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24/04/2025 | FRANCE | N°23MA03111

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 1ère chambre, 24 avril 2025, 23MA03111


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société à responsabilité limitée (SARL) Fizzy a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 15 mai 2020 par lequel le maire de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat a délivré à la société anonyme Mediterranean Estate un permis de construire pour la rénovation de la " villa Sicard ", de sa dépendance et de sa tourette, la création d'une piscine et d'un garage et diverses démolitions sur un terrain cadastré section AB n° 168, 189, 191, 223 à 228

et situé 9, promenade Maurice Rouvier à Saint-Jean-Cap-Ferrat, ensembles le certificat d'urban...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Fizzy a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 15 mai 2020 par lequel le maire de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat a délivré à la société anonyme Mediterranean Estate un permis de construire pour la rénovation de la " villa Sicard ", de sa dépendance et de sa tourette, la création d'une piscine et d'un garage et diverses démolitions sur un terrain cadastré section AB n° 168, 189, 191, 223 à 228 et situé 9, promenade Maurice Rouvier à Saint-Jean-Cap-Ferrat, ensembles le certificat d'urbanisme délivré le 13 novembre 2019 par le maire de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat à la SA Mediterranean Estate et la décision du 19 août 2020 par laquelle le maire de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 2003994 du 26 octobre 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2023, la société à responsabilité limitée (SARL) Fizzy, représentée par Me Bernard, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 26 octobre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 mai 2020 du maire de Saint-Jean-Cap-Ferrat et la décision explicite de rejet de son recours gracieux en date du 19 août 2020 ;

3°) d'annuler le certificat d'urbanisme délivré par le Maire de Saint-Jean Cap-Ferrat le 13 novembre 2019

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité dès lors que le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de ce que la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) aurait dû être consultée afin de déterminer si une autorisation de défrichement était nécessaire et ne l'a pas été ;

- le dossier de demande de permis de construire était incomplet et imprécis quant aux travaux à réaliser sur la tourette dès lors qu'aucun des plans des façades projetées ne permet de prendre connaissance de la nature des travaux à réaliser sur celle-ci, ni sa hauteur projetée ;

- le permis de construire en litige est illégal par voie de conséquence de l'illégalité du certificat d'urbanisme délivré à la pétitionnaire le 12 novembre 2019 dès lors que le plan local d'urbanisme métropolitain de la métropole Nice Côté d'Azur (PLUM) avait été approuvé le 25 octobre 2019 ; le maire de Saint-Jean-Cap-Ferrat ne pouvait délivrer le certificat en cause le 12 novembre 2019 alors qu'il avait jusqu'au 24 décembre 2019 pour le délivrer et que le PLUM a été approuvé le 25 octobre 2019 et devenu exécutoire le 2 décembre 2019 ; en sollicitant la délivrance de ce certificat, la société anonyme Mediterranean Estate a tenté de contourner l'application du PLUM ;

- le maire aurait dû surseoir à statuer sur la demande de la société anonyme Mediterranean Estate dès lors que le projet est de nature à compromettre l'exécution du PLUM ou susceptible de la rendre plus onéreuse dès lors que le projet ne respecte pas la hauteur maximale des constructions de 7 mètres fixée par l'article 2.1.2 applicable en zone UFc6 du PLUM ; la demande de permis de construire en litige aurait dû dès lors être examinée au regard des dispositions du PLUM ;

- le projet ne respecte pas la hauteur maximale des constructions annexes de 2,50 mètres à l'égout de toit fixée par l'article UC 10 applicable en zone UC du POS s'agissant de la dépendance dont la hauteur est de 10 mètres ;

- le projet, qui entraîne l'abattage d'arbres de 23 arbres dans un espace boisé classé et doit ainsi être considéré comme une opération de défrichement au sens de l'article L. 341-1 du code forestier, méconnaît les dispositions des articles L. 113-1 et L .113-2 du code de l'urbanisme ; la DDTM aurait dû être consultée afin de déterminer si une autorisation de défrichement était nécessaire et ne l'a pas été ; à supposer qu'il ne s'agisse pas de travaux de défrichement, les travaux de coupe et d'abattage d'arbres auraient dû être précédés d'une déclaration préalable en application du g de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme et la société pétitionnaire ne peut se prévaloir des dispositions de R. 421-23-2 du même code, aucun arbre sur le terrain d'assiette du projet ne pouvant être considéré comme dangereux au sens de cet article ; les mesures de compensation de ces abattages sont insuffisantes ;

