Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1403336 du 2 décembre 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 6 février 2017, M. et Mme C..., représentés par Me B..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 décembre 2016 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de prononcer les décharges demandées ;
3°) d'ordonner le sursis de paiement des impositions en litige.
Ils soutiennent que :
- la procédure est irrégulière dès lors que l'administration ne les a pas informés de la teneur et de l'origine des renseignements obtenus de tiers dans l'exercice de son droit de communication, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;
- en réponse à la demande d'éclaircissements et de justifications adressée par l'administration, ils ont justifié que des encaissements sur leurs comptes bancaires provenaient de dépôts d'espèces de compte à compte ; ils ont également justifié que certaines sommes correspondaient à des prêts sur gage ;
- les sommes taxées dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée correspondent à des prêts personnels ;
- l'administration ne démontre que la somme de 11 000 euros inscrite au crédit du compte courant de Mme C..., qui n'est devenue associée de la SARL SMPF Manosque qu'en décembre 2010, constitue un revenu distribué au sens de l'article 111 c du code général des impôts ;
- les sommes de 17 200 euros pour 2009 et de 69 898 euros pour 2010 correspondant à des chèques émis par des clients de la société SARL SMPF Manosque et encaissés sur leurs comptes personnels, ne sont pas des revenus distribués au sens de l'article 109-1-1 du code général des impôts, mais des prêts qui leur ont été consentis à titre personnel par ces clients.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 août 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient, à titre principal, que la requête est irrecevable et, à titre subsidiaire, que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Courbon,
- les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant M. et Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C... ont été assujettis, au titre des années 2008 à 2010, à des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales, assorties de pénalités. Ils relèvent appel du jugement du 2 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". L'obligation ainsi faite à l'administration fiscale d'informer le contribuable de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a utilisés pour procéder à des rectifications a pour objet de permettre à celui-ci, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, afin qu'il puisse vérifier l'authenticité de ces documents et en discuter la teneur ou la portée.
3. La proposition de rectification du 9 juillet 2012, relative aux années 2009 et 2010, qui sont les seules pour lesquelles les rehaussements résultent de la mise en oeuvre, par l'administration, du droit de communication, mentionne que ce droit a été exercé auprès du tribunal de grande instance de Digne les Bains, des établissements bancaires et du notaire des époux C...et précise, pour chacun d'eux, la liste des éléments et documents demandés. S'agissant du tribunal de grande instance, la mention du dossier d'instruction était suffisante pour assurer l'information des contribuables, quand bien même le détail des pièces contenues dans ce dossier n'était pas précisé. Dans ces conditions, les requérants ont été mis en mesure de demander la communication des éléments obtenus par l'administration dans le cadre du droit de communication. Il n'est, au demeurant, pas contesté que les requérants se sont abstenus de demander, avant la mise en recouvrement, communication de ces éléments. Par suite, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ont été méconnues.
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
En ce qui concerne les rehaussements opérés dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée :
4. Aux termes de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales : " (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. ". L'article L. 192 du même livre prévoit que la charge de la preuve incombe au contribuable " en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 ".
5. Il résulte de l'instruction que pour justifier de certains dépôts de sommes en espèces sur leurs comptes bancaires, M. et Mme C..., qui font valoir qu'il s'agit de dépôts de compte à compte ou de produits de prêts sur gages qui leur auraient été consentis, se réfèrent aux justifications apportées au cours du contrôle dont ils ont fait l'objet. S'agissant des dépôts de compte à compte, les extraits de comptes bancaires produits ne permettent pas de démontrer que les sommes retirées en espèces sur un compte seraient celles effectivement déposées en espèces sur un autre, en l'absence de toute corrélation entre le montant des sommes retirées et déposées, quand bien même les dates des opérations seraient proches. S'agissant des prêts sur gages, les documents, non nominatifs, établis par le Crédit municipal de Marseille ne permettent pas de démontrer que M. et Mme C... auraient été bénéficiaires de ces prêts, dont les montants, par ailleurs, ne correspondent pas à ceux déposés sur leurs comptes bancaires. Enfin, si les requérants font valoir que des sommes encaissées en espèce ou par chèques résulteraient de prêts obtenus " dans leur sphère privée ", ils n'apportent aucun élément de preuve à l'appui de cette allégation. Par suite, c'est à bon droit que les sommes dont il s'agit ont été regardées comme des revenus d'origine indéterminée au titre des années 2009 et 2010 taxables d'office à l'impôt sur le revenu sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales.
