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12/12/2024 | FRANCE | N°23MA02960

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 1ère chambre, 12 décembre 2024, 23MA02960


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société civile de construction vente (SCCV) Aix Route d'Eguilles a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2021 par lequel le maire d'Aix-en-Provence lui a refusé la délivrance d'un permis de construire 25 logements collectifs, sur des parcelles cadastrées section MD nos 157, 158, 159, 166 et 167, situées 50 chemin des Plaideurs sur le territoire communal, ensemble la décision du 30 novembre 2021 rejetant son recours gracieux.>


Par un jugement n° 2200984 du 9 octobre 2023, le tribunal administratif de M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile de construction vente (SCCV) Aix Route d'Eguilles a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2021 par lequel le maire d'Aix-en-Provence lui a refusé la délivrance d'un permis de construire 25 logements collectifs, sur des parcelles cadastrées section MD nos 157, 158, 159, 166 et 167, situées 50 chemin des Plaideurs sur le territoire communal, ensemble la décision du 30 novembre 2021 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2200984 du 9 octobre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 décembre 2023 et 19 août 2024, la SCCV Aix Route d'Eguilles, représentée par Me Ibanez, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du 9 octobre 2023 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2021 du maire d'Aix-en-Provence, ensemble la décision du 30 novembre 2021 rejetant son recours gracieux ; à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 4 juin 2021 par lequel le maire d'Aix-en-Provence a refusé de délivrer à la SCCV Aix Chemin des Plaideurs un permis de construire portant sur le même projet ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

- il est entaché d'un vice de procédure au regard des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ;

- l'avis du 4 août 2021 de la société Enedis est entaché d'une erreur d'appréciation s'agissant de la longueur du raccordement électrique nécessaire au projet litigieux, au vu notamment de l'avis du 25 février 2021 de cette même société ; par voie de conséquence, l'arrêté contesté est illégal au regard des dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté contesté est entaché d'un défaut d'examen réel et complet de la situation particulière du projet litigieux ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme ;

- le motif de refus tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme n'était pas opposable au projet litigieux, s'agissant d'une commune couverte par un plan local d'urbanisme (PLU) ;

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article UD 3 du règlement du PLU d'Aix-en-Provence ;

- il méconnaît l'article UD 11 du règlement du PLU d'Aix-en-Provence.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 mai 2024, la commune d'Aix-en-Provence, représentée par Me Andreani, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SCCV Aix Route d'Eguilles la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande de première instance était irrecevable, eu égard au caractère purement confirmatif de la décision contestée ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- l'arrêté contesté peut être légalement fondé sur les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

Par courrier du 20 novembre 2024, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêté était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions, présentées à titre subsidiaire, tendant à l'annulation de l'arrêté de refus de permis de construire du 4 juin 2021, dès lors que ces conclusions sont nouvelles en appel et qu'au surplus, ce refus de permis de construire, notifié le 8 juin 2021 à la SCCV Aix Chemin des Plaideurs, n'a fait l'objet d'aucun recours et est devenu définitif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure ;

- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public ;

- les observations de Me Ranson, représentant la SCCV Aix Route d'Eguilles, et celles de Me Tosi, représentant la commune d'Aix-en-Provence.

Une note en délibéré a été enregistrée le 4 décembre 2024, présentée pour la SCCV Aix Route d'Eguilles, et non communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 15 septembre 2021, le maire d'Aix-en-Provence a refusé de délivrer à la SCCV Aix Route d'Eguilles un permis de construire 25 logements collectifs, sur des parcelles cadastrées section MD nos 157, 158, 159, 166 et 167, situées 50 chemin des Plaideurs sur le territoire communal. La SCCV Aix Route d'Eguilles demande l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre cet arrêté, ensemble la décision du 30 novembre 2021 rejetant son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué. (...) ".

3. Si l'arrêté du 15 septembre 2021 était fondé sur l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme, il ne ressort ni des termes de cet arrêté, ni d'aucune autre pièce du dossier que le maire d'Aix-en-Provence s'estimait dans une situation de compétence liée pour refuser le permis de construire. Par suite, les premiers juges ont, à bon droit, relevé d'office la situation de compétence liée dans laquelle se trouvait cette autorité dès lors qu'ils estimaient fondé le motif tiré de la méconnaissance de l'article L. 111-11, après en avoir informé les parties par courrier du 11 septembre 2023. Par suite, la SCCV Aix Route d'Eguilles n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif a relevé d'office un moyen qui figurait déjà dans le dossier qui lui était soumis.

4. En second lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". Il résulte de ces dispositions, destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction, que la méconnaissance de l'obligation de communiquer un mémoire ou une pièce contenant des éléments nouveaux est en principe de nature à entacher la procédure d'irrégularité. Il n'en va autrement que dans le cas où il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette méconnaissance n'a pu préjudicier aux droits des parties.

5. D'une part, il ressort du dossier de première instance que le tribunal administratif a, par une mesure d'instruction diligentée le 23 août 2023, sollicité des deux parties la production de l'avis complet du gestionnaire de réseau Enedis du 4 août 2021. Cet avis, produit par la commune le 11 septembre 2023, n'a pas été communiqué à la SCCV Aix Route d'Eguilles. Il ressort toutefois du dossier de première instance qu'il figurait déjà dans le dossier de demande de permis de construire produit par la commune à l'appui de son mémoire en défense du 27 mars 2023, communiqué à la SCCV. Si cet exemplaire de l'avis ne comportait pas le plan de l'extension qui en constituait la deuxième page, il mentionnait expressément que le raccordement du projet au réseau électrique nécessitait une extension du réseau de 290 mètres et le coût de cette extension à la charge de la collectivité. Par suite, et alors que la SCCV Aix Route d'Eguilles a longuement remis en cause, dans ses écritures, l'appréciation ressortant de cet avis et notamment la nécessité d'une telle extension du réseau, l'absence de communication de l'avis complet n'a pas porté atteinte au caractère contradictoire de la procédure.