- le projet méconnaît les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, ainsi que les articles UC3 du POS et 16 des dispositions générales du règlement du PLUM en prévoyant la création de 20 places de stationnement qui vont entraîner un accroissement de la circulation alors que la promenade Maurice Rouvier et le chemin Visconti permettant d'accéder au terrain d'assiette sont étroits et instables et, par ailleurs, qu'un risque incendie existe sur la commune ;

- le projet méconnaît l'article 2.2.1 applicable en zone UFc6 du PLUM et l'article UC 11 du POS s'agissant du traitement des façades alors que la façade est modifiée par un enduit couleur dont on ne connaît pas les caractéristiques.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mai 2024, la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat, représentée par Me Zohar, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SARL Fizzy la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la société Mediterranean Estate qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Claudé-Mougel,

- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,

- et les observations de Me Loiseau, substituant Me Zohar, représentant la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat.

Considérant ce qui suit :

1. La société Mediterranean Estate a déposé le 19 juin 2019 une demande de permis de construire ayant pour objet la rénovation de la " villa Sicard ", de sa dépendance et de sa tourette, la création d'une piscine et d'un garage et diverses démolitions sur un terrain cadastré section AB n° 168, 189, 191 et 223 à 228 et situé 9, promenade Maurice Rouvier à Saint-Jean-Cap-Ferrat. Le 24 octobre suivant, elle a déposé une demande de certificat d'urbanisme portant sur ce terrain. Le lendemain, la métropole Nice Côté d'Azur a approuvé le plan local d'urbanisme métropolitain (PLUM), qui est devenu exécutoire le 5 décembre 2019. Le 13 novembre 2019, le maire de Saint-Jean-Cap-Ferrat a délivré le certificat d'urbanisme sollicité par ladite société. Le permis de construire demandé par cette société lui a été délivré le 15 mai 2020. La SARL Fizzy relève appel du jugement du 26 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce permis.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif de Nice a omis de se prononcer sur le moyen soulevé par la SARL Fizzy tiré de ce que la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) aurait dû être consultée afin de déterminer si une autorisation de défrichement était nécessaire et ne l'a pas été, et n'a pas visé ce moyen. Ce jugement est ainsi irrégulier et doit être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SARL Fizzydevant le tribunal administratif de Nice.

Sur la fin de non recevoir opposée à la demande de première instance :

4 Il ressort des pièces du dossier, et en particulier de l'attestation notariale du 22 juillet 2021, que la société Fizzy est propriétaire des parcelles cadastrées section AB n° 256 et 257, voisines immédiates du terrain d'assiette du projet en litige. Les circonstances que cette attestation n'émanerait pas du notaire qui a reçu l'acte d'acquisition et que la société Fizzy est domiciliée à Nice ne sont pas de nature à remettre en cause utilement la réalité de cette propriété. La fin de non-recevoir opposée en première instance ne peut par suite qu'être écartée.

Sur la légalité du permis de construire contesté.

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 431-2 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural définit, par des plans et documents écrits, l'implantation des bâtiments, leur composition, leur organisation et l'expression de leur volume ainsi que le choix des matériaux et des couleurs. (...) " Aux termes de l'article R. 431-8 du même code : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / (...) c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions (...) " L'article R. 431-10 dispose : " Le projet architectural comprend également :/ a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur (...) "

6. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

7. Il ressort de la notice explicative du dossier de permis de construire déposé par la société Mediterranean Estate, dont l'objet même porte sur la rénovation notamment de la tourette de la " villa Sicard ", que cette tourette sera rénovée conformément au style de la villa. Contrairement à ce que soutient la SARL Fizzy, ce dossier comprend deux plans de façade portant sur la tourette cotés PCMI5-I et PCMI5-J, figurant l'état existant et le projet, le second étant coloré, qui montrent notamment que sa hauteur demeurera inchangée et qu'une ouverture sera élargie au premier étage en façade ouest pour installer une porte fenêtre double battant et qu'une autre sera supprimée au niveau du rez-de-jardin en façade est. Ce moyen, qui manque en fait, ne peut qu'être écarté.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée :/ a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus./ Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique./ Lorsque le projet est soumis à avis ou accord d'un service de l'Etat, les certificats d'urbanisme le mentionnent expressément. Il en est de même lorsqu'un sursis à statuer serait opposable à une déclaration préalable ou à une demande de permis. Le certificat d'urbanisme précise alors expressément laquelle ou lesquelles des circonstances prévues aux deuxième à sixième alinéas de l'article L. 424-1 permettraient d'opposer le sursis à statuer./ Le certificat d'urbanisme est délivré dans les formes, conditions et délais déterminés par décret en Conseil d'Etat par l'autorité compétente mentionnée au a et au b de l'article L. 422-1 du présent code. " Aux termes du 2ème alinéa de l'article L. 424-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus au 6° de l'article L. 102-13 et aux articles L. 153-11 et L. 311-2 du présent code et par l'article L. 331-6 du code de l'environnement. " Le dernier alinéa de l'article L. 153-11 dispose que " L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable. "

