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14/09/2023 | FRANCE | N°22MA00233

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 14 septembre 2023, 22MA00233


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 21 janvier 2020 par laquelle le conseil municipal de Correns a approuvé la révision n° 1 du plan local d'urbanisme, en tant qu'elle classe une partie de la parcelle cadastrée section C n° 480 leur appartenant en emplacement réservé en vue de l'agrandissement d'un parc public de stationnement.

Par un jugement n° 2000961 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur dem

ande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 janvier 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 21 janvier 2020 par laquelle le conseil municipal de Correns a approuvé la révision n° 1 du plan local d'urbanisme, en tant qu'elle classe une partie de la parcelle cadastrée section C n° 480 leur appartenant en emplacement réservé en vue de l'agrandissement d'un parc public de stationnement.

Par un jugement n° 2000961 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 janvier 2022, M. D... et Mme B..., représentés par Me Giovannangeli, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 9 novembre 2021 ;

2°) d'annuler la délibération du 21 janvier 2020 par laquelle le conseil municipal de Correns a approuvé la révision n° 1 du plan local d'urbanisme, en tant qu'elle classe une partie de la parcelle cadastrée section C n° 480 en emplacement réservé en vue de l'agrandissement d'un parc public de stationnement ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Correns la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'emplacement réservé litigieux n'était pas prévu avant l'enquête publique ;

- cet emplacement réservé ne présente pas d'intérêt communal et ne répond pas à des considérations d'utilité publique ;

- la création de cet emplacement sur un autre terrain satisferait à un tel intérêt ;

- la création de l'emplacement réservé révèle un détournement de pouvoir.

Par des mémoires en défense enregistrés le 26 janvier 2023 et le 12 juin 2023, la commune de Correns, représentée par Me Reghin, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer en application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de Mme B... devant le tribunal administratif de Toulon est irrecevable en l'absence d'intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- les moyens soulevés par M. D... et Mme B... ne sont pas fondés.

Par des mémoires enregistrés le 1er juin 2023 et le 20 juin 2023, Mme B..., représentée par Me Carlhian, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 9 novembre 2021 ;

2°) d'annuler la délibération du 21 janvier 2020 par laquelle le conseil municipal de Correns a approuvé la révision n° 1 du plan local d'urbanisme, en tant qu'elle classe une partie de la parcelle cadastrée section C n° 480 en emplacement réservé en vue de l'agrandissement d'un parc public de stationnement ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Correns la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- étant propriétaire de la parcelle cadastrée section C n° 480 située sur le territoire de la commune de Correns, elle justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- la création de l'emplacement réservé litigieux méconnaît les dispositions de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme dès lors qu'elle remet en cause l'économie générale du projet et qu'elle ne procède pas de l'enquête ;

- cette création n'est pas justifiée par le rapport de présentation ;

- l'emplacement réservé litigieux ne présente pas d'intérêt communal et ne répond pas à des considérations d'utilité publique ;

- la création de cet emplacement est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la création de l'emplacement réservé révèle un détournement de pouvoir.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,

- et les observations de Me de Sousa, représentant Mme B..., et de Me Reghin, représentant la commune de Correns.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 30 juin 2015, le conseil municipal de Correns a prescrit la révision n° 1 du plan local d'urbanisme (PLU) approuvé le 28 novembre 2008. Par une délibération du 9 avril 2016, il a arrêté le projet de PLU révisé et tiré le bilan de la concertation. L'enquête publique s'est déroulée du 22 octobre au 26 novembre 2019. Par une délibération du 21 janvier 2020, il a approuvé la révision n° 1 du PLU. M. D... et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler cette délibération, en tant qu'elle classe une partie de la parcelle cadastrée section C n° 480 en emplacement réservé en vue de l'agrandissement d'un parc public de stationnement. Ils relèvent appel du jugement du 9 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Il ressort des pièces du dossier que, à la date de leur demande devant le tribunal administratif de Toulon, M. D... et Mme B... étaient propriétaires indivis de la parcelle cadastrée section C n° 480 située sur le territoire de la commune de Correns, Mme B... ayant acquis la pleine propriété des parts cédées par M. D... par acte du 28 janvier 2022. Elle justifie donc d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation pour excès de pouvoir de la délibération du 21 janvier 2020. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Correns à la demande de première instance, en tant que celle-ci a été présentée par Mme B..., doit être écartée.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes de l'article L. 153-14 du code de l'urbanisme : " L'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou le conseil municipal arrête le projet de plan local d'urbanisme. ". Aux termes de l'article L. 153-19 du même code : " Le projet de plan local d'urbanisme arrêté est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou le maire. ". Aux termes de l'article L. 153-21 du même code : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par : (...) 2° Le conseil municipal dans le cas prévu au 2° de l'article L. 153-8. ". Il résulte de ces dispositions que le projet de plan local d'urbanisme ne peut subir de modifications, entre la date de sa soumission à l'enquête publique et celle de son approbation, qu'à la double condition que ces modifications ne remettent pas en cause l'économie générale du projet et procèdent de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête, des observations du public et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête. En revanche, ces dispositions ne permettent pas que le projet de plan local d'urbanisme soit modifié après l'enquête à la seule initiative de la commune ou même suite à l'émission d'une simple proposition adressée au commissaire enquêteur par le maire ou le représentant de l'autorité ayant arrêté le projet.

