Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Nice Eco Stadium a demandé au tribunal administratif de Nice, en premier lieu, de condamner la commune de Nice à lui payer la somme de 14 585 455,96 euros toutes taxes comprises, augmentée des intérêts moratoires et de la capitalisation des intérêts, au titre de la totalité des recettes garanties perçues par la ville de Nice pendant la période du 10 mars 2020 au 1er février 2022, ou, à titre subsidiaire, de la condamner à lui payer la somme de 4 253 938,80 euros toutes taxes comprises, augmentée des intérêts moratoires et de la capitalisation des intérêts pendant la période du 10 mars 2020 au 1er février 2022 et, en second lieu, de condamner la commune de Nice à lui payer la somme de 551 626,60 euros (488 272,17 euros hors taxes), augmentée des intérêts moratoires et de la capitalisation des intérêts au titre des frais exposés dans le cadre de la procédure de sauvegarde.
Par un jugement n° 2103109 du 31 octobre 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté ces demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2023, et deux mémoires enregistrés le 25 juin 2024 et le 22 juillet 2024, la société Nice Eco Stadium, représentée par Me Courtel et Me Rennesson, demande à la Cour d'annuler le jugement attaqué, de condamner la commune de Nice à lui verser la somme de 4 253 938,80 euros toutes taxes comprises, avec intérêts moratoires et capitalisation des intérêts.
Elle soutient que :
- sa requête d'appel est recevable ;
- la force majeure est caractérisée ;
- elle n'a pas commis de faute ;
- elle a droit à la restitution du montant des recettes garanties ;
- cette indemnité doit être assortie des intérêts moratoires, capitalisés ;
- les moyens de défense de la commune de Nice sont infondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 10 juin 2024 et le 15 juillet 2024, la commune de Nice, représentée par la SELARL d'avocats Symchowicz-Weissberg et Associés, demande à la Cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société Nice Eco Stadium ;
2°) à titre subsidiaire, de limiter le montant de la condamnation ;
3°) en tout état de cause, de mettre à la charge de la société Nice Eco Stadium la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête d'appel ne conclut pas à l'annulation ou la réformation du jugement ;
- elle est donc irrecevable ;
- la société a renoncé à la majeure partie de la somme demandée en première instance ;
- la force majeure n'est pas caractérisée ;
- la société n'a pas l'obligation d'exploiter commercialement le stade ;
- en l'absence d'obligation sanctionnable, la force majeure est inopérante ;
- la société a commis une faute en ne souscrivant aucune assurance au titre des activités ;
- seules les pertes subies du 15 mars 2020 au 30 juin 2021 seraient indemnisables ;
- le calcul de l'indemnité par la société est erroné.
Par une lettre en date du 29 avril 2024, la Cour a informé les parties qu'il était envisagé d'inscrire l'affaire à une audience qui pourrait avoir lieu d'ici au 1er janvier 2025, et que l'instruction était susceptible d'être close par l'émission d'une ordonnance à compter du 20 mai 2024.
Par ordonnance du 24 septembre 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la décision du président de la Cour désignant M. Renaud Thielé, président assesseur de la 6ème chambre pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Renaud Thielé, rapporteur,
- les conclusions de M. François Point, rapporteur public,
- et les observations de Me Courtel pour la société Nice Eco Stadium et celles de Me Lauret pour la commune de Nice.
Considérant ce qui suit :
1. Par un contrat de partenariat conclu le 21 janvier 2011, la commune de Nice a confié à la société Nice Eco Stadium la conception, le financement en tout ou partie, la construction, l'entretien, la maintenance et l'exploitation, hors rencontres sportives du club résident et autres activités de service public, du " Nice Stadium ", ultérieurement dénommé " Allianz Riviera ", pour une durée de vingt-sept ans et cinq mois à compter de la date effective de mise à disposition de l'enceinte élargie. Par un courrier du 17 mars 2020, la société Nice Eco Stadium a indiqué à la commune qu'en raison de l'épidémie de covid-19, elle se trouvait dans l'impossibilité d'assurer à la commune les recettes garanties prévues par le contrat. La commune ayant refusé de donner suite à cette réclamation, les parties ont infructueusement engagé la procédure de conciliation prévue à l'article 61.1 du contrat de partenariat. La société Nice Eco Stadium a alors saisi le tribunal administratif de Nice d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Nice, à titre principal, à lui payer la somme de 14 585 455,96 euros toutes taxes comprises au titre de la totalité des recettes garanties perçues par la ville de Nice pendant la période du 10 mars 2020 au 1er février 2022 ou, à titre subsidiaire, de la condamner à lui payer la somme de 4 253 938,80 euros toutes taxes comprises au titre de la même période. Elle demande également la condamnation de la ville de Nice à lui payer la somme de 545 626,60 euros, au titre des frais exposés dans le cadre de la procédure précontentieuse. Par le jugement attaqué, dont la société Nice Eco Stadium relève appel, le tribunal administratif a rejeté ces demandes en retenant que l'épidémie de covid-19 ne caractérisait pas, en l'espèce, une situation de force majeure qui faisait irrésistiblement obstacle à l'exécution, par la société, de ses obligations.
