Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 27 avril 2024 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2401812 du 23 septembre 2024, le tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 15 octobre 2024, le préfet du Var, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 23 septembre 2024 du tribunal administratif de Toulon ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulon.
Il soutient que :
- M. B... n'établit pas contribuer à l'entretien et l'éducation de ses enfants français ;
- il constitue une menace à l'ordre public.
La requête a été communiquée à M. B..., qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Dyèvre, rapporteure.
Les parties n'étaient ni présentes ni représentées.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né le 3 novembre 1981, de nationalité sénégalaise, déclare être entré sur le territoire national le 28 février 1984 et s'y être maintenu depuis. Par un arrêté du 27 avril 2024, le préfet du Var a refusé de lui délivrer le titre de séjour qu'il sollicitait, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a pris à son encontre une décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Le préfet du Var relève appel du jugement du 23 septembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Selon l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant (...) ". Il résulte de ces dispositions que pour obtenir un titre de séjour en qualité de parent d'un enfant français, l'étranger qui se prévaut de cette qualité, doit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de cet enfant depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans.
3. Il est constant que M. B... est père de deux enfants de nationalité française, nés respectivement le 2 octobre 2012 et le 2 juin 2017, de deux unions différentes. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui ne fournit aucune indication sur ses liens avec son fils aîné, est hébergé par la mère de sa fille, Mme D... A..., selon l'attestation rédigée par celle-ci le 29 mai 2024. Si cette attestation, bien que postérieure à l'arrêté attaqué, révèle une situation préexistante à celui-ci, il ressort des pièces du dossier que seule une attestation de la caisse d'allocations familiale pour le mois d'avril 2024 est jointe au dossier établissant le versement d'allocations à M. B... et Mme A.... Ainsi, la résidence commune de M. B... avec la mère de sa fille ne peut être regardée comme établie qu'à compter d'avril 2024, faisant ainsi obstacle à ce que puisse être regardée comme remplie la condition relative à l'entretien et l'éducation de l'enfant depuis sa naissance ou au moins deux ans au vu de la résidence commune des deux parents. En outre, pour établir participer à l'entretien et l'éducation de sa fille, M. B... n'a versé aux débats que deux attestations de ses belles-sœurs en date du 30 mai 2024 faisant état de sa relation depuis 10 ans avec Mme D... A... et de la circonstance qu'il est un père présent pour sa fille et qu'il participe à son éducation et son entretien, sans plus de précision. Ces seuls éléments ne peuvent être regardés comme justifiant que l'intéressé contribuerait effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans. Dans ces conditions, il ressort des pièces du dossier que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulon a estimé que le préfet du Var avait, par l'arrêté contesté, méconnu les dispositions précitées de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... en première instance.
5. L'arrêté attaqué a été signé par M. Giudicelli, secrétaire général de la préfecture du Var qui, par un arrêté du 12 avril 2024, régulièrement publié le même jour au recueil des actes de la préfecture du Var, a reçu délégation du préfet du Var aux fins de signer " tous actes, décisions, recours juridictionnels, saisines juridictionnelles notamment en matière de police des étrangers ", la police des étrangers incluant notamment les décisions portant refus de titre de séjour. Il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 27 avril 2024 doit être écarté.
6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Il ressort des pièces du dossier que si M. B... soutient être entré en France en 1984 et avoir passé la majorité de sa vie en France, il ne produit à l'appui de ses allégations que quelques pièces éparses sur la poursuite de sa scolarité de 1993 à 1997, sur sa vie professionnelle en 2001, 2003 et 2011 qui n'établissent pas la réalité, la stabilité et l'ancienneté de sa vie privée et familiale en France. S'il se prévaut de sa présence quotidienne auprès de sa fille, il résulte de ce qui a été dit au point 3 du présent arrêté, qu'il n'en justifie pas. Il suit de là que le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
8. Aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
9. Si M. B... soutient que la décision portant refus de séjour causerait un traumatisme à son enfant, dès lors qu'il affirme résider quotidiennement auprès d'elle, il résulte de ce qui a été dit au point 3 du présent arrêt qu'il ne justifie pas de sa présence quotidienne auprès de cette enfant, ni des liens qu'il entretiendrait avec celle-ci. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut qu'être écarté.
10. Enfin, il résulte de ce qui précède que le moyen, soulevé à l'appui de l'obligation de quitter le territoire français, tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour attaqué doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Var est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 27 avril 2024.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2401812 du 23 septembre 2024 du tribunal administratif de Toulon est annulé.
Article 2 : Les conclusions de M. B... présentées en première instance sont rejetées.
Article 3 : présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- Mme Courbon, présidente assesseure,
- Mme Dyèvre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 avril 2025.
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N° 24MA02588
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