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14/11/2024 | FRANCE | N°23MA01843

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 1ère chambre, 14 novembre 2024, 23MA01843


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. E... B... et Mme D... A... épouse B... ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler les arrêtés du 16 novembre 2022 par lesquels le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de ces mesures d'éloignement.



Par un jugement n° 2206008 - 2206009 du 14 juin 2023, le tribunal administratif de N

ice a rejeté ces demandes.



Procédure devant la Cour :



Par une requête et un mém...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... et Mme D... A... épouse B... ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler les arrêtés du 16 novembre 2022 par lesquels le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de ces mesures d'éloignement.

Par un jugement n° 2206008 - 2206009 du 14 juin 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté ces demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 juillet et le 23 novembre 2023, M. E... B... et Mme D... A... épouse B..., représentés par Me Traversini, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 14 juin 2023 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 16 novembre 2022 du préfet des Alpes-Maritimes ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- il n'est pas établi que le préfet a respecté les dispositions de l'arrêté du 5 janvier 2017 au sujet de l'appréciation de l'existence d'une offre de soins dans le pays d'origine des requérants leur permettant de bénéficier d'un traitement approprié ;

- ils ne peuvent bénéficier d'un traitement approprié à leur état de santé aux Philippines ;

- les décisions leur refusant le droit au séjour méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'ils résident régulièrement en France depuis 2020, que deux de leurs filles résident régulièrement sur le territoire et qu'ils sont dépourvus d'attaches dans leur pays d'origine ;

- ces décisions méconnaissent l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- ces décisions sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur leur vie personnelle ;

- les décisions leur faisant obligation de quitter le territoire méconnaissent les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- ces décisions sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité des décisions leur refusant le droit au séjour.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes, qui n'a pas produit de mémoire.

Mme A... épouse B... et M. B... n'ont pas été admis à l'aide juridictionnelle respectivement par deux décisions du 29 septembre 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Claudé-Mougel a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... épouse B... et M. B..., de nationalité philippine, demandent l'annulation du jugement du 14 juin 2023 du tribunal administratif de Nice qui a rejeté leur requête à l'encontre des arrêtés du 16 novembre 2022 par lesquels le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de ces mesures d'éloignement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. /La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...) " Aux termes de l'arrêté du 5 janvier 2017 susvisé : " L'avis du collège de médecins de l'OFII est établi sur la base du rapport médical élaboré par un médecin de l'office selon le modèle figurant dans l'arrêté du 27 décembre 2016 mentionné à l'article 2 ainsi que des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays dont le demandeur d'un titre de séjour pour raison de santé est originaire. / Les possibilités de prise en charge dans ce pays des pathologies graves sont évaluées, comme pour toute maladie, individuellement, en s'appuyant sur une combinaison de sources d'informations sanitaires. / L'offre de soins s'apprécie notamment au regard de l'existence de structures, d'équipements, de médicaments et de dispositifs médicaux, ainsi que de personnels compétents nécessaires pour assurer une prise en charge appropriée de l'affection en cause. / L'appréciation des caractéristiques du système de santé doit permettre de déterminer la possibilité ou non d'accéder effectivement à l'offre de soins et donc au traitement approprié. /Afin de contribuer à l'harmonisation des pratiques suivies au plan national, des outils d'aide à l'émission des avis et des références documentaires présentés en annexe II et III sont mis à disposition des médecins de l'office. "

3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et s'il peut bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La partie à laquelle l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger, et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

