Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013.
Par un jugement n° 1703293 du 17 mai 2019, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 juillet 2019 et le 13 novembre 2020, M. et Mme B..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 17 mai 2019 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;
- l'administration a irrégulièrement prolongé la durée de l'examen de leur situation fiscale personnelle ;
- l'administration a méconnu l'article L. 103 du livre des procédures fiscales ;
- l'administration a également méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales en s'abstenant de leur communiquer les documents obtenus auprès de l'autorité judiciaire ;
- les distributions de recettes dissimulées n'ont donné lieu à aucun débat contradictoire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant M. et Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... est associé des sociétés à responsabilité limitée (SARL) " Aux Suprêmes du Cap ", " Aux Suprêmes de St Jeannet ", " Aux Suprêmes de la Turbie " et " la Lorraine ". Ces sociétés de capitaux ont fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle les rectifications proposées ont fait l'objet de distributions de bénéfices sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts au profit de l'intéressé. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 17 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à leur charge dans le cadre de l'examen de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2012 et 2013.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, puis doit énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements engagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations.
3. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 23 décembre 2015 adressée à M. et Mme B... mentionne les impôts concernés, les années d'imposition et les bases d'imposition. Elle indique que les sociétés à responsabilité limitée, dont M. B... est associé, ont fait l'objet de vérifications de comptabilité et que ce dernier a été désigné comme bénéficiaire des revenus distribués et comporte notamment le renvoi aux passages utiles des propositions de rectification adressées aux sociétés. La proposition de rectification fait ainsi mention pour chacune des sociétés du détail des minorations de recettes pratiquées, du droit de communication exercé auprès du tribunal de grande instance qui a permis d'obtenir les noms des bénéficiaires des distributions et du calcul de ces distributions ainsi que, de manière détaillée, des références des scellés consultés par l'administration auprès de l'autorité judiciaire. Le vérificateur n'était pas tenu de joindre les propositions de rectification notifiées à chacune des sociétés. En outre, il résulte de cette proposition de rectification que l'administration a bien informé les requérants de la prorogation du délai d'examen de leur situation fiscale personnelle et de l'exercice du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire. Par suite, la proposition de rectification était suffisamment motivée pour permettre à M. et Mme B... de formuler utilement leurs observations. Les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que l'article L. 57 du livre des procédures fiscales a été méconnu.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales : " (...) Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. / (...) / La période mentionnée au troisième alinéa est portée à deux ans en cas de découverte, en cours de contrôle, d'une activité occulte. Il en est de même lorsque, dans le délai initial d'un an, les articles L. 82 C ou L. 101 ont été mis en oeuvre ".
5. Il résulte de l'instruction que l'administration a adressé à M. et Mme B... un avis d'examen contradictoire de situation personnelle afférent aux revenus perçus en 2012 et 2013, en date du 2 septembre 2014. M. et Mme B... ont été informés par lettre du 26 août 2015 que la durée d'un an prévu à l'article L. 12 du livre des procédures fiscales était portée à deux ans, les dispositions des articles L. 82 C et L. 101 du livre des procédures fiscales ayant été mises en oeuvre. L'administration a, les 5 novembre 2014, 18 février et 23 juin 2015, soit dans le délai initial d'un an prévu par l'article L. 12 du livre des procédures fiscales qui expirait le 3 septembre 2015, exercé son droit de communication auprès de la vice-présidente chargée de l'instruction près le tribunal de grande instance de Nice de " l'affaire des boulangeries PANIER/B... ". Les circonstances qu'aucune activité occulte n'a été découverte pendant le déroulement de l'examen et que le droit de communication n'a pas été effectué par le vérificateur mais par la brigade de contrôle et de recherches de la direction des finances publiques des Alpes-Maritimes sont sans incidence sur la régularité de la procédure. Par suite, le moyen tiré de ce que la période d'examen contradictoire de la situation fiscale de M. et Mme B... aurait été irrégulièrement prolongée doit être écarté.
6. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 103 du livre des procédures fiscales, protégeant le secret professionnel, qui font obstacle à ce que l'administration fiscale communique à un tiers des renseignements concernant un contribuable, sans le consentement de celui-ci ou de toute personne habilitée à cet effet n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". L'obligation faite par ces dispositions à l'administration de tenir à la disposition du contribuable qui les demande ou de lui communiquer, avant la mise en recouvrement des impositions, les documents ou copies de documents qui contiennent les renseignements qu'elle a utilisés pour procéder aux redressements ne peut porter que sur des documents effectivement détenus par les services fiscaux. Dans l'hypothèse où les documents que le contribuable demande à examiner sont détenus non par l'administration fiscale, qui les a seulement consultés dans l'exercice de son droit de communication, mais par l'autorité judiciaire, il appartient à l'administration fiscale d'en informer l'intéressé afin de le mettre en mesure, s'il s'y croit fondé, d'en demander communication à cette autorité et, en tout état de cause, de porter à sa connaissance l'ensemble des renseignements fondant l'imposition que cette autorité lui avait permis de recueillir.
8. Il ressort de la proposition de rectification que M. et Mme B... ont été informés de l'origine et de la teneur des pièces de la procédure judiciaire que le vérificateur a pu consulter. Les requérants ont demandé la communication de ces pièces le 24 février 2016. Il ressort de la réponse du 9 mars 2016 aux observations du contribuable à la suite de la proposition de rectification du 23 décembre 2015 que l'administration, qui ne détenait pas les documents consultés dans le cadre du droit de communication exercé auprès de l'autorité judiciaire, a invité M. et Mme B... à en solliciter la communication auprès de l'autorité judiciaire qui les détenait. Le service vérificateur a précisé dans cette lettre les côtes des documents consultés ainsi que les coordonnées de la vice-présidente chargée de l'instruction auprès de laquelle avait eu lieu cette consultation. Il ne résulte pas de l'instruction que le service vérificateur aurait été en possession des copies des documents consultés auprès de l'autorité judiciaire. Par ailleurs, l'administration n'est pas tenue de communiquer aux contribuables les demandes de communication adressées à l'autorité judiciaire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.
9. En dernier lieu, le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la proposition de rectification qui, selon l'article L. 48, marque l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un débat contradictoire avec le contribuable sur les éléments qu'il envisage de retenir.
10. Il résulte de l'instruction et notamment des termes de la proposition de rectification que les 24 octobre 2014 et le 3 avril 2015, le vérificateur a conduit avec les intéressés deux entretiens au cours desquels ont été évoquées l'origine et la nature des crédits apparaissant sur les comptes bancaires des requérants. Il résulte également de l'instruction que les requérants ont indiqué, lors de l'entretien du 3 avril 2015, ne pas détenir de compte courant ouvert dans les écritures des SARL dont M. B... est associé et que le vérificateur les a informés qu'il avait constaté une discordance entre les revenus déclarés au titre des années en litige et le montant des crédits figurant sur les comptes bancaires. En outre, l'administration a adressé à M. et Mme B..., les 9 janvier et 14 avril 2015, des demandes de justification sur l'origine des fonds figurant au crédit des comptes bancaires pour la période vérifiée. Le 9 janvier 2015, l'administration a demandé aux requérants de produire notamment les relevés de comptes courants ouverts dans les sociétés dont M. ou Mme B... est associé. Un rendez-vous de synthèse s'est tenu le 22 décembre 2015 au bureau du vérificateur, soit postérieurement à l'exercice du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, au cours duquel ce dernier a présenté aux intéressés les conclusions du contrôle. Par suite, et alors même que le rendez-vous de synthèse s'est déroulé la veille de la proposition de rectification, M. et Mme B... ne sont pas fondés à se prévaloir du défaut de caractère contradictoire de la procédure de l'examen de leur situation fiscale personnelle et qu'ils auraient été privés d'un débat contradictoire concernant " les distributions de recettes dissimulées ".
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2020, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- M. Barthez, président assesseur,
- Mme D..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er décembre 2020.
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N° 19MA03262
nc