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18/06/2020 | FRANCE | N°18MA00942

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 18 juin 2020, 18MA00942


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 171-173 rue Sainte 13007 Marseille, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 20 avenue de la Corse 13007 Marseille, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 18 avenue de la Corse 13007 Marseille, la SARL Camille Développement Foncier, la SCI Albert, la SCI Corse, M. et Mme H..., M. F... et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les arrêtés des 4 novembre 2014 et 29 juillet 2015 par lesquels le maire de Marseill

e a délivré à la SAS Bourbon un permis de construire et un permis de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 171-173 rue Sainte 13007 Marseille, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 20 avenue de la Corse 13007 Marseille, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 18 avenue de la Corse 13007 Marseille, la SARL Camille Développement Foncier, la SCI Albert, la SCI Corse, M. et Mme H..., M. F... et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les arrêtés des 4 novembre 2014 et 29 juillet 2015 par lesquels le maire de Marseille a délivré à la SAS Bourbon un permis de construire et un permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 1502102 1507758 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 février 2018, la commune de Marseille, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 décembre 2017 ;

2°) à titre subsidiaire de réformer le jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 décembre 2017 en tant qu'il a annulé totalement le permis de construire du 4 novembre 2014 et le permis de construire modificatif du 29 juillet 2015, et de limiter en conséquence l'annulation de ces permis en tant que la façade Est du projet sur la rue du commandant Lamy méconnaît l'article Uap 6 du règlement du plan local d'urbanisme ;

3°) de rejeter les requêtes du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 171-173 rue Sainte 13007 Marseille, du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 20 avenue de la Corse 13007 Marseille, du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 18 avenue de la Corse 13007 Marseille, de la SARL Camille Développement Foncier, de la SCI Albert, de la SCI Corse, de M. et Mme H..., de M. F... et de Mme C... ;

4°) de mettre à la charge du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 171-173 rue Sainte 13007 Marseille, du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 20 avenue de la Corse 13007 Marseille, du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 18 avenue de la Corse 13007 Marseille, de la SARL Camille Développement Foncier, de la SCI Albert, de la SCI Corse, de M. et Mme H..., de M. F... et de Mme C... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de fait et une erreur de droit s'agissant de l'article UAP 6 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- à titre subsidiaire les permis de construire ne doivent être annulés que partiellement ;

- les moyens invoqués en première instance étaient infondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 mars 2020, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 171-173 rue Sainte 13007 Marseille, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 20 avenue de la Corse 13007 Marseille, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 18 avenue de la Corse 13007 Marseille, la SARL Camille Développement Foncier, la SCI Albert, la SCI Corse, M. et Mme H... et M. F..., représentés par Me D..., concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Marseille la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- ils ont intérêt pour agir ;

- le pétitionnaire n'a pas qualité pour déposer la demande de permis de construire ;

- le projet méconnait l'article Uap 6 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- le projet ne respecte pas l'emplacement réservé n° 07-21 ;

- il existe une offre de concours illégale et le projet est entaché de détournement de pouvoir.

Le mémoire présenté par la commune de Marseille le 5 mai 2020 n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Baizet, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,

- et les observations de Me B... pour la commune de Marseille.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Marseille relève appel du jugement du 29 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé les arrêtés des 4 novembre 2014 et 29 juillet 2015 par lesquels le maire de Marseille a délivré à la SAS Bourbon un permis de construire et un permis de construire modificatif portant sur l'édification d'un immeuble de bureau d'une surface de plancher de 5 061 m² situé 165 rue Sainte.