4. Il est constant que le PLU arrêté et soumis à l'enquête publique ne prévoyait aucun emplacement réservé sur la parcelle cadastrée section C n° 480. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 6 novembre 2019, alors que l'enquête publique était en cours, le maire de Correns a informé le commissaire enquêteur que le conseil municipal souhaitait classer en emplacement réservé en vue de l'agrandissement d'un parking une partie de la parcelle cadastrée section C n° 480. Le commissaire enquêteur a reporté cette information dans son rapport et a mentionné les observations que lui avait adressé sur ce point, le 26 novembre 2019, l'avocat de Mme B.... S'il a relevé dans son rapport les avantages résultant des emplacements réservés prévus pour la création d'espaces de stationnement, il ne peut être regardé comme ayant émis des réserves ou des recommandations portant directement ou indirectement sur la création de l'emplacement réservé litigieux. La transmission par le maire de Correns du courrier précité du 6 novembre 2019 n'équivaut pas davantage à une observation du public. Par ailleurs, cette création ne constitue pas la conséquence logique des modifications, résultant des avis émis par les personnes publiques associées, apportées au zonage et aux prescriptions graphiques réglementaires en relation avec la préservation du patrimoine, même si ce dernier objectif participe au développement touristique de la commune, lequel s'accompagne d'un accroissement des besoins de stationnement. Dans ces conditions, la modification apportée au PLU arrêté par la création de l'emplacement réservé litigieux, qui ne peut être regardée comme procédant de l'enquête, entache d'un vice de procédure la délibération du 21 janvier 2020 qui approuve la révision n° 1 du PLU. Ce vice a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision du conseil municipal. Par ailleurs, portant sur un élément divisible du PLU approuvé, il n'entraîne l'annulation de la délibération du 21 janvier 2020 qu'en tant qu'elle classe une partie de la parcelle cadastrée section C n° 480 en emplacement réservé en vue de l'agrandissement d'un parc public de stationnement.

5. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est susceptible de fonder l'annulation, en l'état du dossier, de la délibération du 21 janvier 2020.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... et Mme B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme :

7. Aux termes de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme : " Si le juge administratif, saisi de conclusions dirigées contre un schéma de cohérence territoriale, un plan local d'urbanisme ou une carte communale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'une illégalité entachant l'élaboration ou la révision de cet acte est susceptible d'être régularisée, il peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation et pendant lequel le document d'urbanisme reste applicable, sous les réserves suivantes : (...) 2° En cas d'illégalité pour vice de forme ou de procédure, le sursis à statuer ne peut être prononcé que si l'illégalité a eu lieu, pour les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme, après le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables. (...) ".

8. Dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la portée limitée de l'annulation résultant de l'illégalité relevée au point 4, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande présentée par la commune de Correns à titre subsidiaire tendant au prononcé d'un sursis à statuer sur le fondement de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Correns demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Correns une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. D... et Mme B... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 9 novembre 2021 et la délibération du 21 janvier 2020, en tant qu'elle classe une partie de la parcelle cadastrée section C n° 480 en emplacement réservé, sont annulés.

Article 2 : La commune de Correns versera à M. D... et à Mme B... une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Correns sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à Mme A... B... et à la commune de Correns.

Délibéré après l'audience du 31 août 2023, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 septembre 2023.

N° 22MA00233 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00233
Date de la décision : 14/09/2023
Type d'affaire : Administrative

Analyses

68-01-01-01-01-05 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU). - Légalité des plans. - Procédure d'élaboration. - Enquête publique.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : AARPI GIOVANNANGELI et COLAS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-09-14;22ma00233 ?
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