Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) SERIP a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel négatif en date du 4 juin 2021 par lequel le maire de la commune de Sainte-Maxime a prononcé le caractère irréalisable du programme immobilier de 67 logements collectifs dont 38 sociaux sur un terrain situé à Sainte-Maxime ainsi que l'arrêté en date du 27 juillet 2021 par lequel le maire de la commune de Sainte-Maxime a refusé de délivrer un permis de construire à la SAS BNP en vue de réaliser ce programme.
Par un jugement n° 2102109, 2102636, 2102442 du 26 janvier 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 22 mars, 31 juillet 2024, la SAS SERIP, représentée par Me Mendes Constante, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 26 janvier 2024 ;
2°) d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel négatif en date du 4 juin 2021, et l'arrêté de refus de permis de construire en date du 27 juillet 2021, précités ;
3°) d'enjoindre à la commune de Sainte-Maxime de lui délivrer un certificat d'urbanisme opérationnel positif et un permis de construire, dans un délai de huit jours à compter de la notification du l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 3 000 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de de la commune de Sainte-Maxime la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a intérêt pour agir ;
- les dispositions du plan de prévention des risques naturels incendies de forêt sur lesquelles se fonde la commune sont entachées d'une erreur de droit et d'un détournement de procédure dès lors que leur application immédiate, décidée par arrêté du préfet en date du 18 décembre 2013, est nécessairement temporaire et qu'un plan de prévention aurait dû intervenir près de 4 ans et demi suivant l'arrêté du 13 octobre 2003 qui en a prescrit l'élaboration ;
- l'opposabilité anticipée des dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles méconnaît les conditions d'exercice du droit de propriété, tel qu'il résulte des dispositions des articles 2 et 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, des articles 544 et 545 du code civil et des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les aménagements prescrits par le PPRIF au titre de la défense de la forêt contre l'incendie pour rendre la zone litigieuse comme étant constructible ont été réalisés ;
- le zonage ainsi retenu par le PPRIF est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'administration est tenue d'abroger le règlement du PPRIF en application des dispositions de l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 août 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 août 2024, la commune de Sainte-Maxime conclut au rejet de la requête et à ce soit mise à la charge de la société SERIP la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés ;
- en tout état de cause, si la parcelle devait relever de la zone EN2, elle ne respecterait pas les dispositions de l'article 4.2.1.2 du plan de prévention des risques naturels incendies de forêt ;
- le motif tiré de ce que l'autorisation ne peut être délivrée sans méconnaître les dispositions de l'article L. 425-6 du code de l'urbanisme en l'absence d'autorisation de défrichement peut être substitué au motif initial.
Un mémoire enregistré le 6 septembre 2024, enregistré pour la requérante, n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la déclaration des droits de l'homme et du citoyen
- le code de l'environnement ;
- le code forestier ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code civil ;
- le décret n° 2011-765 du 28 juin 2011 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dyèvre ;
- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,
- et les observations de Me Bezol, représentant la SAS Serip, de Me Plenot, représentant. La commune de Sainte-Maxime, et de Mme A... représentant le ministre de la transition écologie et de la cohésion des territoires.
Une note en délibéré présentée par la SAS Serip a été enregistrée le 16 septembre 2024.
Considérant ce qui suit :
1. Par un certificat d'urbanisme opérationnel négatif en date du 4 juin 2021, le maire de la commune de Sainte-Maxime a indiqué le caractère irréalisable du programme immobilier de 67 logements collectifs dont 38 sociaux sur une parcelle située au quartier le Couloubrier, cadastrée section E n° 1805, appartenant à la SAS SERIP. Par un arrêté du 27 juillet 2021, le maire de la commune de Sainte-Maxime a refusé de délivrer un permis de construire à la SAS BNP en vue de réaliser ce programme. La SAS SERIP relève appel du jugement du 26 janvier 2024 du tribunal administratif de Toulon qui a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces deux décisions.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne l'exception d'illégalité de l'arrêté préfectoral du 18 décembre 2013
2. Par arrêté du 13 octobre 2003, le préfet du Var a prescrit la réalisation d'un plan de prévention des risques naturels d'incendie de forêt (PPRIF) sur le territoire de la commune de Sainte-Maxime. Par arrêté du 18 décembre 2013, abrogeant un précédent arrêté du 13 juillet 2012 ayant le même objet, le préfet a, sur le fondement de l'article L. 562-2 du code de l'environnement, rendu immédiatement opposables certaines dispositions du projet de PPRIF. Pour délivrer un certificat d'urbanisme opérationnel négatif le 4 juin 2021 et pour refuser de délivrer à la SAS SERIP, par arrêté du 27 juillet 2021, le permis de construire demandé, le maire de Sainte Maxime s'est fondé sur les dispositions de l'article 3.2 du PPRIF, qui ont pour effet d'interdire en zone EN1 les constructions nouvelles à usage d'habitation. La SAS SERIP conteste par voie d'exception la légalité du maintien en vigueur de l'arrêté préfectoral du 18 décembre 2013.
