Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du
24 octobre 2018 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande de reconnaissance de la qualité d'apatride et d'enjoindre à l'OFPRA de lui reconnaître cette qualité.
Par un jugement n° 1810712 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 et le 23 mai 2021, M. A..., représenté par Me Ibrahim, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 septembre 2020 ;
2°) d'annuler la décision du 24 octobre 2018 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande de reconnaissance de la qualité d'apatride ;
3°) d'enjoindre à l'OFPRA de lui reconnaître la qualité d'apatride ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil à la condition que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- la décision en litige est insuffisamment motivée en fait et en droit ;
- la décision a été prise au terme d'une procédure irrégulière, l'entretien du 22 octobre 2018 dans les locaux de l'OFPRA ayant été mené en langue française et non en soninke ou sarakole, langue en laquelle il avait demandé que se déroule l'entretien ;
- la décision est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il établit ne pas être reconnu comme ressortissant mauritanien malgré les nombreuses démarches auprès des autorités mauritaniennes pour faire reconnaître cet état de fait.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2022, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, représenté par Me Cano, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... une somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens, soulevés en première instance et renouvelés en appel, ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du
26 mars 2021.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention de New York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. Michaël Revert, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A... relève appel du jugement du 29 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du
24 octobre 2018 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande de reconnaissance de la qualité d'apatride.
2. En premier lieu, il ressort des termes de la décision attaquée, qui rappelle l'ensemble des déclarations de l'intéressé, les étapes de son parcours en France, les décisions le concernant, les conditions de sa demande d'obtention du statut d'apatride, les incertitudes concernant son état-civil et l'insuffisance des éléments de preuve qui, aux yeux de l'office, justifiaient qu'il ne puisse être fait droit à sa demande, au regard des dispositions de l'article L.8 12-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 1er du 1er paragraphe de la Convention de New-York du 28 septembre 1954 que celle-ci, qui n'est entachée, au demeurant, d'aucune contradiction de motifs, est suffisamment motivée, en fait comme en droit.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 812-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'office peut convoquer le demandeur à un entretien personnel. Le demandeur est entendu dans la langue de son choix, sauf s'il existe une autre langue qu'il comprend et dans laquelle il est à même de communiquer clairement. Lorsque l'entretien du demandeur nécessite l'assistance d'un interprète, sa rétribution est prise en charge par l'office (...) ".
4. M. A..., qui a indiqué parler couramment le français dans le formulaire de demande du statut, n'établit pas avoir demandé que l'entretien se déroule en langue soninke ou sarakole. Il n'est ainsi pas fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure parce que l'entretien mentionné dans les dispositions précitées s'est déroulé en langue française.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 1er de la convention de New-York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides : " (...) Le terme "apatride" désigne une personne qu'aucun Etat ne considère comme son ressortissant par application de sa législation. (...). " et aux termes de l'article L. 812-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " La qualité d'apatride est reconnue à toute personne qui répond à la définition de l'article 1er de la convention de New York, du 28 septembre 1954, relative au statut des apatrides. Ces personnes sont régies par les dispositions applicables aux apatrides en vertu de cette convention. ".
6. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier des informations qu'il a fournies lors de sa demande, que M. B... A... a indiqué être né en Mauritanie, le 31 décembre 1978, de parents mauritaniens et y avoir résidé jusqu'en 1989, année au cours de laquelle il aurait rejoint le Sénégal avec son frère et sa sœur pour être pris en charge par un ami de son père, avant de rejoindre la France en août 2001. D'une part, l'intéressé n'est pas en mesure de confirmer son état-civil, qu'il n'établit pas avoir été dans l'impossibilité d'obtenir, les échanges de courriels entre personnels d'une association invoquant la difficulté d'obtenir un acte de naissance de la Mauritanie ne pouvant constituer la preuve contraire. D'autre part, au soutien de l'affirmation que les autorités mauritaniennes refusent de le reconnaître comme un ressortissant mauritanien, alors que, si ses allégations sont établies, il devrait posséder la nationalité mauritanienne en application de l'article 8 de la loi n° 1961/112 portant code de la nationalité mauritanienne,
il se prévaut du refus opposé par ces autorités de le reconnaître comme l'un des ressortissants de ce pays à l'occasion des tentatives d'exécution des deux mesures d'éloignement prises à son encontre en 2014 et 2017 et des courriers qu'il a adressés au consulat de Mauritanie à Paris,
le 6 mars 2018 et le 6 novembre 2018, dans lesquels il sollicitait une attestation de refus de reconnaissance " pour faciliter le traitement de son dossier de demande de statut d'apatride ". Ces circonstances, qui ne témoignent pas de démarches répétées, demeurées vaines, auprès de l'Etat qui devrait, en application de sa propre législation, lui reconnaître sa nationalité, ne permettent pas de considérer que l'intéressé ne peut pas prétendre à la nationalité mauritanienne, ni que la Mauritanie ne le considère pas comme l'un de ses ressortissants en application de sa propre législation. Le moyen tiré de ce que l'OFPRA aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ne peut, dès lors, qu'être écarté.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquences, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.
8. L'OFPRA n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de M. A... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par l'OFPRA au titre de ses frais d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'OFPRA présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié sera notifié à M. B... A... et à l'office français de protection des réfugiés et apatrides.
Délibéré après l'audience du 5 juillet 2022, où siégeaient :
- M. Revert, président,
- M. Ury, premier conseiller,
- Mme Renault, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 juillet 2022.
N° 21MA01761 2