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08/01/2025 | FRANCE | N°24MA02581

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, Juge des référés, 08 janvier 2025, 24MA02581


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier d'Arles à lui payer, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision de 8 785,10 euros à valoir sur l'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis.



Par une ordonnance n° 2305433 du 30 septembre 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a

rejeté sa requête.





Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 14...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier d'Arles à lui payer, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision de 8 785,10 euros à valoir sur l'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Par une ordonnance n° 2305433 du 30 septembre 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 octobre 2024, et un mémoire enregistré le 19 novembre 2024, Mme B..., représentée par Me Fargepallet, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 30 septembre 2024 ;

2°) statuant en référé, de condamner le centre hospitalier d'Arles à lui payer la somme provisionnelle de 8 785,10 euros à valoir sur son traitement du 21 septembre 2021 au 14 janvier 2022 dans un délai de 5 jours à compter de l'ordonnance à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Arles la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a droit au versement des indemnités journalières pour la période durant laquelle elle était en congé pour cause de maladie même si elle faisait l'objet d'une mesure de suspension pour absence de vaccination contre la covid-19 ;

- il y a une discrimination entre les agents en congé pour cause de maladie selon qu'ils sont vaccinés contre la covid- 19 ou pas ;

- elle a transmis ses arrêts de travail par lettre simple à son employeur et les produit devant la cour ;

- la juge des référés aurait dû statuer dans le délai d'un mois ;

- elle s'est retrouvée dans un situation de grande précarité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 novembre 2024, le centre hospitalier d'Arles, représenté par Me Vrignaut, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la cour a désigné Mme Fedi, présidente de la 2ème chambre, pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par les juges des référés des tribunaux du ressort.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 15 septembre 2021, le directeur du centre hospitalier d'Arles a suspendu, sur le fondement de l'article 14 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, Mme B..., orthophoniste, de ses fonctions sans rémunération à compter du 25 suivant jusqu'à la production d'un justificatif de vaccination ou de contre-indication à la vaccination contre la covid-19. Mme B... relève appel de l'ordonnance de la juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 30 septembre 2024 rejetant sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier d'Arles à lui payer, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision à valoir sur les sommes qu'elle aurait dû percevoir entre le 25 septembre 2021 et le 24 janvier 2022, période durant laquelle elle était en congé pour cause de maladie.

2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". Il résulte de ces dispositions que pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude.

Sur la régularité de l'ordonnance :

3. Les dispositions de l'article L. 511-1 du code de justice administrative, qui prévoient que "Le juge des référés (...) se prononce dans les meilleurs délais", si elles imposent à ce juge de statuer avec diligence sur les demandes dont il est saisi, n'ont ni pour objet, ni pour effet de faire du délai dans lequel il statue une condition de la régularité de l'ordonnance rendue. Par suite, la circonstance que l'ordonnance en litige soit intervenue plus de quinze mois après la saisine du tribunal administratif de Marseille n'est pas de nature à l'entacher d'irrégularité.

Sur le fond :

4. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 42 ". Aux termes du I de l'article 12 de la loi du 5 août 2021 : " Doivent être vaccinés, sauf contre-indication médicale reconnue, contre la covid-19 :1° Les personnes exerçant leur activité dans : a) Les établissements de santé mentionnés à l'article L. 6111-1 du code de la santé publique... ". Le III de l'article 14 de la même loi dispose que : " Lorsque l'employeur constate qu'un agent public ne peut plus exercer son activité en application du I, il l'informe sans délai des conséquences qu'emporte cette interdiction d'exercer sur son emploi ainsi que des moyens de régulariser sa situation. (...). A défaut, il est suspendu de ses fonctions ou de son contrat de travail. La suspension mentionnée au premier alinéa du présent III, qui s'accompagne de l'interruption du versement de la rémunération, prend fin dès que l'agent public remplit les conditions nécessaires à l'exercice de son activité prévues au I. Elle ne peut être assimilée à une période de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés ainsi que pour les droits acquis par l'agent public au titre de son ancienneté... ".

5. Il résulte des dispositions citées au point 4 que si le directeur d'un établissement de santé public peut légalement prendre une mesure de suspension à l'égard d'un agent qui ne satisfait pas à l'obligation vaccinale contre la covid-19 alors que cet agent est déjà en congé de maladie, cette mesure et la suspension de traitement qui lui est associée ne peuvent toutefois entrer en vigueur qu'à compter de la date à laquelle prend fin le congé de maladie de l'agent en question.

6. Il résulte de l'instruction que, par décision en date du 15 septembre 2021, le directeur du centre hospitalier d'Arles a suspendu Mme B..., de ses fonctions sans traitement à compter du 25 suivant jusqu'à production d'un justificatif de vaccination ou de contre-indication à la vaccination contre la covid-19. La requérante soutient que son employeur a commis une faute en la privant de son traitement durant plusieurs mois alors qu'elle a bénéficié jusqu'au 24 janvier 2022, d'arrêts pour cause de maladie successifs, sa réintégration étant intervenue le 5 mai 2023. Ainsi qu'il a été dit au point 5, la circonstance que cette décision de suspension serait intervenue à une date à laquelle Mme B... aurait été en congé pour cause de maladie ne la rendrait pas illégale et n'aurait une incidence que sur son entrée en vigueur. Par décision n°458910 en date du 22 avril 2022, le Conseil d'Etat a d'ailleurs rejeté un pourvoi présenté par Mme B... à l'encontre d'une ordonnance du tribunal administratif de Marseille du 3 novembre 2021 ayant rejeté un référé suspension présenté à l'encontre de la décision du 15 septembre 2021 pour absence de moyen sérieux.

