Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de l'admettre au séjour, l'a l'obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 1606393 du 7 mars 2017, le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à sa demande et a annulé l'arrêté du 8 décembre 2016 du préfet de l'Hérault.
Procédure devant la Cour :
Par un recours, enregistré le 7 avril 2017, le préfet de l'Hérault demande à la Cour d'annuler ce jugement du 7 mars 2017 du tribunal administratif de Montpellier.
Il soutient que le refus de titre de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale de Mme A... ;
Vu le mémoire présenté pour Mme A..., représentée par Me B..., enregistré par télécopie le 9 juin 2017 ;
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi, signé à Rabat le 9 octobre 1987 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné Mme Évelyne Paix, président assesseur, pour présider par intérim la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Sauveplane a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que le préfet de l'Hérault relève appel du jugement du 7 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à la demande de Mme A... et annulé l'arrêté du 8 décembre 2016 par lequel il avait refusé de l'admettre au séjour, l'avait l'obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;
Sur la recevabilité du mémoire en défense :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative : " Les parties et mandataires inscrits dans l'application doivent adresser tous leurs mémoires et pièces au moyen de celle-ci, sous peine de voir leurs écritures écartées des débats à défaut de régularisation dans un délai imparti par la juridiction. " ; qu'à ceux de l'article R. 611-8-3 du même code : " La partie est réputée avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception du courrier, à l'issue de ce délai... " .
3. Considérant que le conseil de Mme A... a adressé à la Cour un mémoire en défense le 9 juin 2017 par télécopie ; que, par courrier du 28 septembre 2017, le greffe de la Cour a invité le conseil de Mme A... à régulariser sa production par le biais de l'application " Télérecours " ; que le courrier a été mis à disposition du conseil de Mme A... le même jour ; que ce dernier est donc réputé avoir pris connaissance de ce courrier au plus tard le 13 octobre 2017 ; que le conseil n'a pas régularisé sa requête dans le délai de quinze jours avant la clôture d'instruction intervenue le 7 novembre 2017 ; que, dès lors, le mémoire enregistré le 9 juin 2017 doit être écarté des débats ;
Sur les conclusions du préfet du l'Hérault :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
5. Considérant qu'en application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de refuser un titre de séjour et de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que ces mesures porteraient à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure d'éloignement, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;
6. Considérant que pour annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault, les premiers juges ont relevé que Mme A..., ressortissante marocaine, vivait en France depuis environ deux ans et demi et y était mariée depuis quatre ans à un compatriote en situation régulière avec lequel elle a eu deux enfants nés sur le territoire français en août 2015 et septembre 2016 et que son époux, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 28 avril 2023 et bénéficiaire d'un contrat à durée indéterminée en qualité de carreleur, avait vocation à demeurer sur le territoire français ; que toutefois, Mme A... qui produit uniquement une ordonnance médicale datée de novembre 2014, une carte d'aide médicale d'Etat valable du 23 mars 2016 au 22 mars 2017, et une attestation d'hébergement de 2016, ne justifie ni de la date de son entrée en France, ni de la permanence de sa présence en France aux cotés de son époux depuis son entrée supposée en 2014 ; qu'elle ne justifie ni de l'ancienneté ni de la stabilité de sa présence en France, que, par suite, le préfet de l'Hérault est fondé à soutenir que le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français n'ont pas porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ils ont été pris ;
7. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les moyens de Mme A... soulevés devant le tribunal administratif de Montpellier ;
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
8. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté contesté est signé pour le préfet de l'Hérault par M. Pascal Othéguy, secrétaire général de la préfecture de l'Hérault ; que, par un arrêté du 3 novembre 2016 régulièrement publié, le préfet de l'Hérault a donné à M. Pascal Othéguy une délégation à l'effet de signer, notamment, toutes les décisions relatives au séjour et à la police des étrangers ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté ;
9. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté du préfet de l'Hérault vise les dispositions applicables et mentionne les faits sur lesquels il est fondé, et notamment les différentes circonstances relatives à la situation personnelle de Mme A..., et les raisons pour lesquelles le préfet n'a pas estimé devoir admettre cette dernière au séjour ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisante motivation du refus de séjour doit être écarté ; qu'il ne ressort ni des motifs de la décision attaquée, propres à la situation personnelle de Mme A..., ni des autres pièces du dossier que le préfet de l'Hérault n'aurait pas procédé à un examen réel et complet de la demande de l'intéressée ; que par suite le moyen invoqué ne peut qu'être écarté ;
10. Considérant, en troisième lieu, que si Mme A... soutient que le refus de titre de séjour a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au regard de sa présence en France et de sa vie privée et familiale établie sur le territoire français, les moyens doivent toutefois être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de la requérante ;
11. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) " ;
12. Considérant qu'il ne résulte pas des pièces du dossier, que des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiaient l'admission de Mme A... au séjour ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
13. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
14. Considérant, toutefois, que le refus de séjour opposé à Mme A... n'a ni pour objet ni pour effet de la séparer de ses enfants ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation de ces stipulations ne peut qu'être écarté ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :
15. Considérant que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision d'obligation de quitter le territoire français doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8 ;
16. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 ;
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :
17. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité (...) ; L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français... " ;
18. Considérant qu'il résulte des termes mêmes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que seule la décision refusant à l'étranger un délai de départ volontaire de trente jours doit être motivée ; qu'à l'inverse, le refus implicite d'accorder un délai supérieur au délai de trente jours laissé par la loi à l'étranger pour satisfaire à l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une quelconque motivation ; qu'en l'espèce, en refusant d'accorder à Mme A... un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, le préfet de l'Hérault n'a commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation ;
19. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Hérault est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé son arrêté du 8 décembre 2016 refusant l'admission au séjour de Mme A..., lui enjoignant de quitter le territoire français, et fixant le pays de destination ; que, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1606393 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Mme C...A....
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 5 avril 2018, où siégeaient :
- Mme Paix, président assesseur, président de la formation de jugement par intérim,
- M. Haïli, premier-conseiller,
- M. Sauveplane, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 19 avril 2018.
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N° 17MA1496