En ce qui concerne les rehaussements opérés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers :
6. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c) Les rémunérations ou avantages occultes (...) " ;
7. M. et Mme C... n'ont pas accepté les rehaussements découlant du rattachement à leur revenu global des sommes considérées comme distribuées sur le fondement des dispositions citées. Dans ces conditions, et en vertu des principes qui gouvernent la dévolution de la charge de la preuve dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire, il incombe à l'administration de prouver, d'une part, l'existence des bénéfices qui auraient été distribués par la société et le montant des sommes qui auraient été attribuées aux associés personnellement, d'autre part la réalité de l'appréhension de ces mêmes sommes.
8. L'administration fiscale soutient, en premier lieu, que les crédits de 17 200 euros en 2009 et de 69 898 euros en 2010, encaissés sur les comptes personnels des requérants, correspondent à des encaissements de chèques émis par des clients habituels de la SARL SMPF Manosque et constituent, dès lors, des recettes omises de la société. M. et Mme C..., qui se bornent à soutenir que ces sommes correspondent à des prêts qui leur auraient été consentis à titre personnel par ces mêmes clients, sans en justifier, ne contredisent pas utilement l'administration. Dans ces conditions, et alors que les sommes dont il s'agit ont été créditées sur leurs comptes personnels, l'administration doit être regardée comme établissant qu'elles constituent des revenus distribués au sens des dispositions précitées.
9. Il est constant qu'une somme de 11 000 euros a été inscrite au crédit du compte 467200 intitulé " Mme A... C..." dans les écritures de la société SMPF et que l'intéressée était, au 31 décembre 2010, associée de cette société. Dans ces conditions, en se bornant à soutenir que Mme C... n'est devenue associée de la société qu'à compter du 8 décembre 2010, les requérants, qui ne précisent ni la nature, ni l'origine de cette somme, n'apportent aucun élément de nature à contredire utilement l'administration permettant de retenir que la somme inscrite au crédit de ce compte nominatif n'aurait pas été appréhendée par Mme C..., qui, en tant qu'associée, a été désignée par la SARL SMPF Manosque, sur invitation qui lui en avait été faite par l'administration, en application des dispositions de l'article 117 du code général des impôts, comme une des bénéficiaires des revenus distribués par cette société identifiés par l'administration. Par suite, l'administration doit être regardée comme établissant que la somme de 11 000 euros constitue un revenu distribué à Mme C... au sens des dispositions précitées du c de l'article 111 du code général des impôts.
Sur les conclusions à fin de sursis de paiement :
10. Un sursis légal de paiement accordé en application des dispositions de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales n'a de portée que pendant la durée de l'instruction de la réclamation et de l'instance devant le tribunal administratif. Aucune disposition légale n'a prévu une procédure de sursis de paiement des impositions contestées pendant la durée de l'instance devant la cour administrative d'appel. Par suite, M. et Mme C... ne sont pas fondés à demander à la Cour de prononcer en leur faveur le bénéfice du sursis de paiement des impositions en litige.
11. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'action et des comptes publics, que M. et Mme C... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Marseille, par le jugement attaqué, a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010 ainsi que des pénalités correspondantes.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre Mer.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2018, où siégeaient :
- Mme Mosser, présidente,
- Mme Paix, présidente assesseure,
- Mme Courbon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 novembre 2018.
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N° 17MA00500