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23/05/2024 | FRANCE | N°22MA02937

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 3ème chambre, 23 mai 2024, 22MA02937


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 2009314 du 30 septembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.



Procédure devant la Cour :

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Par une requête enregistrée le 30 novembre 2022, M. et Mme A..., représentés par Mes Roustouil et Rannou Sunde...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2009314 du 30 septembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 novembre 2022, M. et Mme A..., représentés par Mes Roustouil et Rannou Sunderland, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 30 septembre 2022 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige et des pénalités correspondantes ;

3°) à titre subsidiaire, de prononcer la réduction des impositions en litige au titre de l'année 2013 et des pénalités correspondantes, ainsi que la décharge des impositions en litige au titre de l'année 2014 et des pénalités correspondantes ;

4°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à sa charge une somme de 2 500 euros hors taxes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la somme de 150 000 euros versée à M. A... par la société à responsabilité limitée (SARL) Cobis Market le 27 février 2013 ne pouvait être regardée comme un revenu distribué sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ;

- la somme de 150 000 euros versée par la SARL Cobis Market le 27 février 2013, qui constitue une avance au sens du a) de l'article 111 du code général des impôts, a été intégralement remboursée en 2014 et 2015 ;

- la doctrine administrative référencée BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20 n° 190 admet qu'en cas de remboursement de l'avance avant la réception de l'avis de vérification par la société, le a) de l'article 111 du code général des impôts n'est pas applicable ;

- c'est à tort que l'administration a remis en cause la déduction du résultat de la SARL Cobis Market au titre de l'exercice clos en 2014 de charges regardées comme non engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise, et en conséquence regardé les sommes correspondantes comme des revenus distribués ;

- l'administration ne pouvait faire application de la majoration pour manquement délibéré.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mastrantuono,

- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,

- et les observations de Me Roustouil, représentant M. et Mme A....

Une note en délibéré présentée pour M. et Mme A... a été enregistrée le 16 mai 2024.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre des années 2013 et 2014, tandis que la SARL Cobis Market, dont M. A... est le gérant et l'associé unique, faisait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014. A l'issue de ces contrôles, l'administration fiscale a assujetti M. et Mme A... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, résultant de rehaussements correspondant à des revenus regardés comme distribués à M. A... par la SARL Cobis Market au cours des années 2013 et 2014. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 30 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt auxquels ils demeurent assujettis au titre des années 2013 et 2014 à l'issue de l'admission partielle de leur réclamation préalable, et des pénalités correspondantes.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale !

2. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) ". Aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes. / Nonobstant toutes dispositions contraires, lorsque ces sommes sont remboursées postérieurement au 1er janvier 1960, à la personne morale qui les avait versées, la fraction des impositions auxquelles leur attribution avait donné lieu est restituée aux bénéficiaires (...) ".

3. En premier lieu, le vérificateur a constaté que le 27 février 2013, la SARL Cobis Market a comptabilisé au débit du compte 467 " débiteurs et créditeurs divers " des sommes de 60 000 et 90 000 euros, avec le libellé " acomptes sur dividendes ", et que la somme de 150 000 euros a été versée le même jour, par virement, sur le compte bancaire de M. A.... Cette somme a été regardée comme un revenu distribué au titre de l'année 2013 sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. M. et Mme A..., qui avaient d'ailleurs fait valoir en première instance qu'aucune décision de distribution n'a été prise et que la somme de 150 000 euros ne pouvait être prélevée sur les bénéfices, ne sauraient faire valoir l'inverse en appel, à savoir que cette somme ne pouvait être regardée comme non prélevée sur les bénéfices, qui étaient insuffisants, au seul motif que les écritures comptables portent le libellé " acomptes sur dividendes ". Ils ne sont dès lors pas fondés à soutenir que cette somme, qui a été effectivement mise à la disposition de M. A..., unique associé de la SARL Cobis Market, ne pouvait être imposée sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.

4. En deuxième lieu, en se bornant à faire valoir que la créance correspondant à la somme de 150 000 euros versée à M. A... par la SARL Cobis Market le 27 février 2013 a été inscrite au bilan de la société, M. et Mme A... ne démontrent pas que cette somme, comptabilisée non au débit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. A... dans les écritures de la société, mais à celui du compte 467 " débiteurs et créditeurs divers " avec le libellé " acomptes sur dividendes ", constituerait une avance imposable sur le fondement du a) de l'article 111 du code général des impôts. Ainsi, la circonstance, à la supposer même établie, que M. A... aurait remboursé la somme à la SARL Cobis Market au cours des années 2014 et 2015, en totalité ou à hauteur de 34 000 euros, est sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition en litige, un tel remboursement autorisant au demeurant seulement le contribuable à demander la restitution prévue par le deuxième alinéa du a) de l'article 111 du code général des impôts.

5. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que le service vérificateur a remis en cause la déduction du résultat de la SARL Cobis Market, au titre de l'exercice clos en 2014, de dépenses de carburant à raison desquelles la société s'est bornée à présenter des bordereaux manuels de dépenses mensuelles, de dépenses de voyage regardées comme insuffisamment justifiées par la seule production d'un document ne mentionnant pas le prix de la prestation ainsi que d'une facture portant le seul libellé " déplacement professionnel ", et d'achats de denrées alimentaires comptabilisées en tant que frais de restaurant. Les sommes correspondant à ces dépenses, pour un montant total de 11 044 euros, ont été regardées comme un revenu distribué à M. A... sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Les dépenses en cause, non réglées par le compte bancaire de la SARL Cobis Market, ont nécessairement été exposées à l'initiative et au bénéfice de M. A..., gérant et unique associé de la société. Dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme ayant apporté la preuve qui lui incombe de ce que M. A..., bénéficiaire personnel de ces frais, a appréhendé les sommes correspondant aux rehaussements des résultats de la SARL Cobis Market. En se bornant à affirmer que les dépenses en cause ont été engagées dans l'intérêt de la société, les requérants ne contestent pas sérieusement cette démonstration. Par suite, l'administration fiscale était fondée à imposer la somme de 11 044 euros en tant que revenu distribué sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

6. L'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ".

7. La situation de M. et Mme A... n'entre pas dans les prévisions de la doctrine administrative référencée BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20 n° 190, qui est relative au a) de l'article 111 du code général des impôts, dès lors que l'administration fiscale s'est fondée, pour établir les impositions en litige, sur les dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du même code. M. et Mme A... ne sont dès lors pas fondés à invoquer les énonciations de cette doctrine sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

Sur les pénalités :

8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

9. l'application de la majoration pour manquement délibéré a été fondée sur la circonstance que M. A..., en tant que gérant et unique associé de la SARL Cobis Market, ne pouvait ignorer le caractère imposable de la somme de 150 000 euros que la société lui a versée avec le libellé " acomptes sur dividendes ". Ainsi l'administration, qui doit être regardée comme démontrant l'intention délibérée de M. A... d'éluder l'impôt, justifie du bien-fondé de l'application de la majoration de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, doivent être également rejetées leurs conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 7 mai 2024, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 mai 2024.

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N° 22MA02937


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA02937
Date de la décision : 23/05/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations - Pénalités pour manquement délibéré (ou mauvaise foi).

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués - Notion de revenus distribués - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : SCP BBLM AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-23;22ma02937 ?
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