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24/04/2025 | FRANCE | N°24MA00184

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 3ème chambre, 24 avril 2025, 24MA00184


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 22 août 2023 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2304643 du 19 décembre 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.



Procédure devant la Cour :

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Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 janvier 2024 et le 28 mars 2025, M. A..., représenté par Me Le Gar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 22 août 2023 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2304643 du 19 décembre 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 janvier 2024 et le 28 mars 2025, M. A..., représenté par Me Le Gars, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 19 décembre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 22 août 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une carte de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, de statuer à nouveau sur sa demande dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son conseil renonce à la part contributive de l'Etat versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen tiré de ce que le préfet aurait entaché l'arrêté d'une erreur de fait et d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- le préfet n'a pas épuisé sa compétence ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur de fait ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation ;

- l'arrêté est entaché d'erreurs de droit ;

- le préfet s'est estimé lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;

- il a méconnu l'article 133-11 du code pénal en faisant état de sa condamnation ;

- sa présence en France ne représentait pas une menace pour l'ordre public ;

- le refus de séjour a été pris en méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant refus de séjour méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision a été prise en méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la refus de séjour méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaît l'article L. 611-3-3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'autorité de la chose jugée par la Cour dans son arrêt n° 21MA02114, 21MA02115 du 3 février 2022 ;

- cette décision est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de séjour et a ainsi été prise en méconnaissance de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet ne pouvait l'obliger à quitter le territoire français sans méconnaître l'article L. 611-3-9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

La requête a été communiquée à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), qui a déposé des pièces et des observations enregistrées les 7 et 13 février 2025.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mars 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code pénal ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Mastrantuono a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né en 1990, entré en France muni d'un visa en qualité d'étudiant délivré valable du 1er septembre 2009 au 1er septembre 2010, a bénéficié de cartes de séjour temporaires en qualité d'étudiant jusqu'au 7 juillet 2015. Il a ensuite bénéficié d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en tant qu'étranger malade, jusqu'au 19 juillet 2017. Par un arrêté du 3 février 2021, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de renouveler ce titre de séjour, et assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et d'une interdiction de retour sur le territoire français. La décision interdisant à M. A... le retour sur le territoire français a toutefois été annulée par un jugement du tribunal administratif de Nice n° 2100823 du 11 mai 2021, puis la décision l'obligeant à quitter le territoire français a été annulée par un arrêt de la Cour n° 21MA02114, 21MA02115 du 3 février 2022. Par un arrêté du 22 août 2023, le préfet des Alpes-Maritimes a une nouvelle fois refusé d'admettre au séjour M. A..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 19 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments présentés par M. A..., a expressément répondu, au point 4 de son jugement, aux moyens soulevés par l'intéressé, tirés de ce que le préfet aurait entaché l'arrêté d'une erreur de fait et d'un défaut d'examen sérieux de sa situation. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'irrégularité pour insuffisance de motivation doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire prise par le préfet des Alpes-Maritimes à l'encontre de M. A... le 3 février 2021 et l'injonction de réexamen de la situation de l'intéressé par la Cour le 3 février 2022, le préfet des Alpes-Maritimes, auquel M. A... a adressé deux notes accompagnées de pièces justificatives demandant la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'article L. 435-1 du même code, a saisi la commission du titre de séjour, qui s'est réunie le 29 juin 2023, et que le collège des médecins de l'OFII a émis un nouvel avis le 12 octobre 2022. Il ressort également des termes de l'arrêté attaqué que le préfet des Alpes-Maritimes, qui a estimé que M. A... ne pouvait bénéficier d'une carte de séjour temporaire en qualité d'étranger malade, a également considéré qu'il convenait d'écarter le caractère exceptionnel et/ou humanitaire de sa demande. En outre, il a estimé qu'eu égard à la situation personnelle et familiale de M. A..., et compte tenu de l'avis défavorable de la commission du titre de séjour, la décision ne portait pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale. Ainsi, alors même que l'article 1 de l'arrêté contesté ne vise que la demande de délivrance de titre de séjour pour soins médicaux, le droit au séjour de l'intéressé au titre de la vie privée et familiale et de l'admission exceptionnelle au séjour a été examiné. Par conséquent, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet n'aurait pas épuisé sa compétence.

4. En deuxième lieu, la décision de refus de séjour comporte les éléments de fait relatifs à la situation personnelle de M. A... et non contestés, à savoir qu'il est célibataire, qu'il ne peut se prévaloir de liens personnels et familiaux intenses, anciens et stables sur le territoire français, et qu'il ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine. En outre, ainsi qu'il a été dit au point précédent, le préfet a examiné sa situation au regard de son état de santé et d'éventuels motifs exceptionnels ou considérations humanitaires. Ainsi, alors même que ces motifs ne reprendraient pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressé, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet n'aurait pas procédé à un examen sérieux de sa situation et aurait entaché l'arrêté en litige d'une erreur de fait.

5. En troisième lieu, si le préfet a mentionné à tort dans l'arrêté que M. A... ne peut justifier de son entrée sur le territoire avec le visa correspondant à la demande de titre de séjour pour soins médicaux, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision en litige, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait fondé sur ce motif pour refuser à l'intéressé la délivrance d'un titre de séjour. Il en va de même des circonstances que le préfet a indiqué à tort que M. A... aurait méconnu les articles R. 521-5 et R. 521-6 ainsi que les articles R. 313-1 à R. 313-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En quatrième lieu, il ne ressort pas des termes de la décision contestée que le préfet des Alpes-Maritimes se serait, à tort, estimé lié par l'avis relatif à l'état de santé de M. A... émis le 12 octobre 2022 par le collège des médecins de l'OFII.

