Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 21 octobre 2020 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et, d'autre part, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande.
Par un jugement n° 2009000 du 29 juillet 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 29 août 2021 et un mémoire complémentaire enregistré le 1er novembre 2021, M. A..., représenté par Me Leonhardt, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 juillet 2021 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2020 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " l'autorisant à travailler, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder au réexamen de sa demande et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, à verser au conseil du requérant, sous réserve qu'il renonce au bénéficie de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
Sur la décision portant refus de séjour :
- elle est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;
- elle méconnaît les stipulations des articles 6 de l'accord franco-algérien et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard du pouvoir de régularisation dont dispose le préfet.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale, par la voie d'exception de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui accorder un délai supplémentaire de départ volontaire.
La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire.
M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 février 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné par décision du 24 août 2021 M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Portail a été entendu au cours de l'audience publique.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité algérienne, a sollicité son admission au séjour sur le fondement de la vie privée et familiale. Il relève appel du jugement du 29 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 21 octobre 2020 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur les conclusions à fins d'annulation :
2. En premier lieu, Il ressort des pièces du dossier que M. A..., né le 8 août 2000, et entré en France le 25 décembre 2016, a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de Seine-Maritime du 15 février 2017 au 31 octobre 2018, sous couvert de contrats jeune majeur à partir du 8 août 2018, et a effectué une classe de Première puis une classe de Terminale scientifique au Lycée Porte Océane du Havre. Il a dans ce cadre résidé dans une famille d'accueil de juillet 2017 à octobre 2018, laquelle atteste de la particulière intégration de l'intéressé. Il a été ensuite scolarisé au centre de formation d'Apprentis Antenne La Ciotat de novembre 2018 à octobre 2020 et a obtenu en juillet 2020 un CAP employé de vente spécialisé option produits alimentaires, tout en se présentant au baccalauréat en candidat libre. Il a bénéficié, à titre dérogatoire, de contrats jeune majeur auprès de l'ASE des Bouches-du-Rhône du 21 novembre 2019 au 30 septembre 2021. A la date de la décision attaquée, il était inscrit en classe de Terminale Bac professionnel Accueil Relation clients et usagers à l'école Triphase formations à Marseille, baccalauréat professionnel qu'il a obtenu du reste en juin 2021 avec mention. Ainsi, eu égard à l'intégration du requérant en France démontrée par son volonté déterminée d'insertion professionnelle, l'arrêté contesté doit être regardé comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A..., alors même que celui-ci n'établit pas être dépourvu de toute attache avec son pays d'origine et qu'il est célibataire sans charge de famille.
3. En second lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 2 que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de la décision de refus de titre de séjour.
4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Il est, dès lors, fondé à demander tant l'annulation de ce jugement que de l'arrêté contesté du 21 octobre 2020 du préfet des Bouches-du-Rhône.
Sur les conclusions à fins d'injonction :
5. Eu égard au motif d'annulation retenu, en l'absence de changement de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle et résultant de l'instruction, l'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. A... implique nécessairement la délivrance d'un tel titre. Il y a lieu d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer un certificat de résident algérien d'un an à M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par M. A....
Sur les frais liés au litige :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Leonhardt en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve qu'elle renonce au bénéfice de la contribution au titre de l'aide juridictionnelle.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2009000 du 29 juillet 2021 du tribunal administratif de Marseille et l'arrêté du 21 octobre 2020 du préfet des Bouches-du-Rhône sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. A... un certificat de résidence algérien d'un an dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Leonhardt une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve qu'elle renonce au bénéfice de la contribution au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Leonhardt et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au procureur de la république près le tribunal judiciaire de Marseille.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2022, où siégeaient :
- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Carassic, première conseillère.
- M. Mouret, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.
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N° 21MA03710