Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... et M. D... C..., puis M. A... C..., représentant unique de l'indivision constituée avec son fils D... C..., ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 7 mars 2013 par lequel le maire d'Antibes-Juan-les-Pins a retiré, pour fraude, le permis de construire valant permis de démolir partiel obtenu le 13 juin 2012 et rectifié le 13 juillet 2012.
Par un jugement n° 1302839 du 24 mai 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour avant renvoi :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 août 2017 et 26 mars 2018, MM. C..., représentés par Me F... puis par Me H..., ont demandé à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 24 mai 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 mars 2013 du maire d'Antibes-Juan-les-Pins ;
3°) de condamner la commune d'Antibes-Juan-les-Pins à leur verser la somme de 50 euros par jour à compter de l'arrêté de retrait du 7 mars 2013 ;
4°) de condamner la commune d'Antibes-Juan-les-Pins à leur verser la somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice moral ;
5°) de mettre à la charge de la commune d'Antibes-Juan-Les-Pins le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils ont soutenu que :
- la décision de retrait a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;
- l'arrêté du 13 juin 2012 rectifié le 13 juillet 2012 n'a pas été obtenu par fraude et ne pouvait par suite pas être retiré plus de trois mois après son édiction.
Par des mémoires enregistrés au greffe de la Cour les 21 mars et 6 avril 2018, la commune d'Antibes-Juan-les-Pins, représentée par la SELARL Daz Avocats, a conclu au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle a fait valoir que les moyens présentés par MM. C... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance n° 17MA03624 du 2 mai 2018, le président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté la requête de MM. C....
Par une décision n° 421805 du 20 novembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'ordonnance du 2 mai 2018 du président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Marseille et a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Marseille.
Procédure devant la Cour après renvoi :
Par un mémoire, enregistré le 15 décembre 2020, MM. C... persistent dans leurs conclusions.
Ils soutiennent que :
- leur requête d'appel n'est pas tardive ;
- la décision de retrait est illégale dès lors que la légalité du permis n'est pas sérieusement remise en cause et qu'en tout état de cause, aucune fraude n'existe, ni, a fortiori, n'est établie.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 décembre 2020 et 25 janvier 2021, la commune d'Antibes-Juan-Les-Pins persiste dans ses précédentes écritures.
Elle fait valoir que :
- la requête d'appel est tardive ;
- les moyens soulevés par MM. C... ne sont pas fondés.
Un mémoire enregistré le 29 janvier 2021 présenté par M. A... C... n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me H..., représentant MM. C..., et de Me E..., représentant la commune d'Antibes-Juan-Les-Pins.
Une note en délibéré présentée par M. A... C... a été enregistrée le 5 juillet 2021.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 24 mai 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de MM. René et D... C... puis de M. A... C..., représentant unique de l'indivision constituée avec son fils D..., tendant, à titre principal, à l'annulation de l'arrêté du 7 mars 2013 par lequel le maire d'Antibes-Juan-les-Pins a retiré, pour fraude, le permis de construire valant permis de démolir partiel obtenu le 13 juin 2012 et rectifié le 13 juillet 2012. Par une décision n° 421805 du 20 novembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'ordonnance du 2 mai 2018 du président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Marseille rejetant l'appel formé par MM. C... à l'encontre du jugement du 24 mai 2017 et renvoyé l'affaire devant la Cour.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations alors en vigueur et aujourd'hui repris à l'article L. 121-1 du code des relations entre l'administration et le public : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique (...) ". La décision portant retrait d'un permis de construire est au nombre de celles qui doivent être motivées en application de la loi du 11 juillet 1979, dont les dispositions sont aujourd'hui reprises aux articles L. 211-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration, et être, par suite, précédée de la procédure contradictoire prévue à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000.
3. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 13 février 2013, le maire de la commune d'Antibes-Juan-les-Pins a informé M. A... C... de son intention de procéder au retrait de l'autorisation accordée sous le n° 0600412A0017 en raison des déclarations erronées figurant au dossier de demande de permis de construire, de nature à induire l'administration en erreur. Cette lettre invitait M. C... à présenter des observations en application des dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un mandataire de son choix, dans un délai maximum de huit jours à compter de sa notification. M. A... C... a présenté ses observations les 15 et 19 février 2013. Si les requérants font valoir que la lettre du 13 février 2013 ne visait pas le permis délivré le 13 juin 2012 mais une autorisation du " 21 février 2012 ", il ressort de ses termes que cette lettre mentionnait le n° exact du permis du 13 juin 2012 ainsi que son objet et que d'ailleurs dans sa lettre du 15 février 2012, M. A... C... a effectivement présenté des observations relatives audit permis. Si les intéressés soutiennent également que le maire d'Antibes n'a pas tenu compte de la seconde série d'observations formulées par lettre du 19 février 2013, cette circonstance, à la supposer établie alors, au demeurant que les éléments contenus dans cette lettre n'étaient pas étayés par des pièces justificatives, ne saurait démontrer que la procédure contradictoire prévue à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 a été méconnue.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " (...) Le permis de construire (...) ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire ". En outre, un acte administratif obtenu par fraude ne créant pas de droits, peut être abrogé ou retiré par l'autorité compétente pour le prendre, alors même que le délai qui lui est normalement imparti à cette fin serait expiré. L'existence d'une fraude permettant la délivrance du permis de construire s'apprécie au vu de la demande présentée à l'administration ou du comportement de l'intéressé avant le dépôt de la demande ou durant son instruction.