7. La date du 25 septembre 2021 à laquelle cette mesure de suspension est entrée en vigueur correspond à la fin d'un arrêt de travail pour cause de maladie dont a bénéficié Mme B... pour la période du 12 au 24 septembre 2021. La requérante produit pour la première fois en appel divers arrêts de travail pour une période continue allant du 21 septembre 2021 au 14 janvier 2022. Toutefois pas plus que devant la première juge, elle ne justifie de façon non sérieusement contestable que son employeur les aurait reçus. En effet, Mme B... ne peut produire d'accusés de réception des plis contenant ces arrêts de travail puisqu'elle affirme les avoir transmis à son employeur par lettres simples alors que celui-ci conteste les avoir reçus. De plus, si elle se réfère à trois courriers de la directrice adjointe des 8, 9 et 15 octobre 2021, qui démontrent que le centre hospitalier était entré dans une démarche de contre-visite médicale à son égard et qu'à la date du 15 octobre 2021 le centre hospitalier avait connaissance de l'existence d'un ou plusieurs arrêts maladie pour la période courant du 10 septembre au 12 octobre 2021, ces lettres ne permettent d'établir avec suffisamment de certitude ni que les arrêts établis par un médecin auraient effectivement été reçus à la date à laquelle les lettres ont été écrites, ni que des arrêts pour cause de maladie auraient été adressés au centre hospitalier au-delà du 12 octobre 2021.

8. En outre, à supposer même que les arrêts pour cause de maladie que Mme B... affirme avoir envoyés par lettre simple à son employeur aient réellement été reçus par ce dernier, la requérante ne justifie pas du montant des sommes dont elle demande le paiement à titre provisionnel. En effet, elle réclame une provision totale 8 785,10 euros dont elle affirme qu'elle correspond à une perte de salaires de septembre 2021 à janvier 2022 qui tient compte, d'une part, d'une période de trois mois durant laquelle elle aurait droit, selon elle, à l'intégralité de son salaire, d'autre part, d'une seconde période qui court au-delà de la première semaine du mois de décembre 2021 où elle ne pourrait prétendre qu'à un demi-traitement augmenté d'un complément versé par les œuvres sociales des hospitaliers. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle n'aurait pas bénéficié, durant les douze mois consécutifs antérieurs, d'autres congés pour cause de maladie de nature à modifier les sommes auxquelles elle pourrait prétendre dans le cadre des dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986. De plus, Mme B... qui travaille à 80% détermine le montant des sommes qui lui seraient dues à partir d'un salaire mensuel de 2 382,40 euros sans établir qu'il correspond à la réalité dès lors d'une part qu'elle a produit des bulletins de paye d'un montant de 2 294,45 euros en juillet et août 2021 et de 2 394,97 en juin 2021, ce qui empêche de connaître la valeur moyenne de son traitement lequel inclut au demeurant des primes liées à l'exercice effectif du service auxquelles elle ne peut prétendre durant les périodes de congé pour cause de maladie. En outre, s'agissant du mois de septembre 2021, la requérante réclame une provision de 595,90 euros pour une période allant du 25 au 30 septembre 2021 alors qu'elle a perçu une somme de 3 046,80 qui correspond sur son bulletin de salaires à une base de 30 jours. A partir de la deuxième semaine du mois de décembre 2021, Mme B... évalue la perte de salaire hebdomadaire à la somme de 595,60 censée représenter une semaine de travail, c'est-à-dire en divisant la somme de 2 382,40 euros qu'elle prétend gagner chaque mois par quatre, alors que la perte de revenus doit être calculée par jour selon une base indivisible de trente jours par mois. Compte-tenu de l'ensemble de ces incertitudes, sans que puisse y faire obstacle la circonstance que privée de son salaire la requérante se serait trouvée dans une situation difficile, et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que le centre hospitalier d'Arles aurait opéré une discrimination entre ses agents en congé pour cause de maladie selon qu'ils étaient vaccinés ou non contre la covid-19, la créance dont se prévaut Mme B... ne présente pas un caractère suffisamment certain dans son principe et dans son montant au sens des dispositions rappelées ci-dessus de l'article R. 541-1 du code de justice administrative.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.

Sur les frais liés au litige :

11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme B... le versement au centre hospitalier d'Arles de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par contre, les conclusions ayant le même objet présentées par Mme B..., partie perdante, doivent être rejetées.

ORDONNE

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Mme B... versera au centre hospitalier d'Arles la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A... B... et au centre hospitalier d'Arles.

Fait à Marseille, le 8 janvier 2025.

N°24MA02581 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 24MA02581
Date de la décision : 08/01/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-015 Procédure. - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. - Référé-provision.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : ELEOM NIMES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-08;24ma02581 ?
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