VU, enregistrée au greffe de la Cour le 26 décembre 1992 sous le n° 92NC01016, la requête présentée pour M. Jean-Pierre X..., domicilié centre commercial des Champs Plaisants à SENS (Yonne) ;
M. X... demande à la Cour :
1°) - d'annuler le jugement en date du 20 octobre 1992, par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge partielle de suppléments d'impôt sur le revenu au titre des exercices clos en 1983, 1984 et 1985, et de suppléments de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er octobre 1982 au 30 septembre 1985 ;
2°) - de lui accorder la décharge partielle de ces impositions ;
VU le jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 1994 :
- le rapport de M. BATHIE, Conseiller ;
- et les conclusions de M. COMMENVILLE, Commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L.76 du livre des procédures fiscales : "Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portées à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination ..." ;
Considérant que la notification de redressement en date du 20 octobre 1986 comporte un exposé détaillé de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires et du bénéfice imposable du contribuable au cours de la période vérifiée, et apparaît ainsi suffisamment motivée au regard des exigences de l'article L.76 du livre des procédures fiscales précité ; que le moyen tiré d'une méconnaissance de ces dispositions doit donc être écarté ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
Considérant qu'après avoir écarté la comptabilité présentée par le contribuable, estimée non probante, le vérificateur a rectifié d'office le chiffre d'affaires et le bénéfice imposable des trois exercices clos en 1983, 1984 et 1985, sur le fondement des dispositions alors en vigueur de l'article L.75 du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il incombe au contribuable, compte-tenu de la procédure de rectification d'office mise en oeuvre, d'apporter la preuve de l'exagération des bases retenues par l'administration pour le calcul des redressements d'impositions en litige ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour reconstituer le chiffre d'affaires du commerce de boucherie-charcuterie exploité par le requérant, le vérificateur a distingué six catégories de produits pour lesquelles il a déterminé des coefficients de marge brute, lesquels ont ensuite été appliqués aux prix d'achats relevés sur place, afin d'aboutir aux ventes estimées de chaque exercice ; que ces six coefficients ont été établis, d'une part, pour quatre sortes de viandes, à l'issue d'une expérience de découpe de carcasses choisies par le contribuable qui a en outre procédé aux opérations personnellement, en présence du vérificateur, et d'autre part, pour les catégories "porc-fabrication" et "produits divers", grâce à des moyennes de marges, pondérées d'après la structure des ventes, et décelées au préalable par une étude détaillée des conditions d'exploitation de l'entreprise ;
Considérant, en premier lieu, que le requérant fait état des incertitudes de la méthode dues à l'extrapolation de données prélevées sur les six premiers mois de l'année 1986, aux résultats de trois exercices antérieurs, alors en particulier que les prix d'achat en gros et les prix de vente au détail ont connu des évolutions divergentes durant la même période ;
Considérant toutefois que, sous réserve de variations minimes, les conditions d'exploitation et notamment la structure des ventes, sont demeurées stables au cours des années vérifiées et ce jusqu'en 1986 ; que les prix d'achat ont été repris par produit et par année, d'après des documents internes à l'entreprise ; que le contribuable ne propose pas une meilleure méthode, en invoquant des moyennes générales de prix, dont il n'est pas établi qu'elles auraient correspondu aux conditions réelles d'exploitation de son commerce ; que ce premier moyen, tiré des erreurs commises au sujet de l'évolution des prix au cours des exercices vérifiés, doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, que pour les quatre catégories de viandes retenues, le requérant allègue la surévaluation des coefficients de marge bénéficiaire, qui résulterait de références à des données non significatives, en raison notamment de la prise en compte insuffisante de phénomènes naturels comme la dessication et l'exsudation des bêtes abattues et des déchets inévitables induits par la préparation des morceaux avant leur livraison à chaque client ;
Considérant qu'il ressort de l'instruction que, d'une part, les carcasses ayant servi à l'expérience de découpe, ayant été traitées quatre jours après l'abattage, n'ont pu subir que des phénomènes naturels très limités de pertes de poids et que, d'autre part, il a été procédé à deux réfactions successives de 2 % puis de 1 % qui permettent de tenir largement compte tant des prélèvements de l'exploitant que des déchets provoqués par la bonne présentation des produits ou des gestes commerciaux ;
Considérant enfin que si le requérant propose son propre calcul des chiffres d'affaires, à partir d'un ouvrage opérant la synthèse de données issues d'entreprises similaires, cette méthode basée sur des études à portée générale, s'avère nettement moins fiable que celle utilisée en l'espèce et fondée, comme précédemment indiqué, sur une expérience concrète de découpe de carcasses, dont il n'est pas établi qu'elles n'auraient pas constitué des échantillons représentatifs et qui a notamment permis de prendre en compte des facteurs très personnalisés de l'exploitation ; qu'il résulte de tous ces éléments que le contribuable n'a pas non plus établi l'erreur d'estimation des bases de ses impositions qui résulterait du calcul des marges bénéficiaires pour les quatre catégories de viandes sus-évoquées ;
Sur les pénalités :
Considérant que le requérant allègue une méconnaissance des dispositions de l'article L80 D du livre des procédures fiscales au motif que l'administration aurait omis de lui adresser une lettre de motivation des pénalités ; que ces dispositions issues d'une loi n° 86-1318 du 30 décembre 1986 n'étaient cependant pas en vigueur à la date des redressements litigieux ; qu'en tout état de cause, l'administration a adressé au contribuable le 27 novembre 1986, une lettre de motivation des pénalités appliquées ; que ce moyen manque en fait ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 20 octobre 1992, le tribunal administratif de Dijon a refusé de lui accorder la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de taxe sur la valeur ajoutée litigieux ;
Article 1 : La requête n° 92NC01016 de M. Jean-Pierre X... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre du budget.