Sur la fin de non-recevoir opposée en première instance :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ". Aux termes de l'article L. 600-1-3 du même code : " Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire (...) s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. D'une part, ainsi que l'a relevé à bon droit le tribunal administratif, M. et Mme H..., M. F..., Mme C..., la SARL Camille Développement Foncier, la SCI Albert et la SCI Corse n'établissent pas leur qualité de voisins immédiats du projet et ne justifient pas d'un intérêt pour agir. D'autre part et toutefois, les syndicats des copropriétaires des immeubles situés 171-173 rue Sainte, 18 et 20 avenue de la Corse justifient de la qualité de représentants des copropriétaires de ces biens. Ces syndicats, qui ont la qualité de voisins immédiats du projet situé 165 rue Sainte, soutiennent que le projet, portant sur une surface de plancher de 5061 m², va créer des vues sur leurs fonds, réduire l'ensoleillement et modifier la physionomie du voisinage immédiat. Ils soutiennent également que la création d'une voie et d'un parking va engendrer une circulation, du bruit et de la pollution supplémentaires. Dans ces conditions, les syndicats de copropriétaires justifient d'un intérêt à demander l'annulation du permis de construire délivré le 4 novembre 2014, ainsi que du permis de construire modificatif délivré le 29 juillet 2015 au cours du contentieux de première instance afin notamment de régulariser des vices constatés par les copropriétaires.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. En premier lieu, aux termes de l'article UAp 6 du règlement du plan local d'urbanisme : " 6.1 Les constructions à édifier sont implantées à la limite des alignements imposés, lorsqu'ils sont indiqués sur les documents graphiques. 6.1 A défaut desdites indications, les constructions à édifier sont implantées, sur toute la hauteur de la façade, à la limite des voies et emprises publiques futures ou du recul, telle que portée aux documents graphiques du PLU, ou à défaut, à la limite des voies et emprises publiques existantes ". Aux termes des dispositions générales du plan local d'urbanisme : " Emprise publique : espace public autre que les voies. Exemple : les parcs, les squares (...) Interruption de façade : elle est réalisée lorsqu'elle porte à la fois sur la totalité de la hauteur et la totalité de la profondeur des constructions considérées ".

6. D'une part, les dispositions précitées ne sont pas applicables à la façade sud donnant sur la voie privée à créer. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que les façades Nord et Est donnant sur le square sont implantées, sur toute leur hauteur, à la limite des voies et du square précités. Les percements prévus sur ces façades, permettant les ouvertures des loggias situées en retrait de façade ainsi que des vides architecturaux limités, ne peuvent être qualifiés de décrochés ou d'interruption de façade et ne modifient pas l'implantation des façades en limite. S'agissant de la façade Nord, donnant sur la rue Sainte, et de la façade Est, donnant sur la rue du commandant Lamy, ces façades comportent également des percements limités permettant notamment l'ouverture des loggias. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la façade Est, donnant sur la rue du commandant Lamy, comporte, en milieu de façade, un percement très important se prolongeant jusque dans la toiture, créant ainsi une rupture du front bâti. La façade Nord, donnant sur la rue Sainte, comporte également, au dernier étage et en limite du bâtiment adjacent, un percement important créant une rupture du front bâti. Ces façades méconnaissent donc les dispositions précitées et la commune de Marseille n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a considéré que ce vice entachait la légalité du permis en litige.

7. En deuxième lieu, les arrêtés en litige ont été signé par Mme J... G..., 6ème adjointe au maire, qui bénéficiait d'une délégation de fonction du 14 avril 2014, transmise le même jour en préfecture et publiée le 15 mai 2014 au recueil des actes administratifs de la commune ainsi que d'une délégation de fonction en date du 1er juin 2015 et affichée en mairie du 2 juin au 3 août 2015. Ces délégations établies en matière d'urbanisme, de projet métropolitain, de patrimoine municipal et foncier et de droit des sols, concernent en particulier toutes les décisions relatives au droit des sols. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des arrêtés en litige ne peut qu'être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; / b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire ; / c) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation pour cause d'utilité publique ". En vertu du dernier alinéa de l'article R. 431-5 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce, la demande de permis de construire comporte " l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis ".

9. Il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande. Il résulte de ce qui précède que les tiers ne sauraient utilement invoquer, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l'attestation requise, la circonstance que l'administration n'en aurait pas vérifié l'exactitude. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif. Il en est notamment ainsi lorsque l'autorité saisie de la demande de permis de construire est informée de ce que le juge judiciaire a remis en cause le droit de propriété sur le fondement duquel le pétitionnaire avait présenté sa demande.

10. Il ressort des pièces du dossier que la SAS Bourbon a attesté avoir qualité pour déposer la demande de permis de construire. Les syndicats de copropriétaires n'apportent aucun élément de nature à établir que cette demande serait entachée de fraude ou que la société ne disposait d'aucun droit à la déposer. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'absence de qualité de la société pétitionnaire pour déposer les demandes de permis ne peut qu'être écarté.

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également : (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ". La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

12. Les dossiers de permis en litige comportent des documents en trois dimensions, photographies et plans qui permettent de visualiser l'insertion du projet dans son environnement proche et lointain, notamment par rapport aux immeubles environnants situés rue Sainte et sur la future voie à créer. Les pièces des dossiers de demande de permis permettent également de s'assurer de l'insertion du projet présentant une architecture moderne, en pierre massive blanche, baie vitrée et toiture en zinc, par rapport aux éléments sensibles du quartier, notamment l'Abbaye Saint-Victor. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance des dossiers de demande de permis ne peut qu'être écarté.