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " Sous réserve de l'application des articles L. 600-12-1 et L. 442-14, l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le plan local d'urbanisme, le document d'urbanisme en tenant lieu ou la carte communale immédiatement antérieur. ". Aux termes de l'article L. 600-12-1 du code, dans sa rédaction issue de cette même loi : " L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale sont par elles-mêmes sans incidence sur les décisions relatives à l'utilisation du sol ou à l'occupation des sols régies par le présent code délivrées antérieurement à leur prononcé dès lors que ces annulations ou déclarations d'illégalité reposent sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet. / Le présent article n'est pas applicable aux décisions de refus de permis ou d'opposition à déclaration préalable. Pour ces décisions, l'annulation ou l'illégalité du document d'urbanisme leur ayant servi de fondement entraîne l'annulation de ladite décision. ".
4. Il résulte de l'article L. 600-12-1 que l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un document local d'urbanisme n'entraine pas l'illégalité des autorisations d'urbanisme délivrées lorsque cette annulation ou déclaration d'illégalité repose sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet en cause. Il appartient au juge, saisi d'un moyen tiré de l'illégalité du document local d'urbanisme à l'appui d'un recours contre une autorisation d'urbanisme, de vérifier d'abord si l'un au moins des motifs d'illégalité du document local d'urbanisme est en rapport direct avec les règles applicables à l'autorisation d'urbanisme. Un vice de légalité externe est étranger à ces règles, sauf s'il a été de nature à exercer une influence directe sur des règles d'urbanisme applicables au projet. En revanche, sauf s'il concerne des règles qui ne sont pas applicables au projet, un vice de légalité interne ne leur est pas étranger. Par ailleurs, eu égard aux effets de la règle posée à l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme, lorsque le document local d'urbanisme sous l'empire duquel a été délivrée l'autorisation contestée est annulé ou déclaré illégal pour un ou plusieurs motifs non étrangers aux règles applicables au projet en cause et dans le cas où ce ou ces motifs affectent la légalité de la totalité du document d'urbanisme, la légalité de l'autorisation contestée doit être appréciée au regard de l'ensemble du document immédiatement antérieur ainsi remis en vigueur.
5. Le contrôle exercé par le juge administratif sur un acte qui présente un caractère réglementaire porte sur la compétence de son auteur, les conditions de forme et de procédure dans lesquelles il a été édicté, l'existence d'un détournement de pouvoir et la légalité des règles générales et impersonnelles qu'il énonce, lesquelles ont vocation à s'appliquer de façon permanente à toutes les situations entrant dans son champ d'application tant qu'il n'a pas été décidé de les modifier ou de les abroger. Le juge administratif exerce un tel contrôle lorsqu'il est saisi, par la voie de l'action, dans le délai de recours contentieux. En outre, en raison de la permanence de l'acte réglementaire, la légalité des règles qu'il fixe, comme la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir doivent pouvoir être mises en cause à tout moment, de telle sorte que puissent toujours être sanctionnées les atteintes illégales que cet acte est susceptible de porter à l'ordre juridique. Après l'expiration du délai de recours contentieux, une telle contestation peut être formée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure prise pour l'application de l'acte réglementaire ou dont ce dernier constitue la base légale. Elle peut aussi prendre la forme d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision refusant d'abroger l'acte réglementaire, comme l'exprime l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration (CRPA). Si, dans le cadre de ces deux contestations, la légalité des règles fixées par l'acte réglementaire, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir peuvent être utilement critiquées, il n'en va pas de même des conditions d'édiction de cet acte, les vices de forme et de procédure dont il serait entaché ne pouvant être utilement invoqués que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'acte réglementaire lui-même et introduit avant l'expiration du délai de recours contentieux.
