Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 10 septembre 2002, sous le n° 02NC00997, et le mémoire complémentaire enregistré le 22 octobre 2002, présentés par le MINISTRE DE LA JEUNESSE, DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE ;
Le ministre demande à la Cour :
- d'annuler l'article 1er du jugement du 30 juillet 2002 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a condamné l'Etat à payer, au taux horaire alors en vigueur, à M. X les heures supplémentaires qu'il avait effectuées au cours des années scolaires 1995-1996, à compter du 1er janvier 1996, et 1998-1999 ;
- de rejeter la demande de M. X devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;
- de rejeter les conclusions incidentes de M. X ;
- de rejeter la condamnation de l'Etat aux frais irrépétibles ;
Code : C
Plan de classement : 30-02-03-02
Il soutient qu'eu égard aux finalités des brevets d'études professionnelles (BEP), à la nature des enseignements dispensés dans la section du BEP électrotechnique, aux conditions dans lesquelles ils sont dispensés, aux horaires desdits enseignements, ainsi qu'aux épreuves professionnelles de l'examen terminal, les cours assurés par M. X revêtent un caractère pratique ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires en défense, enregistrés au greffe de la Cour les 3 octobre 2002, 13 novembre 2002 et 18 février 2004, présentés pour M. Bernard X, demeurant ..., par Maître Clamer, avocat ;
M. X demande à la Cour :
- de rejeter le recours du MINISTRE DE LA JEUNESSE, DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE ;
- de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer, au taux horaire alors en vigueur, les heures supplémentaires d'enseignement qu'il a effectuées au cours des années scolaires 1996-1997 et 1997-1998 ;
- de condamner l'Etat à lui payer ces heures supplémentaires ;
- de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 525 € au titre des frais irrépétibles ;
Il soutient que :
- la question relative au quantum du service hebdomadaire auquel sont astreints les professeurs de lycée professionnel enseignant en BEP d'électronique a été tranchée par la jurisprudence ;
- le juge de première instance devait requérir l'administration compétente de produire tout document de nature à permettre la vérification de ses allégations ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 92-1189 du 6 novembre 1992, relatif au statut particulier des professeurs de lycée professionnel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2004 :
- le rapport de M. KINTZ, Président de Chambre,
- et les conclusions de M. TREAND, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 30 du décret du 6 novembre 1992 : ...les professeurs de lycée professionnel sont tenus de fournir, sans rémunération supplémentaire, dans l'ensemble de l'année scolaire, le maximum de service hebdomadaire suivant : 1. Pour l'enseignement des disciplines littéraires et scientifiques et les enseignements professionnels théoriques : dix-huit heures ; 2. pour les enseignements pratiques : vingt-trois heures... ; qu'aucune disposition réglementaire ne détermine les critères permettant d'établir le caractère théorique ou pratique d'un enseignement dispensé par un professeur de lycée professionnel ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'enseignement d'électrotechnique, dispensé au cours des années scolaires 1995-1996 à 1998-1999, par M. X, professeur de lycée professionnel dans des classes préparant au BEP d'électrotechnique, est, pour l'essentiel, celui du savoir-faire professionnel de la spécialité du diplôme en cause ; que si les programmes correspondants comportent l'acquisition d'une méthodologie et de concepts, ils font une large part à des cours délivrés devant des groupes à effectifs réduits ; que les épreuves auxquelles prépare cet enseignement tendent principalement à vérifier la capacité des élèves, soit à appliquer ou à expérimenter des règles et procédés techniques en présence de situations professionnelles déterminées, soit à proposer des solutions technologiques à des problèmes pratiques auxquels sont confrontés les professionnels de la branche ou du secteur d'activité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour condamner l'Etat à payer à M. X les heures supplémentaires qu'il avait effectuées au cours des années scolaires 1995-1996, à compter du 1er janvier 1996, et 1998-1999, le Tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur ce que l'enseignement dispensé par M. X présente le caractère d'un enseignement théorique ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;
Considérant que l'égalité de traitement à laquelle ont droit les agents d'un même corps ne fait pas obstacle à ce qu'une discrimination puisse être légalement instituée entre eux lorsqu'elle est fondée sur l'existence de conditions différentes d'exercice des fonctions ou sur un motif d'intérêt général ; que le décret du 6 novembre 1992 a pu légalement prévoir une modulation du maximum de service hebdomadaire en fonction de la nature des enseignements dispensés par les professeurs de lycée professionnel ;
Considérant que la circonstance que les modalités d'établissement de la durée hebdomadaire de service des professeurs de lycée professionnel, selon que l'enseignement soit considéré comme théorique ou pratique, auraient pour effet d'engendrer des écarts de rémunération selon l'enseignement dispensé ne porte pas atteinte au principe d'égalité de traitement dont doivent bénéficier les agents d'un même corps ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le décret du 6 novembre 1992 méconnaîtrait le principe d'égalité entre agent d'un même corps manque en fait ;
Considérant qu'il résulte de ce que précède que le MINISTRE DE LA JEUNESSE, DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a condamné l'Etat à payer à M. X les heures supplémentaires qu'il avait effectuées au cours des années scolaires 1995-1996, à compter du 1er janvier 1996, et 1998-1999 ; qu'en tout état de cause et pour les mêmes motifs, l'appel incident présenté par M. X pour les années scolaires 1996-1997 et 1997-1998 ne peut qu'être rejeté ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 30 juillet 2002 est annulé.
Article 2 : Les demandes de M. X devant le Tribunal administratif de Strasbourg et devant la Cour sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE LA JEUNESSE, DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE et à M. X.
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