(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 décembre 1996 sous le numéro 96NC02978, présentée pour l'ASSOCIATION RESIDENCE MEDICALE LE BELVEDERE dont le siège social est lieudit "La Haie Bataille" à Baye (Marne) par la société civile professionnelle Kohn et associés, avocats au barreau de Paris ;
L'ASSOCIATION RESIDENCE MEDICALE LE BELVEDERE demande à la Cour :
1 - d'annuler le jugement n 93-1800, 94-1621 et 94-1622 en date du 1er octobre 1996 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1984 à 1991 dans les rôles de la commune de Baye ;
2 - de lui accorder la décharge de cette imposition ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mai 1998 :
- le rapport de M. PAITRE, Président,
- et les conclusions de M. COMMENVILLE, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant que l'ASSOCIATION RESIDENCE MEDICALE LE BELVEDERE, association régie par la loi du 1er juillet 1901 ayant pour objet, d'après ses statuts, "L'assistance à des personnes âgées de soixante ans et plus, ayant perdu leur autonomie de vie et ayant besoin de soins constants", conteste son assujettissement à la taxe professionnelle au titre des années 1984 à 1991 ;
Sur la taxe professionnelle des années 1984 et 1985 :
Considérant, en premier lieu, que si, à la suite d'une vérification de comptabilité dont l'association a fait l'objet, le vérificateur lui a adressé une lettre le 5 juin 1987 pour la prévenir d'impositions à intervenir en matière de taxe professionnelle au titre des années 1984 et 1985, il est constant que les impositions correspondantes n'ont pas été mises en recouvrement ; qu'ainsi, la demande dont l'association a saisi le tribunal administratif était sans objet, et, partant, irrecevable, en tant qu'elle intéressait la taxe professionnelle à laquelle l'association avait été prétendument assujettie au titre des années 1984 et 1985 ; que l'ASSOCIATION RESIDENCE MEDICALE LE BELVEDERE n'est par suite pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté ses demandes tendant à être déchargée de la taxe professionnelle à laquelle elle aurait été assujettie au titre des années 1984 et 1985 ;
Sur la taxe professionnelle des années 1986 à 1991, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance de l'association par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie :
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L.56 du livre des procédures fiscales : "La procédure de redressement contradictoire n'est pas applicable :
1 En matière d'impositions directes perçues au profit des collectivités locales ou d'organismes divers ..." ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la procédure contradictoire prévue et définie par l'article L.55 et les articles L.57 et suivants du livre des procédures fiscales ne s'applique pas lorsque, notamment, l'administration notifie à un contribuable son assujettissement à la taxe professionnelle ; que, par suite, l'ASSOCIATION RESIDENCE MEDICALE LE BELVEDERE ne peut utilement soutenir que les lettres du 5 juin 1987 et du 22 octobre 1990 par lesquelles l'administration a fait connaître à l'association qu'elle serait assujettie à la taxe professionnelle au titre, d'une part, de l'année 1986, d'autre part des années 1987 à 1989 ne comportaient pas la motivation prévue par l'article L.57 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : ... - imposent des sujétions ..." ;
Considérant que les décisions par lesquelles l'administration met une imposition à la charge d'une personne physique ou morale ne pouvant, en dépit de la "sujétion" qui en résulte pour cette dernière, être regardées comme des décisions administratives individuelles "défavorables" au sens de l'article 1er précité de la loi du 11 juillet 1979, eu égard à l'obligation faite à l'administration d'établir les impôts dus par tous les contribuables d'après leur situation au regard de la loi fiscale, l'ASSOCIATION RESIDENCE MEDICALE LE BELVEDERE ne peut davantage utilement soutenir que les lettres du 5 juin 1987 et du 22 octobre 1990 ne comportaient pas la motivation prévue, en cas de décision imposant des sujétions, par les dispositions précitées ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : "La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme de X..., fondateurs de l'association et qui se chargent de la gestion matérielle et de la direction de celle-ci, ont perçu à ce titre, durant la période en litige, des rémunérations pour un montant annuel total de près de 190 000 F ; que, par ailleurs, l'association exerce son activité dans une propriété que les époux de X... mettent à sa disposition suivant un bail en date du 19 octobre 1981 qui, s'il est consenti pour une durée de quatre-vingt dix-neuf ans et ne prévoit pas de versement de loyer, met à la charge de l'association non seulement l'entretien des bâtiments qu'elle utilise, mais également l'entretien des bâtiments dont les époux de X... se sont réservés la jouissance pour y demeurer, et précise que les valorisations des biens loués résultant des améliorations et constructions nouvelles réalisées par le preneur sont acquises sans indemnité aux bailleurs ; que ces circonstances de fait et de droit, qui interdisent de regarder la gestion de l'association comme présentant, durant la période considérée, un caractère désintéressé, donnent à l'activité de l'association le caractère d'une exploitation lucrative ; que, dès lors, l'association requérante entrait dans le champ d'application de la taxe professionnelle tel qu'il est défini par les dispositions précitées de l'article 1447 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION RESIDENCE MEDICALE LE BELVEDERE n'est pas fondée à soutenir que c'est-à-tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté ses demandes tendant à être déchargée de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1986 à 1991 ;
Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION RESIDENCE MEDICALE LE BELVEDERE est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION RESIDENCE MEDICALE LE BELVEDERE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.