6. Aux termes du II de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, les plans de prévention des risques naturels prévisibles " ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; ". Aux termes de l'article L. 562-2 du même code : " Lorsqu'un projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles contient certaines des dispositions mentionnées au 1° et au 2° du II de l'article L. 562-1 et que l'urgence le justifie, le préfet peut, après consultation des maires concernés, les rendre immédiatement opposables à toute personne publique ou privée par une décision rendue publique. / Ces dispositions cessent d'être opposables si elles ne sont pas reprises dans le plan approuvé. ".
7. Les dispositions de l'article L. 562-2 du code de l'environnement, dans leur rédaction résultant de l'article 222 de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, prévoient seulement que les dispositions du plan de prévention des risques naturels prévisibles faisant l'objet d'une application anticipée cessent d'être opposables si elles ne sont pas reprises dans le plan approuvé mais ne fixent aucun délai au-delà duquel elles cessent automatiquement d'être opposables. Si le dernier alinéa de l'article R. 562-2 du même code, ajouté à cet article par le I de l'article 1er du décret du 28 juin 2011 relatif à la procédure d'élaboration, de révision et de modification des plans de prévention des risques naturels prévisibles, dispose que ce document " est approuvé dans les trois ans qui suivent l'intervention de l'arrêté prescrivant son élaboration. Ce délai est prorogeable une fois, dans la limite de dix-huit mois, par arrêté motivé du préfet si les circonstances l'exigent, notamment pour prendre en compte la complexité du plan ou l'ampleur et la durée des consultations ", il résulte de l'article 2 de ce décret que ces dispositions ne sont applicables qu'aux plans dont l'établissement a été prescrit par un arrêté pris postérieurement au dernier jour du premier mois suivant la publication du décret, soit à partir du 1er août 2011, ce que la SAS SERIP ne conteste d'ailleurs pas. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la procédure d'établissement du PPRIF de Sainte-Maxime aurait été abandonnée. Le préfet a d'ailleurs expliqué en première instance que la procédure avait été ralentie notamment par les contraintes pesant sur la tenue de réunions liées à la crise sanitaire intervenue en 2020 et par la nécessité de réexaminer les niveaux de risque en fonction des travaux d'aménagement exécutés. Dans ces conditions, l'importance du délai écoulé à ce jour depuis la date du 13 octobre 2003 à laquelle le préfet du Var a prescrit la réalisation d'un PPRIF sur le territoire de la commune de Sainte-Maxime et celle du 18 décembre 2013 à laquelle il a rendu immédiatement opposables certaines dispositions du projet de plan, ne rend pas illégal le maintien de l'arrêté du 18 décembre 2013 ni ne l'entache d'un détournement de procédure.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : " La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité. ". Aux termes de l'article 544 du code civil : " La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. ". Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour règlementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. ".
9. L'opposabilité anticipée des dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles répond à un objectif de sécurité publique. En vertu de l'article L. 562-2 du code de l'environnement, ces dispositions cessent d'être opposables si elles ne sont pas reprises dans le plan approuvé et sont donc provisoires. Elles ont uniquement pour effet d'interdire ou de restreindre, dans l'attente de la publication du plan, des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations. Par ailleurs, le législateur n'a pas exclu toute indemnisation dans le cas exceptionnel où le propriétaire d'un bien supporterait une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi. Par suite, le maintien en vigueur de l'arrêté du 18 décembre 2013 ne méconnaît pas les conditions d'exercice du droit de propriété tel qu'il résulte des dispositions et stipulations précitées.
