Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A...-B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2024 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2400499 du 15 octobre 2024, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 5 novembre 2024, Mme C..., représentée par Me Le Gars, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 15 janvier 2024 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un certificat de résidence algérien, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans le délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 6, 5° de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- en s'abstenant de faire usage de son pouvoir de régularisation à titre exceptionnel, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences du refus de séjour sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de de la décision de refus de titre de séjour.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit d'observations.
Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille du 29 novembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la Cour a désigné Mme Courbon, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement de la 1ère chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Courbon, présidente rapporteure,
- et les observations de Me Foury, substituant Me Le Gars, représentant Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante algérienne née le 25 août 1970, entrée en France en 2016, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour le 26 juillet 2023. Par un arrêté du 15 janvier 2024, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Par un jugement du 15 octobre 2024, dont Mme C... relève appel, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... B... est entrée en France en avril 2016 pour rejoindre son fils aîné, qui réside sur le territoire national sous couvert d'un certificat de résidence valable jusqu'au 26 mai 2030 et y travaille comme ingénieur dans le secteur de l'informatique après y avoir effectué ses études. Les nombreuses attestations circonstanciées produites au dossier confirment l'intégration dans la société française de Mme C..., qui a travaillé, à compter de l'année 2018, comme aide à domicile auprès d'une personnes âgée dépendante, dont elle était très appréciée et justifie d'une promesse d'embauche comme technicienne de surface au sein du centre de soins Riquier. Les pièces qu'elle produit au dossier, comme son emploi d'aide à domicile, justifient de la continuité de son séjour en France depuis 2016. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que Mme C..., qui est divorcée depuis 1996, dont le deuxième enfant est décédé en 2002, et les parents, dont elle s'occupait jusqu'alors, en 2014 et 2015, se trouve isolée en Algérie, un important conflit l'opposant à ses deux frères quant au partage des biens familiaux. Ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce, en refusant de livrer un titre de séjour à Mme C..., le préfet des Alpes-Maritimes, qui n'a au demeurant présenté aucune défense en première instance ou en appel, a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée. Cette décision doit, dès lors, être annulée, ainsi que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français sous trente jours et désignant le pays de destination.
3. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
4. Eu égard au motif d'annulation retenu, et en l'absence de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que l'autorité préfectorale délivre à Mme C... un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes d'y procéder dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et de lui délivrer dans l'attente, sous huit jours, une autorisation provisoire de séjour, sans qu'il soit nécessaire, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
5. Mme C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Le Gars, son conseil, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2400499 du tribunal administratif de Nice du 15 octobre 2024 et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 15 janvier 2024 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à Mme C... un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, sous huit jours, une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera à Me Le Gars une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A...-B..., au ministre de l'intérieur et à Me Le Gars.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et au procureur près le tribunal judiciaire de Grasse
Délibéré après l'audience du 24 avril 2025, où siégeaient :
- Mme Courbon, présidente,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller,
- M. Martin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2025.
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N° 24MA002737
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