9. Il résulte de la combinaison des articles L. 153-11, L. 410-1 et L. 424-1 du code de l'urbanisme que tout certificat d'urbanisme délivré sur le fondement de l'article L. 410-1 a pour effet de garantir à son titulaire un droit à voir toute demande d'autorisation ou de déclaration préalable déposée dans le délai indiqué examinée au regard des règles d'urbanisme applicables à la date de la délivrance du certificat. Figure cependant parmi ces règles la possibilité de se voir opposer un sursis à statuer à une déclaration préalable ou à une demande de permis, lorsqu'est remplie, à la date de délivrance du certificat, l'une des conditions énumérées à l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme. Une telle possibilité vise à permettre à l'autorité administrative de ne pas délivrer des autorisations pour des travaux, constructions ou installations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan local d'urbanisme. Lorsque le plan en cours d'élaboration et qui aurait justifié, à la date de délivrance du certificat d'urbanisme, que soit opposé un sursis à une demande de permis ou à une déclaration préalable, entre en vigueur dans le délai du certificat, les dispositions issues du nouveau plan sont applicables à la demande de permis de construire ou à la déclaration préalable.

10. Par ailleurs, suivant l'article R. 410-9 du code de l'urbanisme : " Dans le cas prévu au a de l'article L. 410-1, le délai d'instruction est d'un mois à compter de la réception en mairie de la demande. " et, suivant l'article R. 410-10 : " Dans le cas prévu au b de l'article L. 410-1, le délai d'instruction est de deux mois à compter de la réception en mairie de la demande. / L'autorité compétente recueille l'avis des collectivités, établissements publics et services gestionnaires des réseaux mentionnés à l'article L. 111-11 ainsi que les avis prévus par les articles R. 423-52 et R. 423-53. (...) " L'article R. 410-12 dispose : " A défaut de notification d'un certificat d'urbanisme dans le délai fixé par les articles R. 410-9 et R. 410-10, le silence gardé par l'autorité compétente vaut délivrance d'un certificat d'urbanisme tacite. Celui-ci a exclusivement les effets prévus par le quatrième alinéa de l'article L. 410-1, y compris si la demande portait sur les éléments mentionnés au b de cet article. "

11. D'une part, la demande de certificat d'urbanisme de la société Mediterranean Estate a été déposée sur le fondement du a de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme. Dès lors, le maire de Saint-Jean-Cap-Ferrat disposait d'un délai d'un mois pour délivrer le certificat, et non de deux mois comme l'allègue la société appelante, délai qui expirait le 24 novembre 2019, soit avant la date d'entrée en vigueur du PLUM. Le détournement de procédure allégué n'est dès lors pas établi et la demande de permis de construire de la société Mediterranean Estate a pu valablement être examinée au regard des dispositions du plan d'occupation des sols de la commune applicable à la date de délivrance de ce certificat. En tout état de cause, la SARL Fizzy ne peut soutenir que l'arrêté litigieux serait illégal par voie de conséquence de l'illégalité de ce certificat d'urbanisme. D'autre part, le projet ne modifie pas la hauteur de la villa Sicard et l'ajout d'un parc de stationnement en sous-œuvre de la dépendance existante, impliquant un décaissement entraînant une faible baisse du niveau du terrain naturel, ne saurait à lui seul être regardé comme de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuses l'exécution du PLUM limitant à l'article 2.1.2 de son règlement, la hauteur maximale des constructions à 7 mètres en zone UFC6 où se trouve la parcelle d'assiette du projet litigieux, alors en outre que l'arrêté litigieux prescrit que la hauteur de cette dépendance devra s'établir à la cote de 20,83 mètres afin de ne pas excéder la hauteur frontale maximale de 10 mètres fixée par l'article UC 10 du règlement du plan d'occupation des sols. Le maire de Saint-Jean-Cap-Ferrat n'a donc pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en n'opposant pas un sursis à statuer à la demande la société Mediterranean Estate et, eu égard au principe rappelé au point 9, la société appelante ne peut donc davantage utilement soutenir que le projet litigieux méconnaîtrait des dispositions du PLUM.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article UC 10 du règlement du plan d'occupation des sols de Saint-Jean-Cap-Ferrat approuvé le 27 mars 2002 et applicable, ainsi qu'il vient d'être dit, à la demande de permis de construire déposée par la société Mediterranean Estate : " La hauteur des constructions, mesurée en tout point des façades du sol naturel ou excavé jusqu'au niveau de l'égout du toit, ne pourra excéder 7 mètres. / (...) La hauteur frontale ne doit pas excéder 10 mètres. / La hauteur des constructions annexes (garages, buanderies, locaux sanitaires et techniques, abris de jardin, remises, barbecues etc...) ne pourra excéder 2,50 mètres à l'égout de toit et 3 mètres au faîtage (...) ".