13. En cinquième lieu, aux termes de l'article UAp 3.2.2.2 du règlement du plan local d'urbanisme : " Un seul accès pour véhicules automobiles est autorisé par construction ou opération et par voie. Toutefois, pour les terrains bordés d'une seule voie, le nombre d'accès autorisé est au plus porté à deux ".

14. Il ressort des pièces du dossier que le permis de construire modificatif a eu pour objet de réduire le nombre d'accès pour les véhicules prévus sur la future voie à créer. Ainsi, le projet ne prévoit plus qu'un seul accès véhicule sur la future voie à créer, le second accès étant un accès pour les piétons. Dans ces conditions, le moyen invoqué tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut qu'être écarté.

15. En sixième lieu, aux termes de l'article UAp 6.3 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les constructions à édifier sont implantées sur une bande constructible d'une profondeur, mesurée à compter de la limite des voies et emprises publiques futures ou du recul prévu par le règlement du PLU, ou çà défaut à compter de la limite des voies et emprises publiques existantes, et égale à la plus grande profondeur de la parcelle, diminuée de 4 mètres, sans être supérieure à 17 mètres. Est considérée comme une voie générant une bande constructible au sens du présent article 6 : une infrastructure de déplacement publique existante ou projetée au titre du présent PLU, privée existante lorsqu'elle satisfait aux besoins en déplacements induits par une opération, privée nouvelle, c'est-à-dire créée à l'occasion d'une opération, si elle satisfait aux besoins en déplacements induits par ladite opération et qu'elle n'est pas en impasse (...) ".

16. Dans le cas d'un terrain situé à l'angle de deux voies ou d'une voie et d'une place publique, en l'absence de règle particulière dans le règlement du plan local d'urbanisme, peuvent être délimitées à partir de l'alignement de ces voies deux bandes d'une profondeur maximale de 17 mètres, se recoupant pour partie, à l'intérieur desquelles la construction peut être édifiée. Sont à cet égard par elles-mêmes sans incidence les circonstances que ce cumul de zones de constructibilité permettrait que la profondeur de la construction projetée, calculée par rapport aux alignements, excède 17 mètres et que la construction soit implantée sur toutes les limites de la parcelle.

17. Il résulte des dispositions précitées que la voie privée nouvelle située à l'intersection avec la rue du commandant Lamy ainsi que l'emprise publique constituée par le square génèrent toute deux des bandes constructibles, tout comme la rue Sainte et la rue du commandant Lamy. Il ressort des pièces du dossier, notamment du plan de masse, que le projet, situé à l'intersection de plusieurs voies et emprises générant des bandes constructibles qui se recoupent, est implanté en totalité dans les bandes constructibles cumulées. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut qu'être écarté.

18. En septième lieu, aux termes de l'article Uap 7 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les constructions nouvelles sont implantées : 7.1 par rapport aux limites séparatives latérales, en continuité d'une limite à l'autre. 7.2 Par rapport aux limites séparées arrières, à une distance minimum de 4 mètres ". Selon la terminologie du règlement : " Limites séparatives latérales : segments de la limite séparative qui coupent l'alignement sur rue ".

19. Il ressort des pièces du dossier que les limites séparatives Ouest du terrain d'assiette coupent l'alignement situé sur la rue Sainte et l'alignement situé sur la voie privée à créer, et doivent donc être qualifiées de limites séparatives latérales. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 7.2 précitées ne peut qu'être écarté.

20. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme dans sa version applicable au projet : " (...) V. Le règlement peut également fixer les emplacements réservés aux voies et ouvrages publics, aux installations d'intérêt général, aux espaces verts ainsi qu'aux espaces nécessaires aux continuités écologiques. ". En contrepartie de cette servitude, le propriétaire concerné par un emplacement réservé bénéficie, en vertu de l'article L. 123-17 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable, d'un droit de délaissement lui permettant d'exiger de la collectivité publique, au bénéfice de laquelle le terrain a été réservé, qu'elle procède à son acquisition, dans les conditions fixées par les articles L. 230-1 et suivants du même code, faute de quoi les limitations au droit à construire et la réserve ne sont plus opposables.

21. Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative chargée de délivrer le permis de construire est tenue de refuser toute demande, même émanant de la personne bénéficiaire de la réserve, dont l'objet ne serait pas conforme à la destination de l'emplacement réservé, tant qu'aucune modification du plan local d'urbanisme emportant changement de la destination n'est intervenue.