10. En troisième lieu, le règlement du PPRIF de Sainte-Maxime dont l'application anticipée a été décidée, sur ce point, par l'arrêté du 18 décembre 2013 délimite, outre des zones rouges en règle générale inconstructibles et des zones " non concernées par le risque " (NCR), des zones à enjeux (Enx) correspondant à un niveau d'aléa faible à très élevé et qui font l'objet d'une différenciation en fonction de l'intensité de l'aléa et de l'amélioration de la défendabilité envisageable ou non pour ces zones. Le règlement distingue en particulier, à ce titre, un zonage EN'1, exposé à un risque de niveau 2 fort à très fort recouvrant des " zones bâties ou non bâties pour lesquelles la constructibilité future est proscrite en raison d'un aléa le plus souvent élevé ou très élevé et d'une défendabilité actuelle insuffisante mais a priori améliorable ". Il prévoit aussi un zonage En2, exposé à un risque de niveau 3 modéré à fort et qui est appliqué à des " zones bâties ou non bâties sur lesquelles est admise une constructibilité future sous réserve de prise en compte d'un certain nombre de prescriptions ". La note de présentation du plan expose que la délimitation du zonage résulte de la prise en compte des enjeux d'urbanisme, de l'aléa et des équipements de défense existants. Elle comporte un tableau d'où il résulte que des espaces présentant un enjeu et exposés à un niveau d'aléa soit modéré, soit élevé ou très élevé sont classés en zone EN'1 lorsque leur défendabilité est insuffisante mais améliorable et, respectivement, en zone EN3 ou EN2 lorsqu'ils sont défendables en raison de la réalisation des travaux de défense contre l'incendie sur la totalité de la zone. Il précise néanmoins que la zone EN'1 peut comprendre des sous-zones à l'intérieur desquelles un zonage différent sera retenu (EN2 ou EN3) dès lors que des travaux d'amélioration de la défendabilité seront suffisamment avancés, cette délimitation prenant en compte " la cohérence de chaque sous-zone au regard des possibilités d'évacuation des habitants et d'intervention des services de secours ". Il liste les sous-zones concernées et les travaux de défense contre l'incendie dont la réalisation permet d'envisager le déclassement de ces espaces dans le PPRIF définitif et dont la localisation figure sur des cartes annexées.
11. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée section E n° 1805 qui constitue le terrain d'assiette du projet litigieux, est exposée à un niveau d'aléa incendie fort à très fort. Elle a été classée par le projet de PPRIF en sous-zone EN'1h. La note de présentation mentionnée au point 10 envisage le déclassement de cette sous-zone en zone EN2 dans le cas de la création d'une voie large de 4 m, dénommée V7, reliant la route départementale 25 au lotissement du Couloubrier ainsi que le débroussaillement de la zone tampon D5 située à l'ouest de la parcelle du projet en litige. Il ressort des pièces du dossier, notamment du constat d'huissier dressé le 27 novembre 2020 et du rapport de juin 2021 établi par l'agence MTDA, que des travaux ont été effectués pour la création de cette voie laquelle est praticable par les services de secours et signalée comme telle par des panneaux indicateurs. La seule circonstance qu'aucune visite de réception de l'ouvrage n'ait eu lieu à la date des décisions en litige, alors que la voie V7 a été mise en service, n'est pas de nature à faire constater son absence de défendabilité de la zone qu'elle protège, alors même que son tracé diffère de celui prescrit par le plan. En outre, ce même rapport indique que la zone D5 a fait l'objet d'un débroussaillement. Au regard de ces éléments, il ressort des pièces du dossier qu'ont été réalisés les travaux d'amélioration de la défendabilité retenus comme nécessaires par le PPRIF afin d'envisager le déclassement du terrain du projet en litige dans le PPRIF définitif. Par suite, la SAS SERIP est fondée à soutenir que le maintien, même provisoire, d'un classement en zone EN'1 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et que, en conséquence, le maire de Sainte-Maxime n'a pu légalement fonder les décisions attaquées sur les dispositions de l'article 3.2 du PPRIF.
12. La société SERIP ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration pour contester la décision refusant de lui délivrer un permis de construire et celle lui délivrant un certificat d'urbanisme opérationnel négatif.