13. La circonstance qu'une construction existante n'est pas conforme à une ou plusieurs dispositions d'un document d'urbanisme régulièrement approuvé ne s'oppose pas, en l'absence de dispositions de ce plan spécialement applicables à la modification des immeubles existants, à la délivrance ultérieure d'un permis de construire s'il s'agit de travaux qui, ou bien doivent rendre l'immeuble plus conforme aux dispositions réglementaires méconnues, ou bien sont étrangers à ces dispositions.

14. Il ressort des pièces du dossier de la demande de permis de construire déposée par la société Mediterranean Estate que la hauteur de la dépendance existante s'établit à l'égout de toit à une cote altimétrique de 21,59 mètres, la hauteur du terrain naturel en pied de façade s'établissant à une cote altimétrique de 10,83 mètres, soit une hauteur de cette construction existante de 10,76 mètres. Alors que le projet de rénovation de cette dépendance consiste à abaisser cette hauteur à la cote altimétrique de 21,19 mètres, l'arrêté en litige a, ainsi qu'il a été dit au point 11, prescrit de la limiter à la cote de 20,83 mètres afin que la hauteur de l'annexe ne dépasse pas 10 mètres de hauteur frontale. Ainsi, à supposer même que ce bâtiment soit qualifié de construction annexe au sens de l'article UC 10 du plan d'occupation des sols de Saint-Jean-Cap-Ferrat, le projet tel qu'autorisé par l'arrêté en litige a pour effet de rendre cette construction plus conforme à la règle d'urbanisme applicable et le moyen tiré de la méconnaissance de cet article ne peut qu'être écarté.

15. En quatrième lieu, et d'une part, aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ou des plantations d'alignements. " L'article L. 113-2 dispose : " Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements. / Nonobstant toutes dispositions contraires, il entraîne le rejet de plein droit de la demande d'autorisation de défrichement prévue au chapitre Ier du titre IV du livre III du code forestier. (...) " Aux termes de l'article L. 341-1 du code forestier : " Est un défrichement toute opération volontaire ayant pour effet de détruire l'état boisé d'un terrain et de mettre fin à sa destination forestière./ Est également un défrichement toute opération volontaire entraînant indirectement et à terme les mêmes conséquences, sauf si elle est entreprise en application d'une servitude d'utilité publique./ La destruction accidentelle ou volontaire du boisement ne fait pas disparaître la destination forestière du terrain, qui reste soumis aux dispositions du présent titre. " L'article L. 341-3 dispose : " Nul ne peut user du droit de défricher ses bois et forêts sans avoir préalablement obtenu une autorisation. (...) ".

16. Si la parcelle du projet est arborée, en comportant notamment plus d'une vingtaine d'arbres de haute tige, et si une partie est située dans le périmètre d'un espace boisé classé, elle ne peut être regardée comme étant à l'état boisé ou à destination forestière au sens du code forestier, alors en outre qu'elle est située en zone urbaine de la commune. La société appelante ne peut donc utilement soutenir que le projet litigieux aurait dû être précédé d'une autorisation de défrichement.

17. D'autre part, aux termes de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme : " Doivent être précédés d'une déclaration préalable les travaux, installations et aménagements suivants :/ (...) g) Les coupes et abattages d'arbres dans les bois, forêts ou parcs situés sur le territoire de communes où l'établissement d'un plan local d'urbanisme a été prescrit, ainsi que dans tout espace boisé classé en application de l'article L. 113-1 (...) " L'article R. 421-23-2 dispose : " Par exception au g de l'article R. 421-23, une déclaration préalable n'est pas requise pour les coupes et abattages : / 1° Lorsque le propriétaire procède à l'enlèvement des arbres dangereux, des chablis et des bois morts (...) " L'autorisation préalable que prévoit ces dispositions ne saurait résulter de manière implicite de la délivrance d'un permis de construire.

