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25/03/2019 | FRANCE | N°19MA00372

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des référés, 25 mars 2019, 19MA00372


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes, sous le n° 1800831, d'annuler l'arrêté du 15 février 2018 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays de destination.

Mme A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, sous le n° 1803453, d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2018 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obl

igation de quitter le territoire français dans le délai de 90 jours et a fixé le pays de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes, sous le n° 1800831, d'annuler l'arrêté du 15 février 2018 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays de destination.

Mme A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, sous le n° 1803453, d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2018 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 90 jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1800831, 1803453 du 20 décembre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et le mémoire en réplique, enregistrés le 22 janvier 2019 et le 18 mars 2019, Mme A..., représentée par Me Canetti, demande à la Cour :

1°) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 20 décembre 2018, ainsi que de l'arrêté du 3 octobre 2018 du préfet de Vaucluse ;

2°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

3°) de mettre le versement à son conseil de la somme de 1 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'exécution du jugement attaqué, qui rend possible celle de l'arrêté contesté, risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables pour sa fille et pour elle-même ;

- les décisions contestées méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elles méconnaissent les dispositions de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elles méconnaissent l'intérêt supérieur de l'enfant qui est protégé par les stipulations de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elles méconnaissent les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur de droit en estimant qu'il lui appartenait de demander aux Etats-Unis d'Amérique d'assurer la protection de sa fille ;

- la preuve d'un risque élevé d'excision est rapportée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2019, le préfet de Vaucluse conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la demande de sursis à exécution du jugement du 20 décembre 2018 du tribunal administratif de Nîmes, en tant qu'il rejette les conclusions de Mme A...dirigées contre le refus de lui délivrer un titre de séjour, le jugement en litige ne pouvant entraîner sur ce point aucune mesure d'exécution.

Par un mémoire, enregistré le 12 mars 2019, Mme A... a présenté des observations en réponse à cette mesure d'information.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir présenté son rapport au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 811-14 du code de justice administrative, " Sauf dispositions particulières, le recours en appel n'a pas d'effet suspensif s'il n'en est autrement ordonné par le juge d'appel dans les conditions prévues par le présent titre ". L'article R. 811-17 de ce code prévoit que " le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction ".

2. Mme A... a fait appel du jugement du 20 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes d'annulation des arrêtés du 15 février 2018 et du 3 octobre 2018 du préfet de Vaucluse refusant de l'admettre au séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans les délais respectivement de 30 et 90 jours et fixant le pays de destination. La requérante demande à la Cour qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

3. En tant qu'il rejette les conclusions de Mme A... dirigées contre le refus de lui délivrer un titre de séjour, le jugement en litige ne peut entraîner aucune mesure d'exécution susceptible de faire l'objet du sursis prévu à l'article R. 811-17 du code de justice administrative. Les conclusions que Mme A... présente à cette fin ne sont dès lors par recevables.

4. En l'état de l'instruction, aucun des moyens énoncés dans la requête ne paraît sérieux et de nature à justifier l'annulation de la décision par laquelle le préfet de Vaucluse a fait obligation à Mme A... de quitter le territoire français. Les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 20 décembre 2018 du tribunal administratif de Nîmes, en tant qu'il rejette la demande d'annulation de la mesure d'éloignement présentée par la requérante, ne peuvent qu'être rejetées.

5. L'article 3 de l'arrêté du 3 octobre 2018 du préfet de Vaucluse dispose que Mme A... pourra, à l'expiration du délai de 90 jours qui lui a été imparti pour quitter le territoire français, être reconduite d'office à la frontière à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel elle établit être légalement admissible. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressée soit légalement admissible dans un pays autre que le Mali, pays dont elle a la nationalité.

4. Mme A... soutient sans être contredite que son mari appartient à l'ethnie Sénoufo, et, qu'en 2013, elle a soustrait sa fille, alors âgée de quatre ans, à l'excision que sa belle-famille avait organisée. Il ressort des pièces du dossier que l'ethnie Sénoufo et le Mali sont marqués par une forte prévalence de l'excision et que la requérante en a elle-même été victime. La mise à exécution de la décision fixant le Mali comme pays à destination duquel Mme A... est susceptible d'être éloignée d'office est ainsi susceptible d'exposer la fille de la requérante au risque, soit de subir cette pratique au cas où elle accompagnerait sa mère au Mali, soit d'être séparée de sa mère avec laquelle elle vit sur le territoire national depuis l'année 2016. Ainsi, le moyen tiré de ce que cette décision méconnaît les stipulations du § 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant paraît sérieux en l'état de l'instruction.

5. Il résulte de ce qui a été indiqué au point précédent que l'éloignement de Mme A... vers le Mali, rendu possible par l'exécution du jugement du 20 décembre 2018 du tribunal administratif de Nîmes, risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables pour la fille de la requérante.

6. Il y a lieu, par suite, d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution, dans cette mesure, du jugement attaqué.

7. L'exécution de la présente ordonnance n'implique pas qu'un titre de séjour soit délivré à Mme A....

8. Eu égard aux circonstances de l'espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'admission provisoire de Mme A... à l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me Canetti, avocate de Mme A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et sous réserve de l'admission définitive de sa cliente à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Canetti de la somme de 1 000 euros.

ORDONNE :

Article 1er : Mme A... est admise, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Jusqu'à ce qu'il soit statué sur l'appel de Mme A... contre le jugement du 20 décembre 2018 du tribunal administratif de Nîmes, il sera sursis à l'exécution de ce jugement en tant qu'il rejette la demande d'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 15 février 2018 du préfet de Vaucluse fixant le Mali comme pays à destination duquel Mme A... pourra être éloignée d'office.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.

Article 4 : Sous réserve de l'admission définitive de Mme A... à l'aide juridictionnelle et sous réserve que Me Canetti renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, ce dernier versera à Me Canetti, avocate de Mme A..., une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B...A..., à Me Canetti et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de Vaucluse.

Fait à Marseille, le 25 mars 2019.

2

N° 19MA00372


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 19MA00372
Date de la décision : 25/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Règles de procédure contentieuse spéciales.

Procédure - Voies de recours - Appel - Conclusions recevables en appel - Conclusions incidentes.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Thierry VANHULLEBUS
Rapporteur public ?: test
Avocat(s) : CANETTI

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-03-25;19ma00372 ?
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