Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... E... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 30 novembre 2020 par laquelle le maire de Nice ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. B... F..., portant sur la modification de l'accès à sa maison d'habitation sur la parcelle cadastrée section HA n° 0004, située 24 avenue Alfred de Vigny.
Par un jugement n° 2100737 du 31 octobre 2023, le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 30 novembre 2020 du maire de Nice.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 décembre 2023 et 25 mars 2024, M. F... et Mme C..., représentés par Me Zago, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 31 octobre 2023 du tribunal administratif de Nice ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme E... devant le tribunal administratif de Nice ;
3°) de mettre à la charge de Mme E... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la demande de première instance était irrecevable au regard des dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;
- aucun permis de démolir n'était nécessaire pour l'abri de jardin au regard des dispositions des articles L. 421-3 et R. 421-27 du code de l'urbanisme ; le maire ne se trouvait dès lors pas en situation de compétence liée pour s'opposer à la déclaration préalable litigieuse ;
- le moyen tiré de la fraude n'est pas fondé ;
- à supposer fondé le moyen tiré de l'absence de permis de démolir, cette autorisation a été délivrée, régularisant ainsi cet éventuel vice ;
- la décision contestée ne méconnaît pas les dispositions des articles 15.8, UDc 2.1.3.2, UDc 2.2.9 et UDc 2.4 du règlement du plan local d'urbanisme métropolitain (PLUm) Nice Côte d'Azur.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 février 2024, Mme E..., représentée par Me Szepetowski, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Nice et de M. F... la somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle justifie de son intérêt à agir ;
- la décision contestée est entachée de fraude ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 15.8 du règlement du PLUm Nice Côte d'Azur, les dispositions de l'article du PLUm relatif aux distances par rapport aux limites séparatives, et les dispositions des articles UDC 2.2.9 et 2.4 du PLUm Nice Côte d'Azur.
La requête et les mémoires ont été communiqués à la commune de Nice, qui n'a pas produit de mémoire.
Par lettre du 8 janvier 2025, les parties ont été informées de ce que la Cour était susceptible de constater que le vice entachant la décision de non-opposition à déclaration préalable du 30 novembre 2020, tiré de ce qu'elle aurait dû être précédée d'un permis de démolir l'abri de jardin, a été régularisé par la délivrance, le 28 février 2024, d'un permis de démolir cet abri de jardin.
M. F... et Mme C... ont produit, le 13 janvier 2025, un mémoire en réponse à cette information, qui a été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure ;
- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public ;
- et les observations de Me Zago représentant M. F... et Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Le 11 mars 2020, M. F... a déposé une déclaration préalable portant sur la régularisation de travaux relatifs à la modification de l'accès des véhicules à sa maison d'habitation, sur une parcelle cadastrée section HA n° 0004, située 24 avenue Alfred de Vigny à Nice. Par une décision du 30 novembre 2020, le maire de Nice ne s'est pas opposé à cette déclaration préalable. M. F... et Mme C... relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé, à la demande de Mme E..., cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ". En vertu de ces dispositions, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'une décision d'urbanisme en retenant un ou plusieurs moyens, de se prononcer expressément sur le bien-fondé des différents motifs d'annulation retenus par les premiers juges en application de ces dispositions, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui, afin d'apprécier si ce moyen ou l'un au moins de ces moyens justifiait la solution d'annulation. En outre, dans le cas où il estime qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, les examine. Il lui appartient de les écarter si aucun d'eux n'est fondé et, à l'inverse, en application des dispositions précitées de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, de se prononcer, si un ou plusieurs de ces moyens lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime, en l'état du dossier, de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges.
3. Aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'urbanisme : " Les démolitions de constructions existantes doivent être précédées de la délivrance d'un permis de démolir lorsque la construction relève d'une protection particulière définie par décret en Conseil d'Etat ou est située dans une commune ou partie de commune où le conseil municipal a décidé d'instaurer le permis de démolir ". Selon l'article L. 451-1 de ce même code : " Lorsque la démolition est nécessaire à une opération de construction ou d'aménagement, la demande de permis de construire ou d'aménager peut porter à la fois sur la démolition et sur la construction ou l'aménagement. Dans ce cas, le permis de construire ou le permis d'aménager autorise la démolition ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-27 de ce même code : " Doivent être précédés d'un permis de démolir les travaux ayant pour objet de démolir ou de rendre inutilisable tout ou partie d'une construction située dans une commune ou une partie de commune où le conseil municipal a décidé d'instituer le permis de démolir ".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. F... et Mme C..., après avoir acquis en 2019 le terrain litigieux, ont procédé à l'ouverture du muret donnant sur l'impasse privée située au nord de ce terrain, y ont installé un portail afin de pouvoir y garer leurs véhicules, en condamnant les places de stationnement préexistantes situées au sud de ce terrain et ont démoli un abri de jardin accolé au mur mitoyen avec la propriété de Mme E..., sans autorisation d'urbanisme. A la suite d'une mise en demeure, les intéressés ont déposé une première déclaration préalable portant sur la démolition d'un abri de jardin, la pose d'un portail et la réfection du sol et des murs de clôture, laquelle a fait l'objet d'une décision d'opposition du maire de Nice le 4 septembre 2020. Par la décision contestée, le maire de Nice ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. F... le 21 octobre 2020 portant uniquement sur la modification de l'accès des véhicules.
5. D'une part, il est constant que le projet litigieux est situé dans un secteur soumis à l'obligation de solliciter un permis de démolir.
6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que l'abri de jardin implanté sur le terrain d'assiette, démoli préalablement au dépôt de la déclaration préalable contestée, consistait en une construction en parpaings, accolée au mur séparant la propriété des pétitionnaires de celle de Mme E... et disposant d'un toit en briques. Eu égard aux caractéristiques et aux matériaux composant cet abri de jardin, celui-ci doit être regardé, nonobstant sa superficie limitée et l'allégation, au demeurant non établie, de sa vétusté, comme une construction au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article R. 421-27 du code de l'urbanisme. Il est en outre constant que la démolition de cet abri de jardin était nécessaire au projet litigieux, dès lors que l'une des places de stationnement prévues par celui-ci est implantée en lieu et place de cet abri.
7. S'il est constant que M. F... ne disposait pas, à la date de dépôt de la déclaration préalable en litige, d'un permis de démolir l'abri de jardin en litige, ni ne justifiait avoir, à cette date, déposé une telle demande de permis, il résulte de l'instruction qu'il a obtenu, par un arrêté du 28 février 2024, faisant suite à une demande déposée le 5 janvier 2024, un permis de démolir cet abri de jardin, qu'il a spontanément produit en cours d'instance. Dans ces conditions, le vice tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 421-27 du code de l'urbanisme doit être regardé comme ayant été régularisé.
8. Il appartient dès lors à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme E... tant devant le tribunal administratif de Nice que devant la Cour à l'encontre de la décision de non-opposition à déclaration préalable du 30 novembre 2020.
9. En premier lieu, aux termes de l'article 15.8 des dispositions générales du plan local d'urbanisme métropolitain (PLUm) Nice Côte d'Azur, librement accessible tant au juge qu'aux parties : " Les espaces affectés au stationnement en surface devront être plantés d'arbres de haute tige ".
10. Il ressort des pièces du dossier que le terrain des pétitionnaires comprend deux arbres de haute tige, lesquels ne peuvent, en tout état de cause, être implantés sur l'emplacement des places de stationnement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 15.8 du règlement du PLUm Nice Côte d'Azur doit être écarté.
