Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 23 février 2023 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.
Par un jugement n° 2305768 du 9 octobre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 7 mars 2024, M. A... B..., représenté par Me Decaux, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 octobre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 février 2023 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dès le prononcé de la décision à intervenir et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'il renonce à percevoir la contribution de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- compte tenu de la durée de sa présence sur le territoire, qui excède 10 années, le préfet des Bouches-du-Rhône était tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de prendre l'arrêté attaqué ;
- le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation alors qu'il a précisé dans sa demande de titre de séjour être entré en France le 21 février 2012 et non le 1er avril 2009 ;
- la décision lui refusant le séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que sa vie privée et familiale est établie en France, compte tenu de l'ancienneté et de la continuité de sa présence sur le territoire ;
- en lui refusant le titre de séjour qu'il sollicitait, le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire et la décision fixant le pays de renvoi sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité de la décision lui refusant le séjour ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'a pas produit de mémoire.
M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 janvier 2024 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Claudé-Mougel a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., de nationalité marocaine, demande l'annulation du jugement du 9 octobre 2023 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa requête dirigée contre l'arrêté du 23 février 2023 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, la seule circonstance que l'arrêté attaqué mentionne une date d'entrée sur le territoire français le 1er avril 2009 alors que M. B... aurait déclaré dans sa demande de titre de séjour être entré sur le territoire le 21 février 2012, ne suffit pas à établir que le préfet des Bouches-du-Rhône n'aurait pas procédé à un examen particulier de cette demande, que M. B... ne produit au demeurant pas à l'instance. Alors par ailleurs que cet arrêté mentionne sans erreur son identité, ses date et lieu de naissance, l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 26 avril 2022 qui a rejeté sa requête à l'encontre d'un précédent refus de séjour du 31 août 2020 ainsi que des éléments de sa situation personnelle et familiale, ce moyen ne peut qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".
4. Les pièces que M. B..., composées pour l'essentiel de cartes d'admission à l'aide médicale d'Etat, de quelques prescriptions médicales, d'attestations de domiciliation administrative et d'hébergement, de courriers de l'assurance maladie et d'avis d'impôt sur le revenu ne permettent pas d'établir sa présence continue sur le territoire depuis la date de son entrée sur le territoire alléguée, soit le 4 mai 2012. En outre, il ne fait état d'aucun lien personnel ou familial qu'il aurait noué sur le territoire, et les promesses d'embauche qu'il produit, l'une du 28 juillet 2020 pour un poste de serveur, l'autre du 1er juillet 2022 pour un poste de vendeur polyvalent, ainsi que la circonstance qu'il a conclu un bail pour une habitation à compter du mois de septembre 2020, ne suffisent pas à établir la réalité de son insertion socio-professionnelle. Il ne conteste pas davantage, ainsi que cela ressort de l'arrêté attaqué, n'être pas dépourvu d'attaches familiales et personnelles au Maroc, où il a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que cet arrêté méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./ Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. "
6. D'une part, M. B... ne justifie, ni même d'ailleurs ne se prévaut, d'aucune considération humanitaire, ni d'aucun motif exceptionnel qui pourrait justifier son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D'autre part, les justificatifs qu'il produit à l'appui de sa requête ne démontrent pas, ainsi qu'il a été dit au point 4, que M. B... résiderait de façon habituelle sur le territoire depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée. Le moyen tiré de ce que l'arrêté serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut donc qu'être écarté.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :
7. Il résulte de ce qui précède que la décision refusant à M. B... la délivrance d'un titre de séjour est légale. Le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de celle l'obligeant à quitter le territoire ne peut donc qu'être écarté.
8. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
9. Il résulte de ce qui précède que la décision obligeant M. B... à quitter le territoire est légale. Le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de celle fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement ne peut donc qu'être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du 9 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 23 février 2023 du préfet des Bouches-du-Rhône. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également, par voie de conséquence, être rejetées.
D É C I D E
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Decaux et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 20 juin 2024, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président-assesseur,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juillet 2024
Le rapporteur,
Signé
A. CLAUDE-MOUGEL
Le président,
Signé
P. PORTAIL
La greffière,
Signé
N. JUAREZ
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24MA00567
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