4. M. B... et Mme A... épouse B..., qui ont accepté la levée du secret médical, souffrent l'un, d'une cardiopathie ischémique compliquée par sténose de carotide interne, qui a justifié deux interventions chirurgicales de revascularisation, et d'un diabète non insulinodépendant (DNID) compliqué de neuropathie et d'une insuffisance rénale chronique et l'autre, d'un diabète non insulinodépendant (DNID) compliqué de neuropathie et d'une insuffisance rénale chronique, ainsi que d'une hypertension artérielle et une polyarthrose invalidante au niveau du rachis lombaire et des genoux qui a également nécessité une intervention chirurgicale. Il ressort des avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) que si ces pathologies nécessitent une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ils peuvent bénéficier effectivement d'un traitement approprié eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont ils sont originaires. L'attestation d'un médecin généraliste du 13 décembre 2022, au demeurant postérieure de près d'un mois aux arrêtés attaqués, qui concerne uniquement M. B... et dont il ressort seulement que " le suivi médical dans son pays d'origine est très difficile voire impossible selon les conditions de vie et le lieu géographique de son habitation " n'est pas de nature à établir que les appelants ne pourraient effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans leur pays d'origine. En outre, aucun texte ni aucun principe n'impose au collège des médecins de l'OFII de faire état dans son avis des sources et références sur lesquelles il s'est fondé pour apprécier la disponibilité d'un tel traitement. Ces deux moyens doivent, dès lors, être écartés.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... et Mme A... épouse B... sont entrés sur le territoire français en 2020, alors qu'ils étaient respectivement âgés de 64 et de 66 ans. Deux de leurs filles vivent à Nice, sont titulaires de titres de séjour, et sont mariées avec des compatriotes également présents régulièrement sur le territoire, leur troisième fille vivant en Italie en étant également titulaire d'un titre de séjour. Cependant, les appelants ne produisent aucun autre élément démontrant leur insertion dans la société française et, ainsi qu'il a été dit au point 4, leur état de santé ne saurait à lui seul justifier de leur maintien sur le territoire. Eu égard au caractère récent de leur entrée sur le territoire à la date des arrêtés attaqués et alors qu'ils ont passé l'essentiel de leur existence aux Philippines, ces circonstances ne sauraient suffire à établir que ces arrêtés attaqués porte atteinte au droit de M. B... et de Mme A... épouse B... de mener une vie privée et familiale normale. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

7. En troisième lieu, termes du premier alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. " Alors que leur état de santé ne saurait justifier à lui seul leur maintien sur le territoire français, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, et qu'ils ne font valoir aucun autre motif dont le caractère exceptionnel serait susceptible de justifier leur maintien sur le territoire, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que le préfet des Alpes-Maritimes aurait méconnu ces dispositions.

8. En quatrième lieu, le moyen tiré de ce que le préfet des Alpes-Maritimes aurait commis une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences des arrêtés attaqués sur la vie personnelle de M. B... et Mme A... épouse B... doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.

9. En cinquième lieu, aux termes de L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français :/ 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. " Ainsi qu'il a été dit au point 4, M. B... et Mme A... épouse B... ne produisent aucun élément de nature à établir qu'ils ne pourraient pas bénéficier d'un traitement approprié à leurs pathologies aux Philippines. Le moyen tiré de ce que les décisions leur faisant obligation de quitter le territoire méconnaissent ces dispositions ne peuvent dès lors qu'être écartés.

10. En sixième et dernier lieu, il résulte de ce qui précède que les décisions refusant M. B... et Mme A... épouse B... la délivrance d'un titre de séjour sont légales. Ils ne peuvent dès lors soutenir que les décisions leur faisant obligation de quitter le territoire sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité des décisions leur refusant le droit au séjour.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... et Mme A... épouse B... ne sont pas fondés à demander l'annulation du jugement du 14 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande dirigée contre les arrêtés du 16 novembre 2022 du préfet des Alpes-Maritimes. Leurs conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également, et par voie de conséquence, être rejetées.

D É C I D E

Article 1er : La requête de M. B... et Mme A... épouse B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., à Mme D... A... épouse B..., au ministre de l'intérieur et à Me Traversini.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 24 octobre 2024, où siégeaient :

- M. Portail, président de chambre,

- Mme C..., vice-présidente,

- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 novembre 2024.

2

N°23MA01843


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23MA01843
Date de la décision : 14/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Arnaud CLAUDÉ-MOUGEL
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : TRAVERSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-14;23ma01843 ?
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