18. Il ressort du dossier de demande de permis de construire que 23 arbres vont être abattus au sein de la partie du terrain d'assiette du projet classée en espace boisé en application de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme. Si la commune fait valoir que ces arbres présenteraient des signes sévère d'attaques par le charançon et le papillon palmivore, ils ne sauraient être regardés comme dangereux ou morts au sens des dispositions de l'article R. 421-23-2 du code de l'urbanisme citées au point précédent et, ainsi qu'il a été dit au même point, la demande de permis de construire déposée par la société Mediterranean Estate ne saurait pourvoir à la déclaration préalable requise par les dispositions de l'article R. 421-23 du code qu'il est constant que cette société n'a pas déposée. Dans ces conditions, la SARL Fizzy est ainsi fondée à soutenir que l'arrêté litigieux est, dans cette mesure, entaché de nullité.

19. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. " Aux termes de l'article UC 3 du règlement du POS de Saint-Jean-Cap-Ferrat approuvé le 27 mars 2002 : " Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée. / Lorsque le terrain est riverain de deux ou plusieurs voies publiques, l'accès sur celles de ces voies qui présenterait une gêne ou un risque est interdit. Les caractéristiques des accès et des voies privées doivent être adaptées à l'opération et satisfaire aux exigences de sécurité, de défense contre l'incendie, de ramassage des ordures ménagères. "

20. La société Fizzy n'établit pas que la seule circonstance que le projet prévoyait la création de 20 places de stationnement serait de nature à induire une aggravation de la circulation sur la promenade Maurice Rouvier et le chemin Visconti qui permettent l'accès à la parcelle du projet alors qu'il ressort de la notice explicative que la " Villa Sicard " comprend 5 unités de logement et du formulaire Cerfa de demande de permis de construire que le projet consiste en la rénovation de la " Villa Sicard " pour y créer un seul logement. Elle n'établit pas davantage que ces deux voies de desserte seraient étroites et instables et que l'accès des engins de secours y serait difficile au point que le projet y ferait obstacle. Si la société appelante invoque à cet égard les dispositions de l'article UC 3 du POS du règlement du POS de Saint-Jean-Cap-Ferrat approuvé le 27 mars 2002, elle n'assortit pas ce moyen des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé alors en tout état de cause que le projet porte sur la rénovation d'une construction existante. A supposer que ladite société entende invoquer à ce même égard la méconnaissance de l'article 16 des dispositions générales du règlement du PLUM, ce moyen ne peut qu'être écarté comme inopérant pour le même motif que celui exposé au point 11.

21. En sixième et dernier lieu, aux termes de l'article UC11 du règlement du POS de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat : " 1. Les façades / Elles seront obligatoirement enduites si elles ne sont pas réalisées en pierre du pays. Sont interdites toutes imitations de matériaux (faux moellons, fausses briques, faux bois etc ...) ainsi que l'emploi à nu en parement extérieur de matériaux destinés à être recouverts tels que carreaux de plâtre, briques creuse, agglomérés. / Les façades secondaires ou aveugles doivent être traitées avec le même soin et les mêmes matériaux que les façades principales. "

22. Il ressort de la notice descriptive du projet et des différents plans des façades, que la villa comme la dépendance recevront pour l'ensemble des façades un traitement par enduits dont les références sont précisées, contrairement à ce que soutient la société requérante. La tourette fait l'objet d'un traitement en parement de pierre locale, de façon conforme à l'article UC11 du règlement du POS de la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat, qui impose uniquement un traitement identique des façades d'une même construction et non de l'ensemble des constructions situées sur un même terrain. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit dès lors être écarté.

23. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Fizzy est seulement fondée à soutenir que l'arrêté portant permis de construire est illégal en tant que le projet qu'il autorise prévoit l'abattage d'arbres dans un espace boisé classé sans déclaration préalable et à demander l'annulation de cet arrêté dans cette mesure.

Sur les frais liés au litige :

24. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chacune des parties la charge de ses frais.

D É C I D E

Article 1er : Le jugement du 26 octobre 2023 du tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 15 mai 2020 du maire de Saint-Jean-Cap-Ferrat et la décision explicite de rejet du recours gracieux en date du 19 août 2020 sont annulés en tant que le projet autorisé prévoit l'abattage d'arbres au sein d'un espace boisé classé.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la SARL Fizzy devant le tribunal et la Cour est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Fizzy, à la commune de Saint-Jean-Cap-Ferrat et à la société anonyme Mediterranean Estate.

Copie en sera adressée au procureur de la république près le tribunal administratif de Nice.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- Mme Courbon, présidente assesseure,

- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 avril 2025.

N° 23MA03111

2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23MA03111
Date de la décision : 24/04/2025

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Sursis à statuer.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation locale.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Arnaud CLAUDÉ-MOUGEL
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : DAZ AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-24;23ma03111 ?
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