5. Pour procéder au retrait litigieux, le maire de la commune d'Antibes-Juan-les-Pins a retenu que l'autorisation a été accordée sur la base d'une déclaration frauduleuse concernant la demande de surélévation d'un garage qui est en réalité aménagé en habitation et qu'au regard du dépassement de la densité autorisée la transformation du garage en habitation et sa surélévation n'auraient pu être accordées.
6. D'une part, il ressort du formulaire de demande de permis de construire valant permis de démolir déposé en mairie d'Antibes-Juan-les-Pins, le 21 février 2012, que celui-ci indique, au cadre 4.2 relatif à la nature des travaux envisagés, " surélévation de la toiture d'une annexe existante ", au cadre 5 concernant la démolition partielle, " dépose de la toiture existante pour surélever " et, au cadre 4.5, la création de 19,34 m² de " surface hors oeuvre nette " par transformation de " surface hors oeuvre brute en surface hors oeuvre nette ". Le plan de masse et de situation coté PCMI 2 joints à la même date au dossier, identifie la construction, objet des travaux en cause, laquelle occupe une surface au sol de 6,18 mètres x 6,13 mètres et le plan de coupe de la construction coté PCMI3, mentionne quant à lui " garage C... " en faisant apparaître le rehaussement projeté de la toiture. A la suite d'une demande de pièces complémentaires du 8 mars 2012 du service instructeur de la commune d'Antibes-Juan-les-Pins indiquant à l'intéressé que le projet n'était pas conforme au règlement du plan local d'urbanisme rendu exécutoire le 16 juin 2011, celui-ci a modifié sa demande de permis en décrivant le projet, au cadre 4.2, comme concernant une " surélévation sans création de surface hors oeuvre nette. combles non aménageables qui étaient la réserve de foin pour les écuries devenues garage ", la notice cotée PCMI4 produite le 21 mars 2012, mentionnant d'ailleurs, " surélévation d'une construction autrefois écuries, sans création de surface hors oeuvre nette, annexe de l'habitation, garage existant ". Ainsi, ni lors du dépôt de la demande de permis de construire ni pendant son instruction, M. A... C... n'a fait état de ce qu'une partie du local dont s'agit était d'ores-et-déjà aménagée en habitation dont la surface de plancher était ainsi étendue par les travaux projetés. Il découle de ce qui précède qu'il est établi que le pétitionnaire s'est livré à des manoeuvres de nature à induire en erreur l'administration quant au respect du projet avec la règle de densité maximale autorisée sans que les appelants ne puissent utilement soutenir, à titre subsidiaire, que le maire a ainsi commis une erreur de droit en se fondant sur des constatations qui relèvent non de la légalité du permis mais de son exécution. D'autre part, la circonstance que cette partie du local aurait été depuis 1924 à usage d'habitation comme indiqué dans l'acte d'origine de propriété qui le désigne comme une " maisonnette " n'est pas de nature à ôter aux manoeuvres de l'intéressé leur caractère frauduleux. Enfin, si le maire d'Antibes-Juan-les-Pins a rejeté le 24 septembre 2012 le recours gracieux formé par des tiers à l'encontre du permis délivré le 13 juin 2012, et à supposer même qu'il n'aurait alors pas ignoré la destination d'une partie du local appartenant à MM. C..., cette circonstance est également sans incidence sur le caractère frauduleux de l'obtention de l'autorisation. Il suit de là que le moyen tiré de ce qu'en l'absence de fraude le maire d'Antibes-Juan-les-Pins ne pouvait retirer, plus de trois mois après son édiction, l'arrêté du 13 juin 2012 doit être écarté.
7. En dernier lieu, à supposer que M. A... C... ait entendu soulever d'autres moyens dans ses diverses observations produites devant la cour, en réponse aux écritures de la commune d'Antibes-Juan-les-Pins, sous forme de pièces produites sous un bordereau signé par son conseil, leur manque d'intelligibilité ne permet pas, en tout état de cause, au juge d'en apprécier le bien-fondé.
8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin ni d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel par la commune d'Antibes-Juan-les-Pins, ni d'ordonner une expertise, que MM. C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mars 2013 ainsi que leurs conclusions à fin d'injonction et indemnitaires.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune d'Antibes-Juan-les-Pins, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à MM. C... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge des appelants une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de MM. C... est rejetée.
Article 2 : MM. C... verseront à la commune d'Antibes-Juan-les-Pins une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., M. D... C... et à la commune d'Antibes-Juan-Les-Pins.
Délibéré après l'audience du 29 juin 2021, où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,
- Mme B..., présidente assesseure,
- Mme G..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2021.
N° 20MA04347 6