2. D'une part, aux termes de l'article 3 du contrat de partenariat : " Le Contrat de Partenariat a pour objet la conception, le financement de tout ou partie, la construction, l'entretien, la maintenance et l'exploitation (hors rencontres sportives du club résident et autres activités de service public) du Nice Stadium ". Aux termes de l'article 20 dudit contrat, à l'exception des utilisations par le club résident et des autres activités de service public mentionnées à l'article 19, " le partenaire exploite directement ou indirectement l'enceinte en y développant des activités sportives, culturelles, événementielles ou autres (...) ". Aux termes de l'article 29 du même contrat, la rémunération du partenaire est constituée d'une redevance nette, destinée à couvrir les coûts de l'enceinte élargie du stade, et qui correspond au montant de la redevance brute destinée à couvrir les dépenses d'investissement et de financement (composantes RBA1 et RBA1bis), les dépenses de fonctionnement (RBA2), les coûts des travaux de gros entretien et renouvellement (RBA3), les frais de gestion et d'exploitation commerciale et les impôts (RBA4) et les dépenses liées à l'Euro 2016 (RBA5), sous déduction, notamment, des recettes garanties, qui correspondent à une partie des recettes annuelles que le partenaire garantit, suivant un échéancier présenté en annexe XVI du contrat.
3. D'autre part, aux termes de l'article 45.3 du contrat de partenariat, relatif aux conséquences de la force majeure: " (...) En cas de survenance d'un cas de force majeure après la mise à disposition effective de l'enceinte élargie empêchant le partenaire d'exécuter tout ou partie de ses obligations au titre du contrat, la ville de Nice est tenue de payer la partie de la redevance nette qui n'est pas affectée par la survenance de cet événement, à savoir les redevances RBA1, RBA3 et, le cas échéant, RBA5, ainsi que le fraction des redevances RBA2 correspondant aux prestations non affectées par la survenance dudit événement. Le partenaire ne perçoit pas la fraction des redevances RBA2 affectée par le cas de force majeure et supporte les coûts éventuels de remise en état ainsi que les pertes éventuelles de recettes garanties dans la limite des garanties fournies par les polices d'assurance du Partenaire ". Aux termes de l'article 1er du contrat de partenariat : " (...) " Force majeure " désigne des évènements extérieurs aux Parties, imprévisibles et dont les effets compromettent de manière irrésistible l'exécution du Contrat de Partenariat (...) ".
4. Il résulte des stipulations de l'article 45.3 du contrat de partenariat que, dans l'hypothèse d'un cas de force majeure empêchant l'exécution, par le partenaire, de tout ou partie de ses obligations au titre du contrat, les parties ont convenu que la commune de Nice continuerait à payer les redevances, à l'exception des redevances de fonctionnement correspondant à des prestations non réalisées en raison de la survenance de l'événement, et que le partenaire ne supporterait les pertes éventuelles de recettes garanties que dans la limite des garanties fournies par ses polices d'assurance.
5. Toutefois, et en tout état de cause, la survenance de la pandémie du covid-19, si elle a perturbé l'activité du stade de Nice et entraîné des difficultés financières, n'a pas constitué un événement faisant irrésistiblement obstacle à l'exécution de tout ou partie des obligations contractuelles par la société Nice Eco Stadium, mais un bouleversement, d'ailleurs temporaire, des conditions d'exploitation seulement susceptible d'être couvert par une indemnité d'imprévision. Dès lors, les stipulations précitées de l'article 45.3 du contrat de partenariat ne pouvaient recevoir application.
6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir que la commune de Nice oppose à la société Nice Eco Stadium, cette dernière n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin de réformation du jugement et à fin de condamnation de la commune doivent donc être rejetées.
7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Nice Eco Stadium une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société Nice Eco Stadium est rejetée.
Article 2 : La société Nice Eco Stadium versera à la commune de Nice une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Nice tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Nice Eco Stadium et à la commune de Nice.
Délibéré après l'audience du 3 février 2025, où siégeaient :
- M. Renaud Thielé, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Isabelle Ruiz, première conseillère,
- M. Laurent Lombart, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 février 2025.
N° 23MA03063 2