs de tables et de bancs. La circonstance que ce rapport n'ai été rédigé que le 24 février 2014, en vu de sa notification à Mme A... le même jour n'est pas de nature à établir que la commune de Tressan aurait eu pour but de l'empêcher d'acquérir ces parcelles. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit aux points 3 et 5, la commune justifie avoir pris connaissance de la déclaration d'intention d'aliéner au plutôt le 27 décembre 2013 et trois conseillers municipaux ont attesté avoir reçu le document préparatoire avec la convocation, préalablement à la séance du 6 janvier 2014. Si la requérante soutient que la collectivité n'a pas donné suite à la préemption, cette dernière produit un arrêté du 23 juin 2014 portant consignation de la somme de 2 450 euros correspondant à l'achat des deux parcelles et mentionnant qu'elle n'a pas pu à ce jour signer l'acte de vente. La circonstance que le notaire aurait souhaité demander la rétrocession des terrains en application de l'article L. 213-14 du code de l'urbanisme, aux termes duquel le prix du bien doit être réglé dans les six mois par le titulaire du droit de préemption est sans incidence sur la légalité de la délibération contestée dès lors que l'appréciation d'un tel litige ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune de Tressan aurait poursuivi un but étranger à l'intérêt général. Ainsi, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Tressan, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à Mme A... quelque somme que ce soit au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme A... la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Tressan et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Mme A... versera à la commune de Tressan une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... et à la commune de Tressan.
Délibéré après l'audience du 19 février 2018, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président-assesseur,
- Mme Marchessaux, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 mars 2018.
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N° 16MA01953