7. En cinquième lieu, l'arrêté en litige indique que M. A... est connu au fichier des traitements d'antécédents judiciaires et qu'il a été condamné en 2015 pour des faits d'outrage à personne dépositaire de l'autorité publique et de rébellion. Toutefois, si cette condamnation n'est pas suffisante pour caractériser une menace pour l'ordre public, et alors que la méconnaissance de l'article 133-11 du code pénal qui résulterait de la mention de cette condamnation est en tout état de cause sans incidence sur la légalité de la décision en litige, il ressort des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur les motifs relatifs à la situation personnelle et familiale de l'intéressé et mentionnés aux points 3 et 4.

8. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 425 9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412 1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

9. Pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. A..., le préfet s'est notamment approprié l'avis du 12 octobre 2022, par lequel le collège des médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et qu'eu égard à l'offre et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Il ressort des pièces du dossier, notamment des certificats médicaux et des comptes-rendus établis par des médecins du service ophtalmologie du centre hospitalier universitaire de Nice et de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, que M. A..., qui a perdu son œil droit en 2013 à l'issue d'un traumatisme, a été atteint en février 2022 d'une uvéite de l'œil gauche, a bénéficié en mars 2022 d'un traitement contre la toxoplasmose en milieu hospitalier à Paris et d'un suivi au centre hospitalier universitaire de Nice. M. A... fait valoir que le défaut de prise en charge médicale peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et qu'il ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Guinée. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier, notamment des observations produites par l'OFII, que M. A..., à l'issue du traitement qui a été finalisé en juillet 2022, a été guéri et a retrouvé une acuité visuelle de l'œil gauche de 10/10ème, et qu'en tout état de cause il peut bénéficier en Guinée d'un suivi ophtalmologique régulier et le cas échéant d'un traitement anti- toxoplasmose. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. En septième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine (...) ".

11. Si M. A... a résidé de façon continue sur le territoire français depuis 2009, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit précédemment, qu'il est célibataire et sans charges de famille en France, qu'il ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales en Guinée et qu'il ne justifie pas d'une insertion sociale à la date de l'arrêté en litige. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale en France une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis par la décision attaquée. Il n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, doit être écarté le moyen tiré de ce que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.

12. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".

13. Les conditions du séjour en France de l'appelant, telles qu'analysées aux points 3, 4 et 9, ne font pas apparaître de considération humanitaire ou de motif exceptionnel justifiant l'admission exceptionnelle au séjour de M. A... au sens des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il suit de là que le préfet des Alpes-Maritimes, en prenant la décision contestée, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions.

14. En neuvième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

15. Eu égard à ce qui a été dit au point 9, le moyen tiré de ce que le préfet des Alpes-Maritimes aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'en tout état de cause être écarté.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

16. Ainsi qu'il a été rappelé au point 1, par un arrêt n° 21MA02114, 21MA02115 du 3 février 2022, la Cour de céans a annulé, à la demande de M. A..., l'arrêté pris à son encontre par le préfet des Alpes-Maritimes le 3 février 2021, en tant qu'il l'obligeait à quitter le territoire français et fixait le pays de renvoi. Cette annulation est fondée sur la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-4-4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vertu desquelles ne pouvait être éloigné " L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " ", au motif que M. A... était présent régulièrement en France depuis plus de dix ans et n'avait pas bénéficié pendant toute cette période d'un titre de séjour portant la mention " étudiant ". Cet arrêt, faute de pourvoi du préfet des Alpes-Maritimes, est devenu définitif.

17. A la date de l'arrêté en litige, les dispositions de l'article L. 511-4-4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avaient été reprises par celles de l'article L. 611-3-3° du même code. Dans ces conditions, en l'absence de changement établi ou même allégué dans les circonstances de droit ou de fait à la date de l'arrêté attaqué, doit être accueilli le moyen tiré de la violation, par celui-ci, de l'autorité de chose jugée attachée tant au dispositif de l'arrêt du 3 février 2002 qu'aux motifs qui le fondent.

18. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français, M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 22 août 2023 en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français ainsi que, par voie de conséquence, en tant qu'il fixe le pays de renvoi. Il est également fondé, par suite, à demander l'annulation, dans la même mesure, de ce jugement et de cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte:

19. En vertu de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lorsqu'une décision portant obligation de quitter le territoire français est annulée, l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. Il y a lieu d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. A... une autorisation provisoire de séjour et de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

20. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Le Gars, avocat de M. A..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve que ce conseil renonce à la perception de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 22 août 2023 est annulé en tant qu'il oblige M. A... à quitter le territoire français et fixe le pays de destination.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nice n° 2304643 du 19 décembre 2023 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. A... une autorisation provisoire de séjour et de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Le Gars, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Le Gars et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et à l'office français de l'immigration et de l'intégration.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 24 avril 2025.

2

N° 24MA00184


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA00184
Date de la décision : 24/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : LE GARS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-24;24ma00184 ?
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