6. D'autre part, si le tribunal administratif n'a pas communiqué le mémoire en réplique de la SCCV Aix Route d'Eguilles du 7 avril 2023 et sa note en délibéré du 3 octobre 2023 à la commune d'Aix-en-Provence, il a visé ces productions et les a prises en compte, ainsi que cela ressort des motifs du jugement attaqué. Dans ces conditions, et alors que le tribunal a rejeté la requête, l'absence de communication de ces productions à la commune n'a pas préjudicié aux droits des parties. Par suite, le moyen tiré de l'atteinte au principe du caractère contradictoire de la procédure doit être écarté.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

7. Une décision dont l'objet est le même qu'une première décision revêt un caractère confirmatif, dès lors que ne s'est produit entre temps aucun changement dans les circonstances de droit ou de fait de nature à emporter des conséquences sur l'appréciation des droits ou prétentions en litige.

8. Il ressort des pièces du dossier que la SCCV Aix Chemin des Plaideurs a déposé, le 27 novembre 2020, une demande de permis de construire portant sur la construction de 25 logements collectifs, pour une surface de plancher de 1 550 m², sur des parcelles cadastrées section MD nos 157, 158, 159, 166 et 167, situées 50 chemin des Plaideurs à Aix-en-Provence. Cette demande a fait l'objet d'un refus par un arrêté du 4 juin 2021. La SCCV Aix Route d'Eguilles, qui a le même siège social, les mêmes associés et le même représentant que la SCCV Aix Chemin des Plaideurs, a présenté, le 17 juin 2021, une demande de permis de construire portant sur le même projet, qui a été refusée par l'arrêté du 15 septembre 2021 contesté dans la présente instance. La seule circonstance que ces deux demandes aient été présentées par deux personnes morales distinctes ne saurait, eu égard à l'identité des associés des deux sociétés concernées, que confirment les conclusions subsidiaires présentées par la SCCV Aix Route d'Eguilles et dirigées contre le refus de permis de construire opposé à la SCCV Aix Chemin des Plaideurs, constituer, à elle seule, un changement dans les circonstances de droit ou de fait entre les deux décisions de refus de permis de construire. Si la société requérante soutient par ailleurs qu'un changement dans les circonstances de fait a eu lieu entre les deux arrêtés susvisés, résidant dans un changement d'avis de la société Enedis, gestionnaire du réseau public d'électricité, qui a émis un premier avis, le 25 février 2021, dans le cadre de la demande présentée par la SCCV Aix Chemin des Plaideurs, concluant à une possibilité de raccordement du projet au réseau public d'électricité, avant d'émettre un second avis, le 4 août 2021, dans le cadre de la demande présentée par la SCCV Aix Route d'Eguilles, concluant à une nécessité d'extension de 290 mètres du réseau public d'électricité, ce second avis n'a toutefois pas été de nature à emporter des conséquences sur l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la demande dont elle était saisie, un refus ayant déjà été opposé à la SCCV Aix Chemin des Plaideurs.

9. En l'absence de toute modification dans les circonstances de fait ou de droit de nature à emporter des conséquences sur l'appréciation des droits ou prétentions en litige, l'arrêté contesté du 15 septembre 2021 rejetant la demande de permis de construire présentée par la SCCV Aix Route d'Eguilles a le caractère d'une décision purement confirmative du précédent arrêté du 4 juin 2021 susvisé, notifié le 8 juin 2021 avec la mention des voies et délais de recours, et devenu définitif. Il n'a, dès lors, pu avoir pour effet de rouvrir le délai de recours contentieux, lequel expirait le 8 août 2021. Par suite, la demande présentée le 2 février 2022 par la SCCV Aix Route d'Eguilles devant le tribunal administratif de Marseille, tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 septembre 2021, était tardive, et donc irrecevable. En outre, à supposer même que la demande de permis de construire présentée par la SCCV Aix Route d'Eguilles le 17 juin 2021 puisse être regardée comme un recours gracieux dirigé contre l'arrêté du 4 juin 2021 susvisé, ce recours a été rejeté par l'arrêté contesté dans la présente instance, qui comportait également la mention des voies et délais de recours, et dont la société requérante a eu connaissance au plus tard le 7 octobre 2021, date à laquelle elle a exercé un recours gracieux à son encontre. A cet égard, un recours gracieux faisant suite à un précédent recours gracieux introduit dans le délai de recours contentieux ne peut pas conserver ledit délai de recours contentieux. Ainsi, le délai de recours contentieux ouvert contre l'arrêté du 4 juin 2021 expirait au plus tard le 7 décembre 2021. Par suite, la requête enregistrée au greffe du tribunal administratif de Marseille le 2 février 2022 était, en tout état de cause, tardive et donc irrecevable.

10. Il résulte de ce qui précède que la SCCV Aix Route d'Eguilles n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 15 septembre 2021 du maire d'Aix-en-Provence.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Aix-en-Provence, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la SCCV Aix Route d'Eguilles au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCCV Aix Route d'Eguilles la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune d'Aix-en-Provence et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCCV Aix Route d'Eguilles est rejetée.

Article 2 : La SCCV Aix Route d'Eguilles versera à la commune d'Aix-en-Provence la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile de construction vente (SCCV) Aix Route d'Eguilles et à la commune d'Aix-en-Provence.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2024, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- Mme Courbon, présidente assesseure,

- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2024

2

N° 23MA02960


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23MA02960
Date de la décision : 12/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: Mme Audrey COURBON
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : SELARL ANDREANI-HUMBERT-COLLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 15/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-12;23ma02960 ?
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