En ce qui concerne les substitutions de motifs demandées par la commune
13. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
14. Si la commune de Sainte-Maxime se prévaut des dispositions de l'article 4.2.1.2. de la partie I du règlement du PPRIF pour invoquer un nouveau motif tiré de la méconnaissance du projet de l'obligation de création d'une voie périphérique sur tout le pourtour du projet en cas de classement du projet en zone EN2, il résulte de ce qui a été dit au point 12 du présent arrêt que l'illégalité du classement du terrain assiette du projet en zone EN'1 n'a pas pour effet son classement en zone EN'2, lequel ne peut résulter que de l'approbation définitive du PPRIF. Par suite, la commune ne peut utilement se prévaloir de ce motif qui ne peut être substitué au motif initial.
15. Aux termes de l'article L. 425-6 du code de l'urbanisme : " Conformément à l'article L. 341-7 du nouveau code forestier, lorsque le projet porte sur une opération ou des travaux soumis à l'autorisation de défrichement prévue aux articles L. 341-1 et L. 341-3 du même code, celle-ci doit être obtenue préalablement à la délivrance du permis. ". Aux termes de l'article R. 431-19 du même code : " Lorsque les travaux projetés nécessitent une autorisation de défrichement en application des articles L. 341-1, L. 341-3 ou L. 214-13 du code forestier, la demande de permis de construire est complétée par la copie de la lettre par laquelle le préfet fait connaître au demandeur que son dossier de demande d'autorisation de défrichement est complet, si le défrichement est ou non soumis à reconnaissance de la situation et de l'état des terrains et si la demande doit ou non faire l'objet d'une enquête publique. ".
16. La commune de Sainte-Maxime fait valoir en appel que le motif tiré de l'absence d'autorisation de défrichement doit être substitué au motif initial opposé à la demande de permis de construire. Il ressort des pièces du dossier que le dossier de demande de permis de construire déposé le 29 juin 2021 comportait une autorisation de défrichage obtenue par arrêté du 27 juillet 2017 pour une surface de 9 300 m² sur la parcelle assiette du projet, pour la réalisation d'une aire de jeux et stationnement ainsi que la demande déposée le 24 juin 2021 par la société BNP Paribas Immobilier Résidentiel de défrichement sur cette même parcelle pour une surface de 4 870 m². Toutefois, l'autorisation implicite de défrichement obtenue sur cette dernière demande a été retirée par un arrêté du préfet du Var du 25 octobre 2021. Par un jugement devenu définitif n° 2103459 du 24 août 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté le recours formé à l'encontre de cette décision. Ainsi, à la date du refus de permis en litige du 27 juillet 2021, le pétitionnaire ne disposait pas de l'autorisation de défrichage prévue par les dispositions rappelées au point 15 du présent arrêt. Il en résulte que, pour ce motif, la commune ne pouvait délivrer l'autorisation sollicitée par la SAS BNP. La commune de Sainte-Maxime est donc également fondée à soutenir que le permis de construire sollicité ne pouvait être délivré pour ce motif supplémentaire.
17. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS SERIP est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande d'annulation du certificat d'urbanisme opérationnel négatif du 4 juin 2021.
18. Pour l'application de l'article L. 600-4 du code de l'urbanisme aucun autre moyen invoqué à l'encontre de cette décision n'est susceptible, en l'état du dossier, de fonder son annulation.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
19. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ".
20. L'annulation par une décision juridictionnelle d'un certificat d'urbanisme négatif ne rend pas le demandeur titulaire d'un certificat positif et ne crée aucun droit à son profit. Le présent arrêt, qui annule la décision du 4 juin 2021, implique seulement que le maire de Sainte-Maxime statue à nouveau sur la demande de la société requérante. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au maire de Sainte-Maxime de procéder à un nouvel examen dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction du prononcé d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SAS SERIP, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la commune de Sainte-Maxime au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune de Sainte-Maxime une somme au titre des frais exposés par la SAS SERIP et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2102109, 2102636, 2102442 du 26 janvier 2024 du tribunal administratif de Toulon est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la SAS SERIP formées à l'encontre de la décision du 4 juin 2021 certificat opérationnel négatif
Article 2 : La décision du 4 juin 2021 refusant le certificat opérationnel négatif est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au maire de Sainte Maxime d'examiner à nouveau la demande de certificat d'urbanisme de la SAS SERIP dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de chacune des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée SERIP, à la commune de Sainte Maxime et au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- Mme Courbon, présidente assesseure,
- Mme Dyèvre première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2024.
N° 24MA00709
2
nb