22. Il ressort des pièces du dossier que l'accès au projet est prévu par le biais d'une voie privée à créer située sur l'emprise d'un emplacement réservé N° 07-021 dont l'objet est la création d'une voie. Les syndicats requérants n'apportent aucun élément de nature à démontrer que la construction empièterait sur l'emplacement réservé et ce supposé empiètement ne ressort ni des pièces du dossier ni de l'avis rendu par la communauté urbaine En outre, l'objet de la nouvelle voie à créer est conforme à l'objet de l'emplacement réservé. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'atteinte à l'emplacement réservé ne peut qu'être écarté.

23. En neuvième lieu, aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Aux termes de l'article Uap 11 du règlement du plan local d'urbanisme alors en vigueur : " Les constructions à édifier doivent s'intégrer au contexte urbain environnant en prenant en compte ses caractéristiques, dans une perspective de valorisation patrimoniale (protection de la trame, des gabarits, des formes extérieures...). Ces dispositions ne font pas obstacle à l'expression de l'architecture contemporaine dès lors que les projets s'inscrivent de façon harmonieuse dans le tissu environnant. ".

24. Si les constructions projetées portent atteinte aux paysages naturels avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

25. Il ressort des pièces du dossier que le projet, situé dans le champ de visibilité de deux monuments historiques, l'Abbaye Saint-Victor et le Fort Saint-Nicolas, a fait l'objet d'un accord de l'architecte des bâtiments de France le 6 août 2014. L'architecte a ainsi relevé que " le projet est l'aboutissement de plusieurs réunions de travail associant la maîtrise d'ouvrage, la maitrise d'oeuvre et la ville de Marseille, à la suite d'un avis défavorable de l'ABF donné au premier permis de construire. Par son implantation, ses volumes, son architecture et ses matériaux, le projet peut désormais s'intégrer de façon satisfaisante dans son conteste urbain et paysager très sensible, à proximité immédiate de l'Abbaye Saint-Victor, du fort Saint-Nicolas et du Vieux Port ". En effet, les bâtiments, en pierre massives blanches, présentant une architecture moderne avec des percements, une partie en façade vitrée et une toiture en zinc, ne sont pas de nature à porter atteinte aux caractères ou à l'intérêt des lieux avoisinants. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'atteinte aux lieux avoisinants ne peut qu'être écarté.

26. En dixième et dernier lieu, le permis de construire délivré le 4 novembre 2014 n'a pas pour objet d'autoriser la société pétitionnaire à réaliser des travaux publics sur la voie nouvelle à créer. Dans ces conditions, le moyen tiré de que le permis entrainerait une méconnaissance des règles de la commande publique et un détournement de pouvoir ne peut qu'être écarté comme étant inopérant.

27. Il résulte de ce qui précède que la commune de Marseille n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a jugé que le permis de construire en litige méconnaissait l'article Uap 6 du règlement du plan local d'urbanisme, tel qu'il a été dit au point 6 du présent arrêt.

28. Toutefois, aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé. "

29. Les vices concernant la réalisation d'un percement sur la façade Est donnant sur la rue du commandant Lamy et d'un percement sur la façade Nord donnant sur la rue Sainte, relevés au point 6 du présent arrêt, affectent des parties identifiables du projet et sont susceptibles d'être régularisés. Il y a lieu, dans ces conditions, de n'annuler les permis de construire en litige qu'en tant qu'ils portent sur la réalisation de ces percements.

30. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Marseille est uniquement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le tribunal administratif de Marseille a prononcé l'annulation totale des permis en litige.

Sur les frais liés au litige:

31. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chaque partie la charge des frais exposés sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le permis de construire du 4 novembre 2014 et le permis de construire modificatif du 29 juillet 2015 sont annulés en tant que le projet comporte deux percements illégaux tels qu'indiqués au point 6 du présent arrêt.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 décembre 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Marseille, au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 171-173 rue Sainte 13007 Marseille, au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 20 avenue de la Corse 13007 Marseille, au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 18 avenue de la Corse 13007 Marseille, à la SARL Camille Développement Foncier, à la SCI Albert, à la SCI Corse, à M. et Mme A... H..., à M. I... F... et à Mme E... C...

Délibéré après l'audience du 4 juin 2020 où siégeaient :

- M. Poujade président,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme Baizet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 juin 2020.

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N° 18MA00942

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18MA00942
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Elisabeth BAIZET
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : MAZEL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-06-18;18ma00942 ?
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