11. En deuxième lieu, si Mme E... soutient que le projet litigieux ne respecte pas les distances minimales relatives aux limites séparatives du plan local d'urbanisme, ce moyen n'est pas assorti des précisions permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé. A supposer qu'elle entende se prévaloir des dispositions de l'article UDc 2.1.3.2 du règlement du PLUm Nice Côte d'Azur, aux termes duquel : " Les constructions doivent s'implanter à une distance minimale de 5m des limites séparatives ", le moyen doit être écarté comme inopérant, car cet article n'est pas opposable à des places de stationnement extérieures, lesquelles ne constituent pas des constructions.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article UDc 2.2.9 du règlement du PLUm Nice Côte d'Azur : " (...) Les murs-bahuts doivent être soigneusement traités, de préférence en matériaux naturels (le blanc pur est proscrit). Leur hauteur maximale est fixée à 50 centimètres à partir du sol existant. La hauteur totale des clôtures, mur-bahut compris, ne doit pas excéder 2 mètres. (...) ".
13. La circonstance qu'une construction existante n'est pas conforme à une ou plusieurs dispositions d'un plan local d'urbanisme régulièrement approuvé ne s'oppose pas, en l'absence de dispositions de ce plan spécialement applicables à la modification des immeubles existants, à la délivrance ultérieure d'un permis de construire s'il s'agit de travaux qui, ou bien doivent rendre l'immeuble plus conforme aux dispositions réglementaires méconnues, ou bien sont étrangers à ces dispositions.
14. S'il est constant que le mur-bahut situé le long de l'avenue Alfred de Vigny a une hauteur de 70 cm, et méconnaît ainsi les dispositions précitées de l'article UDc 2.2.9 du règlement du PLUm Nice Côte d'Azur, la décision contestée, qui prévoit seulement, à cet égard, la suppression d'un portail rendu inutile, reste étrangère à ces dispositions.
15. En quatrième lieu, aux termes de l'article UDc 2.4 du règlement du PLUm Nice Côte d'Azur : " (...) 50 % au moins de la superficie du terrain doit être aménagé en espaces verts dont 35 % du terrain en espaces verts de pleine terre. (...) ". Aux termes de ce règlement, " les espaces verts sont dits en pleine terre quand aucune construction ne se trouve en dessous, à l'exception des ouvrages publics d'infrastructure et les réseaux souterrains " et " les espaces végétalisés correspondent aux autres espaces verts, sur dalles et aux autres parties artificialisées, végétalisées avec au moins 80 cm de terre (...) ".
16. Il ressort des pièces du dossier et du site Géoportail, librement accessible tant au juge qu'aux parties, que la parcelle litigieuse a une contenance de 360 m², et doit dès lors, en application des dispositions précitées, comporter 180 m² d'espaces verts, dont 126 m² d'espaces verts de pleine terre. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan de masse DP2, que les espaces verts en pleine terre couvrent 182 m² du terrain. Si Mme E... soutient que ces espaces verts ne sont pas des espaces verts de pleine terre, dès lors qu'ils ne disposent pas d'au moins 80 cm de terre, elle n'apporte aucun élément de nature à l'établir. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article UDc 2.4 du règlement du PLUm Nice Côte d'Azur doit être écarté.
17. En dernier lieu, la caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme.
18. S'il ressort des pièces du dossier que M. F... et Mme C... n'ont pas fait apparaître, sur les plans joints à la déclaration préalable, l'abri de jardin démoli sans autorisation, cette simple omission ne peut être regardée comme ayant été réalisée pour contourner une règle d'urbanisme. Dès lors, le moyen tiré de la fraude ne peut qu'être écarté.
19. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande de première instance, que M. F... et Mme C... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 30 novembre 2020 par laquelle le maire de Nice ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée le 11 mars 2020.
Sur les frais liés au litige :
20. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chacune des parties la charge de ses frais d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2100737 du tribunal administratif de Nice du 31 octobre 2023 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme E... devant le tribunal administratif de Nice est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par les parties au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... F..., à Mme G... C..., à Mme D... E... et à la commune de Nice.
Délibéré après l'audience du 16 janvier 2025, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- Mme Courbon, présidente assesseure,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2025
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N° 23MA03084