Vu la requête enregistrée au greffe le 11 février 2004, présentée pour M. Guy X élisant domicile ..., par Me Vernier, avocat ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 11 décembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a annulé, à la demande de la Société Industrielle Automobile de Besançon (SIAB), la décision de l'inspecteur du travail du 26 mai 2000 refusant d'autoriser son licenciement ;
2°) de condamner la SIAB à lui verser la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- il n'y avait pas lieu à statuer sur la demande présentée par la SIAB devant le tribunal administratif, les faits étant amnistiés ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de ce qu'aucun fait fautif de nature à justifier le licenciement n'a été commis durant les périodes d'astreinte ;
- l'enquête de l'inspecteur du travail a démontré l'absence d'intention fautive et de fraude ;
- il existe un lien entre le mandat syndical et la demande d'autorisation de licenciement ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 août 2004, présenté pour la Société Industrielle Automobile de Besançon (SIAB), par Me Bouquard, avocat ; la société conclut :
- au rejet de la requête ;
- à la condamnation de M. X à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- les faits reprochés à M. X sont exclus du champ d'application de la loi d'amnistie ;
- ils sont établis ;
- ils constituent une faute d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement ;
- il n'existe pas de lien entre la demande d'autorisation de licenciement et le mandat syndical exercé par M. X ;
Vu l'ordonnance fixant la clôture de l'instruction le 29 avril 2005 à 16 heures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 2005 :
- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,
- les observations de Me BOUQUARD, de la société d'avocats Fidal Besançon, avocat de la Société Industrielle Automobile de Besançon (SIAB),
- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que le tribunal qui n'a pas à répondre à chacun des arguments exposés devant lui, a répondu au moyen tiré de ce que les faits n'étaient pas établis ; que son jugement n'est dès lors entaché ni d'insuffisance de motivation ni d'omission à statuer ;
Sur l'application de la loi d'amnistie :
Considérant que la demande d'autorisation de licenciement adressée à l'inspecteur du travail par la société Industrielle Automobile de Besançon (SIAB), le 7 avril 2000, était motivée par le fait que M. X, délégué syndical et membre titulaire de la délégation unique du personnel, employé en qualité de mécanicien-dépanneur, avait recouru à de fausses déclarations d'intervention lui permettant de bénéficier d'avantages indus ; que les faits ainsi reprochés sont constitutifs d'un manquement à la probité et sont, par suite, exclus du champ d'application de la loi du 6 août 2002 susmentionnée ; qu'en estimant, dès lors, qu'il lui appartenait de statuer sur la demande, dont l'avait saisi la SIAB, tendant à l'annulation de la décision du 26 mai 2000 de l'inspecteur du travail rejetant la demande d'autorisation de licenciement, le Tribunal administratif de Besançon n'a pas entaché son jugement d'irrégularité ;
Sur la légalité de la décision du 26 mai 2000 :
Considérant que les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, a rempli, sur une période de quatre semaines, seize déclarations de dépannage ne correspondant pas aux relevés des ouvertures de dossier de prise en charge effectués par la société Inter-Mutuelle-Assistance (IMA ) ; que si M. X a pu justifier certaines de ces discordances, huit d'entre elles, établies par l'enquête menée par la direction de la SIAB auprès des clients et de l'Inter-Mutuelle-Assistance, demeurent sans explications pertinentes ; que ces discordances dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elles correspondraient à des pratiques tolérées par l'entreprise ni qu'elles seraient la conséquence de consignes imprécises, révèlent l'existence de fausses déclarations ayant pour but de faire bénéficier leur auteur d'avantages indus ; que ces faits sont constitutifs d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement ;
Considérant que si M. X fait état, devant la Cour, du climat de tension dans lequel a été négociée la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail et de l'importante pression qu'il aurait subie depuis le changement de direction en juillet 1999, il ne produit aucun document permettant d'étayer ses affirmations ; que la sanction prise à son encontre ne révèle pas, par rapport au sort réservé à ses deux autres collègues, une anomalie manifeste susceptible de démontrer l'existence d'un lien entre le mandat exercé et le licenciement ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a annulé la décision du 26 mai 2000 de l'inspecteur du travail ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Industrielle Automobile de Besançon, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X à payer à société Industrielle Automobile de Besançon une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : M. X versera à la société Industrielle Automobile de Besançon la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Guy X, à la société Industrielle Automobile de Besançon et au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.
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N° 04NC00139